Les sternutatoires à travers les siècles (suite)*
L’éternuement qui avait été provoqué un tel miracle passait, auprès des médecins les moins mystiques de l’antiquité et du moyen-âge, pour posséder les vertus curatives les plus merveilleuses : aussi les sternutatoires qu’ils préconisent sont-ils nombreux. Parmi eux, l’euphorbe devait jouir d’une vogue particulière au temps de Rabelais : dans une de ses poches, Panurge « avoit tout plein de euphorbe pulvérizé bien subtilement et là dedans mettoit un mouschenez beau et bien ouvré qu’il avait desrobé à la belle lingière du Palais en lui ostant un pouil dessus son sein, lequel toutefois il y avoit mis. Et quand il se trouvait en compaignie de quelques bonnes dames, il les mettoit sur le propos de lingerie et leur mettoit la main au sein, leur demandant : »Et cest ouvrage : elle est de Fontignan ou de Fontarabie. » Et le secouait bien fort à leur nez et les faisoit esternuer quatre heures sans repos. »
Dans la deuxième moitié du XVI° siècle, le tabac fit son apparition en France; il dut ses premiers succès à ses qualités de sternutatoire. Aujourd’hui les médecins ont cessé de l’ordonner, ainsi que l’euphorbe et autres fauteurs d’éternuement. pourquoi ? demande M. le docteur Leclerc : « Pourquoi des médicaments dont se trouvaient bien nos ancêtres se montreraient-ils inefficaces chez leurs descendants ? C’est une question que l’histoire a bien le droit de poser à la clinique. »
Dr Leclerc, Janus, 1916
Bulletin de la SHP, 1917, p. 337-338