LES PHARMACIENS DE NAPOLÉON(d’après Paul Dorveaux, 1921*)
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Dès qu’il eut été proclamé empereur (28 floréal an XII = 18 mai 1804), Napoléon se constitua une vraie maison de souverain, avec grand aumônier, grand chambellan, grand maréchal du palais, grand écuyer, grand veneur, grand maître des cérémonies, intendant général, etc…. Ce dernier avait sous ses ordres de nombreux personnages (peintres, architectes, etc.), entre autres les médecins, les chirurgiens et les pharmaciens composant le « Service de santé » de Sa Majesté. Organisé par Corvisart, devenu premier médecin de l’empereur, le service de santé se composait, en 1805, de huit médecins, huit chirurgiens, trois pharmaciens, un « médecin oculiste » et un « chirurgien-dentiste ». Plus tard, il s’accrut de quatre « médecins par quartier », d’un « pharmacien ordinaire », d’un chirurgien-bandagiste », etc. Corvisart avait fait octroyer la charge de « premier chirurgien » à l’illustre Boyer, et celle de « premier pharmacien » à l’honnête Déyeux, à qui il adjoignit, comme « pharmaciens ordinaires », Cadet, Clarion et Bouillon-Lagrange, qui, devenu médecin de l’impératrice Joséphine, fut remplacé par Rouyer. Nicolas Deyeux Né à Paris le 21 mars 1745, Nicolas Déyeux fit ses études au collège Mazarin, puis il entra chez son oncle, Philippe-Nicolas Pia, apothicaire rue du Four, près de la Croix Rouge, où il fit son apprentissage et son stage en vue de la maîtrise de pharmacie. « Déyeux était alors d’une beauté remarquable, dit l’auteur de son Eloge anonyme : sa taille était noble, ses membres délicats étaient moulés. La pharmacie Pia était très fréquentée : elle avait une belle et riche clientèle. De grandes dames y venaient souvent y chercher elles-mêmes quelques pâtes agréables, quelques médicaments de bonbonnières, quelques vinaigres efficaces ». L’une d’elles conçut pour Déyeux un violent caprice, qu’elle s’ingénia à satisfaire de la façon suivante : simulant une indisposition, elle se mit au lit et commanda chez Pia un clystère avec la recommandation expresse qu’il fût apporté par Déyeux lui-même. Celui-ci arrive, muni du précieux remède et s’apprête à l’administrer, lorsque la dame lui fait comprendre par « un mouvement qui détruit tout soupçon de paralysie » qu’elle désire autre chose qu’un lavement médicamenteux. Nouveau, Joseph Déyeux s’enfuit « franchissant quatre à quatre les marches de l’escalier ». Avec une vertu aussi rigide, il devait indubitablement faire son chemin. Reçu maître apothicaire en mai 1772, Déyeux succéda à son oncle Pia dans son officine de la Croix Rouge et il y pratiqua fructueusement la pharmacie pendant 15 ans. En 1774, il est nommé « conseiller du Roi quartinier de la Ville » pour le quartier de l’Ile Notre-Dame. Lors de la création du Collège de Pharmacie (1777), il est chargé d’enseigner la chimie : « démonstrateur très suivi et très écouté », il professait encore en 1793, date à laquelle Bailleau lui fut adjoint. Après avoir vendu sa pharmacie à Boudet, il se retire rue de Tournon et s’y adonne à des travaux de laboratoire, en collaboration avec son ami Parmentier : leur grand Mémoire sur les laits, rédigé pendant les années 1787-1788, leur vaut, en 1790, le premier prix de la Société Royale de Médecine. La révolution surprend Déyeux en pleine activité ; et tout en le ruinant, lui fait courir le danger de suivre sur l’échafaud son frère Didier, notaire à Paris. Au début de 1795, Déyeux est à l’Ecole de Santé de Paris (établissement devenu plus tard Ecole de Médecine, puis Faculté de Médecine), professeur de la chaire de « chimie médicale et pharmacie » qu’il occupera jusqu’en 1822 ; le 22 octobre 1797, il est élu membre de la section de chimie de la Classe des Sciences physiques et mathématiques de l’Institut National ; et lors de la création du Conseil d’hygiène (6 juillet 1802), il en est nommé membre par le préfet de police Dubois ; enfin, le 1er décembre 1803, il est avec Chaussier désigné par l’Ecole de Médecine pour présider aux examens de l’Ecole de Pharmacie et à la visite des officines du département de la Seine. Nommé premier pharmacien de l’Empereur, Déyeux aurait accepté cette charge éminente à une condition invraisemblable qui est rapportée dans son Eloge anonyme : « Sire, dit-il, permettez-moi d’y mettre une condition : c’est que je n’irai jamais à l’armée ; je ne puis vivre que dans le calme, et je dois vous avouer, à ma grande honte, que je ne suis pas brave du tout ». – « Vous n’irez point à l’armée, dit l’empereur ; je sais qui vous êtes : je vous estime ». – « Ma foi, sire, vous avez bien raison, aurait ajouté Corvisart, qui en usait familièrement avec l’Empereur ». Deyeux n’alla donc point à l’armée. Pendant que son maître guerroyait dans toute l’Europe, il dirigea la pharmacie de la cour sans interrompre aucune de ses occupations pacifiques : enseignement de la chimie et de la pharmacie, inspection des officines, travaux de laboratoire, publications savantes, etc. Et cela dura jusqu’à la première abdication de Napoléon (6 avril 1814). Après son retour de l’île d’Elbe, ce fut Cadet qui devint premier pharmacien de l’Empereur. Sous la Restauration, Déyeux continua son cours de chimie et de pharmacie jusqu’à la fameuse séance de la rentrée de la Faculté de Médecine (18 novembre 1822) où les étudiants huèrent l’abbé Nicole qui la présidait en qualité de vice-recteur de l’Académie de Paris, et à la suite de laquelle la Faculté fut « supprimée » et onze professeurs, dont Déyeux, furent destitués : il avait alors 77 ans révolus. Deux ans auparavant, Louis XVIII créant l’Académie de Médecine, l’en avait nommé membre « titulaire ». Le 5 octobre 1830 une ordonnance de Louis-Philippe réintégrait dans leurs fonctions les professeurs révoqués an 1822 et rappelait dans la chaire de pharmacie de la faculté de Médecine, Déyeux qui, à cause de son grand âge, ne l’occupa point et s’y fit suppléer. Il avait quitté son hôtel de la rue de Tournon, n°8, pour habiter sa jolie maison de campagne de Passy où il mourut le 25 avril 1837. On connaît deux portraits de Déyeux : l’un, peint à l’huile par J.-Hector Degrais, appartient à la Faculté de Pharmacie de Paris ; l’autre, lithographié par Jules Boilly, en 1822, se trouve à la Bibliothèque Nationale. Son éloge a été prononcé par : E. Pariset, secrétaire perpétuel de l’Académie de Médecine ; Moreau, professeur à la Faculté de Médecine ; A. Chevallier, professeur à l’Ecole de Pharmacie de Paris ; Félix Boudet, successeur de Déyeux, dans sa pharmacie de la Croix-Rouge, etc.
Charles-Louis Cadet de Gassicourt Cadet, pharmacien ordinaire de Napoléon, c’est Charles-Louis Cadet de Gassicourt, né à Paris, le 23 janvier 1769. D’après le général baron Thiébault, il était le fruit des amours de Louis XV avec la belle Madame Cadet, femme du savant propriétaire de la pharmacie Cadet-Derosne, situé rue saint-Honoré. Après de brillantes études aux collèges de Navarre et Mazarin, Cadet de Gassicourt obtint de vifs succès dans le monde comme littérateur et comme avocat. La révolution survenue, il s’y rallia et se lança dans la politique ; mais il failli le payer de sa tête et il n’échappa à l’échafaud que par la fuite. La tourmente terminée, il revint à Paris et reprit son existence très mouvementée. Sur ces entrefaites, son père putatif mourut (25 vendémiaire an VIII = 17 octobre 1799) après avoir dilapidé sa fortune. Gassicourt, déçu dans ses espérances, renonça à sa vie dissipée et se décida à embrasser la profession pharmaceutique. Sa qualité de fils de maître et sa haute situation lui valurent de grandes facilités pour parvenir à la maîtrise, et le 26 prairial an VIII (15 juin 1800), il obtenait le diplôme de maître en pharmacie. Dès qu’il est muni de son diplôme, Gassicourt s’installe rue Saint Honoré, presque en face de l’officine Cadet-Derosne, tenue par la veuve Derosne avec qui il est dans les plus mauvais termes. Bientôt, « son établissement est des plus prospères, sa notoriété est considérable. En 1802, il appelle l’attention du gouvernement sur une organisation nouvelle du Conseil de salubrité publique : le plan qu’il présente est immédiatement adopté par le préfet de police Dubois. Il est alors nommé lui-même secrétaire général du Conseil, fonction qu’il occupera pendant 19 ans, entouré de collègues comme Déyeux, Parmentier, Huzard, etc. ». M. Toraude à qui j’emprunte ce passage, ajoute : « Tout cela explique pourquoi Napoléon le choisit comme son premier pharmacien (sic) ». A mon avis c’est Déyeux qui, connaissant la haute valeur de Gassicourt, l’aurait désigné à Corvisart pour faire partie de la maison de l’Empereur. Au printemps de 1809, Cadet de Gassicourt rejoint l’armée française qui va opérer en Allemagne et en Autriche contre la cinquième coalition : il assiste à de nombreux combats, entre autres à la bataille de Wagram (6 juillet), et à l’occasion de la fête de l’empereur, il reçoit à Vienne le 16 août, « un brevet de chevalier de l’empire et un majorat ». La campagne terminée, il rentre à Paris où il reprend le cours de ses nombreux travaux. En 1812, il soutient devant la Faculté des Sciences deux thèses qui lui procurent le titre de docteur, et il publie son Formulaire Magistral dont les éditions se succéderont jusqu’en 1833. Après le retour de l’île d’Elbe, Cadet remplaça Déyeux à la Cour. Pendant les trois mois qu’il dirigea la pharmacie impériale, il fut mandé plusieurs fois auprès de Napoléon qui, poursuivi par l’idée de s’empoisonner, la mit à exécution dès qu’il eut abdiqué. La science de son premier pharmacien sut, heureusement, le tirer de ce mauvais pas. L’effondrement de l’empire fait rentrer Gassicourt dans la vie privée. En 1815, il reçoit de Louis XVIII la croix de la Légion d’Honneur. Trois ans après, il se décide à publier chez l’Huillier libraire à Paris, le récit de son expédition sous le titre : Voyage en Autriche, en Moravie et en Bavière, fait à la suite de l’armée française pendant la campagne de 1809. « Malte-Brun, qui en rendit compte dans le Journal des Débats, critiqua très vivement cette production, empreinte d’un esprit de libéralisme que ses patrons n’avaient point encore embrassé, et termina son article en s’étonnant qu’un homme qui, par position, n’avait jamais pu voir que les derrières de l’armée, se mêlât de tactique. Ce calembour ad hominem valu au trop hardi critique une paire de soufflets appliqués devant témoins ». Au début de l’année 1821, Cadet fut élu membre titulaire de l’Académie de Médecine, récemment créée par Louis XVIII ; mais il ne jouit pas longtemps de ce nouvel honneur car il mourut le 21 novembre suivant. Cadet de gassicourt a beaucoup écrit ; il fut, en 1809, un des fondateurs du Bulletin de Pharmacie. Son éloge a été publié par Virey, Salverte, Pariset, etc. ; un de ses portraits se trouve dans le Centenaire du journal de pharmacie, par Emile Bourquelot ; plusieurs autres ont été reproduits dans l’Etude sur les Cadet, par M. Toraude.
Jacques Clarion Jacques Clarion est né à Saint-Pons-de-Seyne (Basses Alpes) le 12 octobre 1776. Apprenti chez Jaramey, pharmacien à Seyne, il étudia particulièrement la botanique et fit de nombreuses herborisations dans les Alpes. La réquisition permanente, décrétée par la Convention, vint interrompre ses études : le 25 frimaire an III (15 décembre 1794), il recevait une commission d’officier de santé de troisième classe pour l’armée d’Italie où il resta jusqu’à la paix de Campo-Formio (17 octobre 1797). La campagne terminée, il va herboriser dans le Tyrol et l’Istrie, puis il se rend à Paris pour y compléter ses études médicales. A l’Ecole de médecine, il suit les exercices de l’Ecole Pratique et devient bientôt aide-chimiste. Le 11 thermidor an XI (30 juillet 1803), il soutient une thèse intitulée : Observations sur l’analyse des végétaux, suivies d’un travail chimique sur les rhubarbes exotique et indigène, laquelle lui confère le doctorat, puis il est nommé préparateur en chef du cours de chimie et pharmacie de l’Ecole de Médecine. En 1805, Déyeux, qui est professeur de ce cours et premier pharmacien de Napoléon, fait nommer Clarion, dont il a pu apprécier la valeur, pharmacien ordinaire de l’empereur et directeur de la pharmacie impériale de Saint-Cloud. Dès que Clarion est installé au château, il demande à l’Ecole de Pharmacie de Paris le diplôme de pharmacien qui lui est délivré le 14 messidor an XIII (3 juillet 1805). Après le retour des Bourbon, Clarion fut invité par le duc de Duras, premier gentilhomme de la Chambre du Roi, à servir Louis XVIII ; mais il déclina provisoirement cet honneur et partit pour les Alpes de Provence et du Dauphiné, dont il étudia la flore. De retour à Paris en 1817, il accepta aussitôt la charge d’ « apothicaire ordinaire du Roi ». L’année suivante (décembre 1818) il est nommé professeur adjoint de botanique à l’Ecole de Pharmacie en remplacement de Guiart fils, devenu titulaire de la chaire. Au début de 1821, l’Académie de Médecine l’élit membre titulaire pour la section de pharmacie et deux ans plus tard, il est nommé professeur d’histoire naturelle médicale à la Faculté de Médecine de Paris (2 février 1823) ; mais Louis-Philippe le révoque par son ordonnance du 5 octobre 1830. Clarion, qui avait déjà perdu son emploi à la cour, se consacre alors à sa science de prédilection, la botanique et à ses fonctions de professeur adjoint à l’Ecole de Pharmacie. Il meurt dans sa belle propriété de Garches (Seine et Oise), le 29 septembre 1844. Son éloge a été publié par Guibourt et par A. Chatin ; son portrait, peint à l’huile, se trouve à la Faculté de Pharmacie de Paris. A Saint-Cloud, Clarion touchait, comme pharmacien de l’empereur, 5.000 francs, plus la moitié des bénéfices provenant de la vente de médicaments qu public, ce qui portait ses appointements à 8.000 francs environ.
Edme-Jean-Baptiste Bouillon-Lagrange Edme-Jean-Baptiste Bouillon-Lagrange est né à Paris le 12 juillet 1764 et s’est appelé Bouillon de La Grange jusqu’à la révolution. Reçu maître en pharmacie le 2 août 1787, il achète l’officine de son beau-frère Sureau ; mais il la quitte après deux ans de pratique pour s’adonner à la chimie sous la direction de Fourcroy et de Berthollet. Survient la révolution qui manque de lui être funeste : il échappe à l’échafaud par la fuite. Bientôt la réquisition permanente l’attache à ses études et l’expédie à l’armée de la Vendée avec le grade de pharmacien de troisième classe. Il en revient pour occuper à Paris une place d’essayeur chimique à l’agence des poudres et salpêtres. Le 6 avril 1796, le Collège des pharmaciens, réorganisant son enseignement, élit comme professeurs de chimie : Bailleau, Déyeux, Bouillon-Lagrange et Vauquelin. Il disparaît six mois plus tard pour faire place à l’Ecole gratuite de Pharmacie qui maintient Bouillon-Lagrange dans la chaire de chimie. Cette chaire lui restera lors de la fondation de l’Ecole de Pharmacie en l’an XI (11 avril 1803). Bouillon-Lagrange enseigne encore la chimie à l’Ecole Centrale du Panthéon et à l’Ecole Polytechnique où il est devenu chef des travaux chimiques chargé de la direction et de la surveillance des études pratiques relatives à cette séance. « C’est, dit Bussy, pendant son séjour à l’Ecole Polytechnique que Bouillon-Lagrange eut l’occasion de se faire remarquer de Napoléon. Le jeune conquérant de l’Italie, prétendant alors à de plus hautes destinées, se mettait en rapport avec toutes les sommités sociales et particulièrement avec les savants les plus distingués ; il désirait se faire initier aux secrets de leurs sciences. Berthollet lui fit, à son invitation, un cours de chimie à l’Ecole Polytechnique ; ce fut Bouillon-Lagrange qui en prépara les expériences ; c’était lui qui, dans le cours des leçons, prêtait au savant professeur le secours de sa main plus sûre et plus exercée. L’illustre disciple de Berthollet conserva le souvenir de l’humble préparateur ; plus tard il l’appela auprès de lui et l’attacha à sa personne comme pharmacien militaire (sic), et Bouillon-Lagrange fit, en cette qualité, plusieurs campagnes avec Napoléon ». « Attaché comme pharmacien à la maison de l’empereur, dit un autre de ses biographes, Bouillon-lagrange le suivit an cette qualité pendant les mémorables campagnes d’Autriche et de Prusse. Ce fut pendant qu’il remplissait ses fonctions qu’il se fit recevoir docteur en médecine ». Bouillon-Lagrange soutint sa thèse pour le doctorat devant la faculté de Médecine de Strasbourg, le 2 frimaire an XIV (23 novembre 1805) : ce nouveau diplôme lui valut l’office de médecin de l’impératrice Joséphine, pour lequel il quitta la pharmacie impériale. Lorsque Napoléon eut répudié Joséphine (16 décembre 1809), Bouillon-Lagrange refusa d’abandonner l’impératrice, et de ce fait il perdit sa place à la cour. Il se consacra alors à l’enseignement de la chimie et à la pratique de la médecine. En 1829, il devint directeur adjoint et en 1832 directeur de l’Ecole de Pharmacie de Paris ; il occupa cette place jusqu’à sa mort survenue le 23 août 1844. Auteur de nombreux ouvrages de chimie et de pharmacie, Bouillon-Lagrange fut membre de l’Académie de Médecine (1820), du Conseil d’hygiène publique (1838) et de nombreuses sociétés savantes. Son éloge a été prononcé par Bussy, Buignet, Gustave Planchon, Dubois d’Amiens, etc. ; son portrait peint à l’huile se trouve à la Faculté de Pharmacie de Paris. Pierre-Charles Rouyer Pierre-Charles Rouyer naquit à Verdun (Meuse) le 12 mai 1769. Après avoir fait de bonnes études classiques, il entra à l’hôpital militaire de cette ville comme gagnant maîtrise et devint pharmacien de troisième classe le 27 août 1794 ; ensuite il servit successivement à l’armée de Moselle, au Val de Grâce et à l’armée d’Egypte. Là il fut adjoint à J.-P. Boudet, pharmacien en chef d’armée et membre de la Commission des Sciences et des Arts de l’Institut d’Egypte ; puis il fut chargé du Magasin général des médicaments, en même temps que du service de la pharmacie de l’hôpital de la citadelle du Caire. Devenu lui-même « membre de la Commission des Sciences et des Arts d’Egypte », Rouyer rédigea sur des questions archéologiques, médicales et pharmaceutiques, de savantes notices qui furent insérées dans les Mémoires sur l’Egypte, dans la somptueuse description de l’Egypte et dans le Bulletin de la pharmacie. Enfin, lors de l’évacuation de l’Egypte, il sollicita et obtint l’honneur de rester sur le bâtiment où l’on avait réuni les malades atteints de la peste, qui ne devaient rentrer en France qu’un mois après le départ de l’armée. Le 2 juin 1802, Rouyer est affecté à la pharmacie de l’Hôtel des Invalides avec le grade d’aide-major, et, en 1808, il est appelé à la cour comme « pharmacien ordinaire de l’empereur », en remplacement de Bouillon-Lagrange devenu médecin de l’impératrice Joséphine. Le 25 mai 1809, il acquiert le diplôme de pharmacien à l’Ecole de Pharmacie de Paris. D’après M. Balland, Rouyer aurait cumulé sa charge de pharmacien de l’empereur avec celle qu’il occupait à l’Hôtel des Invalides. « Tout en étant attaché à l’Hôtel des Invalides, dit-il, Rouyer a suivi Napoléon dans ses campagnes en France, en Russie et en Allemagne, en qualité de pharmacien ordinaire de l’ambulance du chef du gouvernement ». L’empire disparu, Rouyer reste à l’Hôtel des Invalides où il obtient (15 août 1823) le grade de major et la place de pharmacien en second qu’il occupera jusqu’à sa mort survenue le 31 mai 1831. Il était chevalier de l’ordre de la Réunion et de la Légion d’Honneur. A part la notice de M. Balland, je ne connais aucune biographie de Rouyer. Dans son Voyage en Autriche, Cadet de Gassicourt lui a consacré la note suivante : « Il y avait à l’armée d’Orient un autre pharmacien nommé Rouyer, généralement estimé et digne de l’être, homme fort éclairé, plein de zèle et de philanthropie. Il est un des collaborateurs du grand ouvrage de l’Institut d’Egypte. Il est revenu en France et a fait, depuis, les campagnes de Prusse, d’Espagne, d’Allemagne et de Russie en qualité de pharmacien ordinaire de l’Empereur ». Le général Rouyer, baron de Saint-Victor, né à Verdun en 1756, était peut-être un frère aîné du pharmacien de l’empereur. Dans son ouvrage sur les Fournisseurs de Napoléon 1er (Paris, 1893, p. 88), Maze-Sencier donne la liste des personnes attachées à la pharmacie impériale en 1810, avec le chiffre des appointements attribués à chacune d’elles ; cette liste est ainsi conçue : « Déyeux, premier pharmacien, 8.000 francs. « Clarion, pharmacien adjoint, résidant à Saint-Cloud, 5.000 francs. « Rouyer, Cadet, pharmaciens adjoints ordinaires, chacun 3.000 francs. « Gruelle, premier aide pharmacien, 1.800 francs. « Lecoeur, deuxième aide pharmacien, 1.500 francs. « Boudouard, garçon de laboratoire attaché à la pharmacie de Saint-Cloud, 1.000 francs ». A cette liste manque le nom de Le Bas, pharmacien établi rue Saint Paul et auteur d’un traité de Pharmacie Vétérinaire qui, sous le règne de Louis-Philippe, s’est dit « ancien pharmacien vétérinaire de Napoléon » ; mais il est à présumer que Le Bas a usurpé ce titre qui doit être de son invention. Dr Paul Dorveaux
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*Source : Bulletin d’histoire de la pharmacie, N°30, juin 1921 : 317-333 |