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Decouvertes

Les découvertes ou œuvres faites par des pharmaciens  en dehors du médicament

 d’après l’ouvrage de Louis-Marie Bodénès, Réalisations Extra-pharmaceutiques des pharmaciens français, Nantes, Imprimerie de l’Atlantique, 1962)
  • Dans le domaine de l’alimentation
Il n’est pas surprenant que le nom de Parmentier ait une renommée mondiale dans les questions alimentaires car depuis toujours les pharmaciens se sont intéressés à ce qui a trait à la nourriture. Le médicament, disait Jean de Renou au XVII° siècle, tient le milieu entre l’aliment et le poison. Les pharmaciens se sont par exemple fortement intéressés aux matières sucrées. L.J. Proust (1754-1824), pharmacien en chef de l’hôpital de la Salpétrière, découvrit en 1799 le sucre de raisin. Ces travaux seront poursuivis par Parmentier pour suppléer à la rareté du sucre de canne. Le pharmacien George-Simon Serullas fut chargé par Napoléon de le préparer en grande quantité, ce qui lui valut la médaille d’Or de la Société de la Pharmacie de Paris en 1813. Le pharmacien major Astier aida également à l’industrialisation du procédé. Un autre pharmacien de la Grande Armée, Boudet (1748-1828), étudia la fabrication du sucre de betterave, ainsi que Deyeux, pharmacien de Napoléon.
Le deuxième domaine d’étude fut celui des farines : Millon (1812-1867) découvrit le rôle de l’hydratation dans la conservation des sons et farines. Bouchardat (Apollinaire) inventa les pains de régimes en 1851 et beaucoup d’autres pharmaciens ont contribué à améliorer la qualité des farines.
Les pharmaciens se sont intéressés au vin dont Moyse Charas disait « qu’il est passé pour une liqueur si précieuse que l’Antiquité payenne l’a confondu parmi les divinités et que l’expérience l »a fait reconnaitre à toute la médecine pour un aliment des plus exquis, pour un remède des plus efficaces ». Cadet de Vaux, Parmentier, Pelouze, Duportal, Filhol, Bouchardat, Bussy, Balland sont quelques uns des pharmaciens qui ont participé à l’étude de la vinification, de la conservation et de l’amélioration du vin par divers procédés.
D’autres pharmaciens, ou parfois les mêmes, se sont consacrés à l’étude du lait et de ses dérivés. Ainsi Deyeux (1745-1837) fit de nombreuses communications sur le beurre et les fromages pour en améliorer la fabrication. En 1869, Napoléon III ouvrit un concours pour trouver à l’usage des pauvres un corps gras sain, se conservant longtemps sans rancir et à faible coût. C’est le pharmacien Hippolyte Mege-Mouriès qui réussit à mettre au point la margarine et on lui doit d’avoir lancé l’industrie des corps gras.
Le Chocolat a suscité beaucoup d’intérêt chez les pharmaciens, comme excipient mais aussi comme friandise. Sur le plan industriel, c’est sans aucun doute Antoine-Brutus Menier (1795-1853) qui reste le pharmacien le plus connu dans ce domaine. Il inventa un système spécial de meules pour pulvériser les produits pharmaceutiques et fabriquer du chocolat. Il transporta en 1825 son usine parisienne dans un moulin plusieurs fois centenaire, à Noisiel. Comme il fournissait beaucoup de pharmaciens, il décida de devenir pharmacien lui-même, à 43 ans. Son fils, Justin Menier (1825-1881), également pharmacien, reprit et développa l’usine paternelle, en fonda une autre à Saint Denis, établit une sucrerie dans la Somme et une chocolaterie à Londres. Il fonda un prix de Matière Médicale à l’Ecole Supérieure de Pharmacie de Paris.
  • Dans le domaine de l’agriculture

Chacun sait le tribu que doit la France à Parmentier pour la pomme de terre. « C’est au moment de la grande famine de 1785 qu’il obtint de Louis XVI le prêt de 50 arpents d’une terre très médiocre et inculte située aux Sablons, aux portes de Paris, près du Pont de Neuilly. S’improvisant agriculteur, il y planta la pomme de terre. Le Roi, qui admirait la patience et la force de persuasion de ce pharmacien, vint un jour visiter le champ de Parmentier et, voulant lui rendre hommage, orna sa boutonnière d’une fleur de pomme de terre » (ref Bodénès). Quelques années plus tard, pendant la Révolution, Parmentier sera chargé d’aller en Camargue, mandaté par la commission d’agriculture et des arts, activer la moisson, étudier les plantes propres à fournir de la soude et de la potasse et indiquer les moyens pour y conserver et y multiplier les bestiaux. Bien d’autres pharmaciens vont être partie prenante à l’évolution de l’agriculture : Baumé, Cadet de Vaux, Libergé, Bérard, Frémy, Courtois, Tripier, Henri Lecoq, Garreau, Aubergier, Ville, Malaguti, Labbé et bien d’autres. Limousin-Lamothe, pharmacien, fut le fondateur et le rédacteur du Journal d’Agriculture et Sciences accessoires, à l’usage des propriétaires ruraux du département du Tarn. Apollinaire Bouchardat (1806-1856), quant à lui étudia les plantes dont les racaines plongent dans l’eau et en tira des considérations sur les végétaux dans les terrains submergés. Il préconisa l’emploi des engrais ammoniacaux et phosphatés et s’intéressa particulièrement aux engrais appropriés à la vigne. Il faut également mentionner Jules Planchon (1823-1898) qui devint rédacteur de la Flore des Serres er des Jardins de l’Europe. Il fut reçu docteur en Médecine à Montpellier puis fut diplômé pharmacien en 1856. Il fut particulièrement intéressé par la vigne et étudia le phylloxéra. Chargé d’une mission en Amérique, il eut l’idée de ramener des plants américains résistants au phylloxéra sur lesquels il fit greffer des plants français, sauvant ainsi le vignoble français.

Un autre pharmacien remarquable dans ce domaine est E. Millon qui fut pharmacien en chef en Algérie en 1852 et chercha à développer les richesse du pays: il découvrit des amélioration possibles à la culture du blé, à la récolte des plantes à parfums. Il eut également l’idée d’utiliser le goudron de houille pour protéger les silos à blés de l’humidité. A quelques kilomètres d’Alger, il créa une petite ferme et put mettre ses découvertes en pratique. Bobierre, son élève, fut également remarqué. Pharmacien diplomé à Marseille, il entra dans l’industrie des engrais et devint en 1850 directeur du Laboratoire de Chimie Agricole. Il fut le véritable fondateur des stations agronomiques en France. Le pharmacien militaire Balland s’intéressa, quant à lui, au blé. Il conclut de ses études l’intérêt de devancer la moisson. Il fut chargé par le gouvernement d’organiser une station agricole avec des champs d’expérience. Il découvrit deux lois fondamentales : la fixation de l’azote par les plantes et par les microorganismes du sol. D’autres pharmaciens se sont intéressés à la lutte contre les prédateurs. La découverte de la strychnine par Pelletier et Caventou permit de préparer des appâts empoisonnés. En 1936, pour apporter la collaboration officielle des pharmaciens à la lutte contre les insectes ou autres ennemis des végétaux, Perrot fonda à Paris l’Association professionnelle de Phytopharmacie. D’autres pharmaciens se sont intéressés à la Météorologie (Louvet, Lépine, Boudier, Musculus, Evin, Chautard…) et à la géologie : Alexandre Brongniart (1770-1847) collaborateur de Cuvier, a laissé une description géographique des environs de Paris et doit être regardé comme le fondateur de la géologie scientifique. Son fils, Adolphe Brongniart (1801-1876) peut être considéré de son côté comme à l’origine de la paléontologie végétale. La vulcanologie a aussi été le terrain d’étude de pharmaciens. Ainsi Nicolas Lémery qui supposa que les explosions volcaniques étaient dues à la réaction mutuelle, au contact de l’air, du soufre, du fer et de l’eau. Louis Claude Cadet de Gassicourt analysa les laves du Vésuve.

 

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