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Emplâtre de Vigo

Jean de Vigo était un Gênois, « médecin-chirurgien » du papes Jules II (1443-1513) qui publia, au début du XVIe siècle de nombreux écrits sur la syphilis et les médicaments permettant de la traiter. Au nombre de ceux-ci figure un emplâtre ou cérat mercuriel. Astric, dans son Traité des Maladies vénériennes (1740) le décrit ainsi :

« Un des plus fameux & des plus en usage autrefois étoit celui que décrit Jean de Vigo (Practica Lib. 5 Cap. 2) dont il vante beaucoup la vertu, & qu’il dit avoir éprouvé mille fois. On en trouve la formule dans toutes les pharmacopées sous le nom d’emplâtre de Vigo ».

Il apparaît aussi sous le nom d’Emplastrum joannis Vigonis seu de Ranis dans la Pharmacopoea Burdigalensis de 1643.Dans la Pharmacopée Universelle de Lémery, publiée pour la première fois en 1697, il existe plusieurs emplâtre de Vigo : l’emplâtre au minium, préconisé pour la cicatrisation des blessures, l’emplâtre de Vigo simple et surtout, l’emplâtre de Vigo avec mercure, qui ne diffère du précédent que par la présence de mercure, et qui était plus particulièrement destiné au traitement des « humeurs vénériennes ».

Sa composition était très riche, faisant appel aux trois règnes de la nature. Grenouilles vivantes (d’où le nom d’emplastrum de ranis), vers de terre, graisse de porc, de veau, de vipère, ainsi que cire d’abeilles représentaient le règne animal ; litharge d’or et d’argent vif, le règne minéral ; de nombreuses plantes et huiles végétales, le règne végétal. La quantité de mercure incorporé était variable selon des auteurs.

Le mode d’administration était parfaitement décrit par Astruc :

« On étendoit cet Emplâtre ou Cérat sur la peau & on en couvroit les jointures des membres, les membres eux-mêmes, & tout le corps, excepté … le ventre, la poitrine, & la tête ; & on ne l’ôtoit que quand on voyoit paroître des signes d’une salivation prochaine. « 

Au XIXe siècle, l’emplâtre de Vigo contenait 20% de mercure ; sa base était constituée par l’emplâtre simple (avec litharge, axonge, huile d’olive et eau) additionné de cire jaune, colophane, bdelium, oliban, myrrhe, safran, mercure, térébenthine, styrax, et essence de lavande, la formule avait, on le voit, été singulièrement simplifiée. Cet emplâtre était d’un gris ardoise, parfois jaunâtre. On le soumettait à un essai d’épreuve qui consistait à le plonger dans une liqueur composée d’acide sulfurique et de densité 1.426, afin de vérifier que la quantité de mercure était conforme. Dorvault, dans l’Officine, mentionnait en effet, que l’emplâtre de Vigo ne contenait pas toujours la proportion de mercure convenable et que parfois le mercure était remplacé par de la plombagine (carbure de fer ou graphite) de l’ardoise pilée, et que le safran ne figurait plus dans la formule. Dorvault indiquait aussi que Jean de Vigo préparait un emplâtre avec vingt parties de son emplâtre sans mercure, en ajoutant trois parties de mercure éteint dans une partie de térébenthine.

Cet emplâtre, résolutif à appliquer sur les humeurs glandulaires, les orchites, était également employé pour atténuer, voire anéantir, les marques de petite vérole et contre les syphilides granuleuses, tuberculeuses, etc.

Le supplément du Codex de 1920 a supprimé dans la formule de l’emplâtre de Vigo une gomme-résine, le bdélium qui y figurait primitivement.

Auteurs : Henri Bonnemain et Olivier Lafont. Dictionnaire d’Histoire de la Pharmacie, des origines à la fin du XIX° siècle, Olivier Lafont (sous la direction de), 2° édition, Pharmathèmes, 2007.

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