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La Pharmacopée gauloise

La Pharmacopée gauloise

 Plusieurs articles d’histoire de la pharmacie ont été consacrés à ce sujet, en particulier celui du Professeur Paris en 1980(1) qui lui-même se référait à de nombreux autres auteurs. Les Gaulois, issus des Celtes, ont laissé peu de documents écrits, sauf sur les ex-voto, des statuettes ou des monnaies. Le rôle des médecins et des prêtres était tenu par des druides – ceux-ci parlaient souvent en vers et le Grec servait aux tractations commerciales. Mais les médicaments étaient aussi dispensés par des guériseurs comme dans toutes les sociétés empiriques. La base des médicaments gaulois était principalement des plantes. Théophraste et Dioscoride en signalent plus de 500, Celse environ 250, Pline l’Ancien environ un millier et Galien plus de 400, mais leur identification est hasardeuse. Une des meilleures sources sur les médicaments utilisés en Gaule est constituée par des manuscrits du IVe siècle d’un gallo-romain, Marcellus EMPIRICUS. Celui-ci, né à Bordeaux, probablement médecin ambulant, avait parcouru la Gaule avant d’être archiatre à la Cour de l’Empereur Théodose et indique de nombreux remèdes utilisés chez les Gaulois ; on trouve dans ces manuscrits environ 2500 recettes groupées en 36 chapitres correspondant aux médicaments des différents organes : contre les maux de tête, contre les maux de cœur, contre les angines et la toux, remèdes pour les maladies du foie, les affections de la rate, des reins et de la vessie, etc.

Pour les médicaments d’origine végétale, les plantes étaient récoltées avec un certain cérémonial. : cueillette lors du Solstice d’été (culte celte au soleil), verveine coupée les nuits sans lune, etc. Marcellus énumère environ 150 plantes utilisées en Gaule. La plus connue est le Gui toujours vert, poussant sur le chêne, symbole de l’immortalité de l’âme, plante sacrée et véritable panacée dont la récolte faisait l’objet d’un rite particulier décrit par PLINE (druide vêtu de blanc avec une serpe d’or. Ce cérémonial est maintenant considéré, en partie du moins, comme une légende colportée par des historiens de l’Antiquité, relayés à l’époque moderne2). Il faut également citer la Bétoine (blutagio en gaulois), plante astringente, et la Verveine commune (ferfaere en celte) surtout employée dans les maux d’yeux et, encore de nos jours, en médecine populaire comme digestive et vulnéraire et en cataplasme. On peut églement citer la serpentaire ou l’hièble, une sorte de sureau. Les Gaulois utilisaient aussi les Artemisia : l’Absinthe marine, herbe santonica ou herbe de Saintonge, douée de propriétés vermifuges, et l’Armoise commune (bicrunum) : elle était préconisée contre les maux de reins pour les hommes et comme emménagogue pour les femmes.

 

L’Ail avait également de multiples applications : dans les dermatoses, dans les affections du rein et de la rate, dans les maux d’estomac. L’emploi de la Chélidoine ou Grande éclaire dans les maux d’yeux était déjà connu des Gaulois. Il en est de même de la Petite Centaurée, drogue amère appelée pour cette raison fiel de la terre. Les druides lui reconnaissaient des propriétés fébrifuges, elle servait contre les piqûres d’animaux venimeux (serpents, insectes, scorpions). Les graines et le jus de concombre sauvage étaient employés contre certaines dermatoses et comme laxatif. Le Fenouil, surtout la racine, est rencontré fréquemment dans les recettes, surtout pour les maux de reins. Parmi les autres plantes utilisées par les Gaulois, on peut citer la Jusquiame (bilinoutio), le Lierre (souivitis en gaulois, hedia en celtique), le Marrube, les Menthes, l’ache, l’anis, le basilic, etc. Mais les druides utilisaient aussi des plantes exotiques provenant vraisemblablement de la Méditerranée et du Moyen Orient : l’aloès, les cannelles, l’encens, le galbanum, la gomme adragante, l’iris d’illyrie, le mastic, la myrrhe, le myrte, le nard (le nard utilisé par les druides devait être le nard celtique, confondu à tord avec le nard de Syrie. il était obtenu à partir d’une valriane des régions alpines (Valeriana spica) maintenant introuvable2), l’opium, l’opoponax, le poivre, la gomme ammoniaque, le safran, la sandaraque, le styrax et sans doute le gingembre.

 

Si certaines préparations étaient relativement simples avec un chiffre de constituants inférieur à quatre ou cinq, d’autres (électuaires, antidotes) en contenaient plusieurs dizaines. Il faut aussi mentionner les collyres secs dont l’usage est assez caractéristique de l’époque gallo-romaine (I°-III° siècles) avec de nombreuses formules, se présentant sous la forme de batonnets imprimés en relief qui devaient être pour l’usage disous dans de l’eau ou une huile, voire pulvérisés2. Les Gaulois étaient donc très avancés dans l’art de préparer les médicaments. PLINE attribue d’ailleurs l’invention de la Thériaque à un médecin gaulois dénommé Crinés. La pharmacie y était très honorée. On a découvert à Grand (Vosges) en 1842 une statuette œuvre d’un sculpteur gallo-romain du I° ou II° siècle, qui est conservée au Musée d’Epinal. Appelée Meditrina ou pharmacienne par Espérandieu et regardé par Jullian comme une femme « fabricant de savon », elle est considérée aujourd’hui notamment par le Pr Duval comme la divine patronne de la Pharmacie. Cette statuette est sans doute la première représentation d’une apothicairerie française.

 Source : (1) R. PARIS. La Pharmacopée gauloise. Bulletin de l’Ordre des pharmaciens, n°237, Octobre 1980. (2) J. POISSON. Revue d’Histoire de la Pharmacie, LII, 2004, n°343, p. 393-390.

Voir aussi :

P.BOUSSEL et H. BONNEMAIN . Histoire de la Pharmacie, Ed. de la Porte Verte, Paris, 1977

M. BOUVET. La pharmacie chez les gaulois, dans l’histoire de la Médecine par Laignel-Lavastine, Albin Michel, Paris 1936

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