Exposition Pomet
(Suite) (2/3)
Suite de l’Exposition Pomet
3/3
Le livre V de l’ouvrage de Pomet a pour thème les feuilles. Comme pour tous les chapitres précédents, Pomet définit ce qu’il entend par feuilles, « premier verd que les plantes …poussent d’abord que le beau tems vient ». Pour Pomet, le mot feuilles est dérivé du mot Grec Phillon & du mot latin Folium. Parmi les feuilles décrites, celle du Sené, à qui quelques uns ont donné le nom de Feuille Orientale , est la feuille d’une plante, ou plutôt d’un arbrisseau qui a environ un pied de haut, qui croît en plusieurs endroits du Levant, & même en Europe.
Pomet décrit trois sortes de Sené que nous distinguons en Sené de la Palte ou d’Alexandrie, en Sené de Tripoly, & en Sené de Moca, ce dernier, que les colporteurs appellent Sené de la pique, ne devait en aucun cas être utilisé, n’étant propre à rien. Pomet conclut que le Sené est un excellent purgatif pour les humeurs crasses & glaireuses; il est aussi la base des ptisannes laxatives, comme aussi ces folicules qui sont préférées aujourd’hui au Sené. Toujours dans ce chapitre V, Pomet donne une description de la culture et du travail du Tabac, « ainsi appelé à cause qu’il s’en trouve quantité dans l’île de Tabaco, & à qui quelques uns ont donné le nom de Nicotiane, à cause de M. Jean Nicot Ambassadeur de France en Portugal, qui en a apporté le premier en France à la Reine, ce qui lui a fait donner aussi le nom d’Herbe à la Reine. Elle est appellée aussi Buglose antartique, à cause que cette herbe croît en grande abondance dans les Isles; & Herbe Sainte, à cause de ses propriétez, & finalement Petun qui est le nom que les Indiens lui ont donné, & qui est son premier et véritable nom ».
Pomet poursuit longuement ensuite la description de la plante et de la façon de la cultiver. Il précise également que la vertu du tabac est d’être vomitif, purgatif, vulnéraire, cephalique & convient à l’apoplexie, paralysie, & aux cathares. il décharge le cerveau d’une limphe dont la trop grande quantité ou mauvaise qualité incommode cette partie : l’usage médiocre en fumée ou mâché convient dans les maux de dents, la migraine, les fluxions de tête, dans la goutte, les rhumatismes & autres causées par un dépôt d’humeurs glaireuses.. Le Sirop de Tabac est employé dans l’asthme & dans les toux opiniatres.
Pomet décrit de très nombreuses autres plantes dont on utilise les feuilles : Berel, Coca, Alcana ou Cyprus, Cochenille, Corail, Coraline, Eponges. Il consacre une page aux Scilles qui sont des Oignons qui nous sont apportés d’Espagne, où ils croissent en abondance, principalement des rivages de la mer ; Il en vient aussi en quantité en Normandiesur tout auprès de Quilboeuf, à dix-huit lieuës par de-là Rouen.. On estime les Scilles principalement le coeur, être un poison, c’est pourquoi quand on veut s’en servir on les fend en deux, et on rejette les feuilles sèches et le coeur, & le milieu on l’expose à l’air, & quand elles sont sèches on en fait le vinaigre & le miel ; et pour la Thériaque on en fait de même, mais au lieu de les exposer à l’air, on les couvre de pâte, & on les fait cuire au four, surtout quand c’est pour en faire des trochisques, ainsi qu’il est décrit dans plusieurs Pharmacopée.
Le Livre sixième de Pomet concerne les fleurs.
C’est un chapitre plus court et moins illustré que les autres. Pomet défini les fleurs comme des Boutons épanouis de diverses couleurs et grosseurs, que poussent les végétaux, & d’où naissent & sortent leurs fruits & leurs graines…. Le mot fleur vient du mot Grec Phlox, & du Latin Flos ou Flamma, qui signifie Flamme, en ce que l’on prétend que les fleurs représentent une espèce de flamme. Parmi les fleurs décrite dans l’ouvrage, on trouve la Rose de Provins, fleurs d’un rouge foncé & velouté, que l’on nous apporte de Provins, petite ville à dix-huit lieuës de Paris. Les Rose de Provins sont des fleurs fort estimées de tous le monde, à cause qu’elles sont très astringeantes, & fort propres pour fortifier les nerfs, ou autres parties du corps affaiblies, soit pour foullure ou détorse, après avoir bouillies dans de gros vin, ou dans de la lie de vin ; elles ont beaucoup d’usage dans la Médecine, en ce qu’elles entrent dans plusieurs compositions Galéniques.
Le septième et dernier chapitre du premier tome de l’oeuvre de Pmoet est consacré aux fruits et « tout ce qui sort des Herbes , Arbrisseaux, Sous-Arbrisseaux, & même des Arbres immédiatement après les fleurs ». C’est un chapitre assez long où Pomet décrit un grand nombre de plantes, à commencer par le poivre auquel il consacre plusieurs pages. Les illustrations sont également nombreuses. On voit ici l’exemple du poivre d’Etiopie et le poivrier de Thevet.
Pomet distingue le poivre blanc, dont l’usage, dit-il, est trop répandu pour s’y arrêter ; et le poivre noir qui n’a pas d’autre usage que le blanc, il est aussi d’usage en Médecine , à cause qu’il est chaud, dessicatif, incisif, attenuant, aperitif, stomachal, & febrifuge, donné dans l’eau de vie avant l’accès des fièvres intermittentes. On l’emploie pour remettre l’aluette, & il entre aussi dans plusieurs compositions chaudes, comme la Thériaque & autres.
Autre plante de ce chapitre des fruits : le Girofle, qui est à proprement parler, la fleur endurciue de certains arbres, note Pomet. Il se livre à une analyse de la culture géopolitique du Girofle, très commun aux iles des Moluques : mais depuis quelques années, les Hollandais ne pouvant empêcher les Anglois, les Portugais & Nous d’y aller, & d’en apporter du girofle, il se sont avisez pour se conserver et se rendre suels les maîtres de cette marchandise, d’en arracher tous les arbres, & de les transporter dans l’Isle de Ternate, & par ce moyen, il faut que les autres Nations achetent d’eux le Girofle, n’en pouvant avoir ailleurs. Quant au Girofle Royal, Pomet indique que l’arbre qui porte le fruit est unique au monde & ne se trouve « qu’au milieu de l’Isle de Massia, aux Indes Orientales, où il est appellé des habitants de l’Isle Thinca-Radai. Ce fruit est tellement révéré du Roy de l’Isle, qu’il le fait garder par ses soldats, afin que personne n’en ait que lui. On prétend aussi que lorsque cet arbre est chargé de ses fruits, les autres arbres s’inclinent devant lui comme pour lui rendre hommage, & pour lui faire honneur…
Le deuxième tome de l’oeuvre de Pomet s’ouvre sur le Livre I consacré aux Gommes On distingue, dit-il, deux sortes de Gommes : les gommes aqueuses et les Gommes résineuses. Il y en a qui y ajoutent une troisième, qu’ils nomment irrégulières qui ont de la peine à se dissoudre dans l’eau et dans l’huile, comme la Myrrhe ou le Benjoin. Le premier chapitre s’ouvre sur la Manne, dont Dieu nourrit les Israélites dans le désert, et se poursuit avec la Gomme-Gutte, puis la Gomme Arabique. « La Gomme Arabique, Thebaïque, Sarracene, de Babylone ou Achantine, ou d’Acacia d’Egypte, qui est le nom des arbres qui la portent, est une Gomme blanchâtre en petites larmes, qui découle de plusieurs petits arbres fort épineux, dont les feuilles sont si petites, qu’à peine les pourroit-on compter, qui se trouvent en quantité dans l’Arabie Heureuse, d’où elle a tiré son nom. cette Gomme nous est apportée en France par la voye de Marseille ».
Pomet rapporte les propos de Sieur le Maître de janvier 1694 : « C’est des Maures que nous avons la gomme Arabique ; ils la ceuillent dans les Deserts de la Lybie intérieure. Elle croît aux arbres qui la portent, comme celle qui vient aux Cerisiers & aux Pruniers en France. ils la viennent vendre un mois ou six semaines avant l’inondation du Niger ».
Parmi les nombreuses Gommes décrites par Pomet, ce dernier évoque le Camphre, résine fort combustible, dit-il, venant darbres qui croissent en quantité dans l’Isle de Bornéo, & autres endroits de l’Asie, & même dans la Chine. Les habitans des lieux où croissent ces arbres, incisent les troncs, d’où il en sort une gomme blanche, qui se trouve au pied de l’arbre en petits pains, & qui est envoyée en Hollande pour y être rafinée. Pomet indique également que le Camphre guérit les inflammations des yeux, appaise la douleur de la brûlure avec de l’eau de Rose, de l’eau de Plantin ou de Morelle, il appaise la douleur de tête ; il est chaud naturellement et froid par accident comme le vinaigre… L’on tire du Camphre par le moyen de l’esprit de Nitre, une huile de couleur d’ambre, qui sert pour la carie des os.
Poursuivant ce très long chapitre sur les Gommes, Pomet en vient à décrire le Baume de Judée, que nous appellons ordinairement Opobalsamum, ou Baume d’Egypte, ou du Grand Caire. Jerico étoit autrefois le seul endroit du monde où croissoit le vrai Baume ; mais depuis que le Turc s’est rendu Maître de la terre-Sainte, il en a fait transpnater les arbrisseaux dans son Jardin de la Matarée au grand Caire, où ils sont gardez par plusieurs Janissaires, pendant que le Baume en coule.
Un de mes amis, précise Pomet, qui a été au Caire, m’a assuré que l’on ne pouvoit voir ces arbrisseaux, que par dessus les murs d’un Clos où ils sont, & dont l’entrée est défenduë aux Chrétiens. A propos du baume, il est presque impossible d’en pouvoir avoir sur les lieux, si ce n’est par le moyen des Ambassadeurs à la Porte, à qui le Grand seigneur en fait present, ou par le moyen des janissaires qui gardent ce précieux Baume.
Pomet poursuit ce Livre I avec un long passage sur le fameux Baume de M. le Commandeur de Perne et ses propriétés nombreuses : Il n’y a point de coup de fer ou de feu, pourvu que la playe ne soit pas mortelle, qu’on ne guerisse dans huit jours, en y mettant du baume…Pour la colique, ce Baume est admirable…Pour la Goutte, il est souverain… Pour le mal des Dents, il est merveilleux,etc…. Toujours dans le chapitre des Gommes, Pomet donne une longue description de la Therebentine, une liqueur visqueuse, gluante, résineuses, huileuse, claire & transparente. Nous vendons, dit-il, trois sortes de Therebentines : la Therebentine de Chio, la Therebentine du bois de Pilatre, & la Therebentine de Bourdeaux.
Pomet explique longuement les propriétés de ces Thérébenthines et indique que la seconde, la Thérébenthine de bois de Pilatre en Forêt (vendu faussement sous le nom de Thérébenthine de Venise) est la plus utilisée en raison de ses multiples propriétés. elle est en effet, selon Pomet, apéritive, vulnéraire, diurétique, nephretique, & employée pour la guérison des ulcères des Rheins & les gonnorhées, prise en bol depuis demie jusqu’à une dragme, & en lavement depuis demie jusqu’à une once. il faut la dissoudre avec quelques jaunes d’oeufs. Elle entre dans les baumes, onguents, emplâtres, & autres compositions galéniques.
Suite de l’exposition Pomet 3/3