Exposition temporaire
|
|||
Les XIXe et XXe siècles vont être les témoins du développement de la spécialités pharmaceutiques, faisant suite aux « remèdes secrets » tant combattus par les pharmaciens jusqu’à la loi de 1941 qui donna finalement un statut clair à ce type de médicaments préparés à l’avance par les firmes pharmaceutiques. La publicité sous toutes ses formes va progresser parallèlement et les entreprises du médicament vont oeuvrer pour promouvoir leurs produits auprès des professionnels de santé mais aussi auprès du grand public. Dans ce cadre, la présentation finale des remèdes,jusque là sans importance, va prendre toute sa mesure et chacun va rivaliser pour embellir cette présentation. C’est dans ce contexte que va se développer l’usage des boites en métal pour la présentation des médicaments. Elles étaient à la fois pratiques, faciles à conserver dans une poche, et joliment décorées. La présente exposition en présente quelques unes parmi les centaines sans doute mises sur le marché pendant cette période. La première catégorie de médicaments qui va bénéficier de cette présentation est sans aucun doute celle des pâtes pectorales et pastilles en tout genre. Il faut attendre le XVIIIe siècle pour trouver une formule de pâte obtenue par la dissolution du sucre et de gomme dans un liquide et l’évaporation en consistance de pâte. Soubeiran indiquait en 1837 qu’on utilisait indistinctement les mots pastilles et tablettes. Cependant, dit-il, on applique plus généralement le premier à ceux des médicaments qui sont préparés par la cuite du sucre, et qui ne contiennent que du sucre et des aromates. Les tablettes étaient des médicaments rendus agréables par la proportion considérable de sucre qu’on y introduisait.
|
|||
Blackoïds Brown. Pectoral sans rival (Pastille) | Blackoïds Brown (dos de la boite) | ||
Pastilles Valda (Etablissements Pastival) | Pastilles Valda (dos de la boite) | ||
Les Etablissements Goy seront l’un des laboratoires qui favorisent la présentations en boites métalliques, avec les pastilles balsamiques, les pastilles Vocis et surtout les fameuses pastilles MBC qui existeront pendant plus de 60 ans.Les documents originaux indiquent que c’est le 19 février 1895 que Bouniol et Rozet vendent à Adolphe GOY et Alfred Jaeger leur fond de commerce qui est « une usine de fabrication de produits pharmaceutiques conditionnés au nom du pharmacien et avec la marque de la dite usine, connue sous le nom d’Usine française avec marque déposée en 1884, ainsi que la fabrication des pastilles, dragées, pilules, granules et produits analogues ». Mais ce n’est qu’en 1905 que se crée la « Société des Etablissements GOY ». De nombreuses spécialités y sont effet développées. En 1918, Maurice Bouvet est nommé Administrateur délégué et dépose la marque M.B.C. (les pastilles existaient déjà depuis plus de 20 ans) jusqu’au 13 décembre 1940 où il est nommé Président du Conseil-Directeur Général. |
|||
|
|||
Pastilles balsamiques GOY (Toux…) | Pastilles Balsamiques GOY (dos de la boit) |
||
Pastilles VOCIS de GOY |
Pastilles M.B.C. de GOY (Menthe Borate Cocaïne) |
||
Pastilles M.B.C. de GOY | Pastilles M.B.C. de GOY (dos de la boite) | ||
|
|||
Pastilles M.B.C. de GOY | Pastilles M.B.C. de GOY (dos de la boite) | ||
La forme galénique la plus courante pour cette présentation en boites métalliques est la forme pastille, mais on rencontre aussi des spécialités sous des formes très différentes. RB par exemple présente ainsi des ampoules pour injections hypodermiques. Ce n’est véritablement qu’à la fin du XIXe siècle que l’injection parentérale s’était développée, après la création de l’ampoule par Stanislas Limousin, mais aussi après les travaux sur l’aseptie et les moyens efficaces de stériliser les solutions injectables. |
|||
Ampoules hypodermiques RB | Ampoules hypodermiques RB (dos de la boite) |
||
On trouve aussi des suppositoires comme cette boite des Laboratoires SAUTER. Ils ont la particularités d’être creux, pouvant ainsi accepter des substances actives très diverses.Goris, dans son édition 1942 de « Pharmacie Galénique » précisait que « les suppositoires creux , vendus tout préparés, sont des cônes de beurre de cacao pourvus d’une cavité dans laquelle on introduit les substances médicamenteuses. On les ferme à l’aide d’une petit tampon de beurre de cacao que l’on soude à l’aide d’une spatule chauffée. Cette façon d’opérer n’est pas toujours recommandable car le médicament se trouve mis trop brusquement en contact avec la muqueuse et peut l’irriter. On les emploie surtout pour les suppositoires à l’arséno-benzol en disposant à l’intérieur un petit crayon formé de beurre de cacao et d’arsénobenzol mélangés au mortier ».
|
|||
|
|||
Les boites de grandes dimensions étaient réservées aux cataplasmes comme on peut le voir ici avec l’AUTOPLASME Vaillant, cataplasme sinapisé. Vaillant était alors le pharmacien de la Maison Frère à Paris. Il précisait que l’autoplasme doit se trouver en réserve dans toutes les familles. « Son emploi évitera souvent de graves complications et de sérieuses maladies ». L’Autoplasme Vaillant avait été, précise-t-il, adopté par les Hôpitaux et Dispensaires de la ville de Paris. |
|||
Autoplasme Vaillant (Maison L. FRERE, Paris) | Autoplasme Vaillant (dos de la boite) | ||
Il existe enfin dans ces boites métalliques des formes pharmaceutiques diverses : cachets, tablettes, comprimés, Grains…Les deux premières boites ci-dessous sont issues des Laboratoires Métadier. On trouve également l’Uroformine de GOBEY, les grains de Dr Blondin, des Laboratoires Plagnol, etc. Deux boites présentées ici sont issues du même laboratoire : la Cooper (COOPERATION PHARMACEUTIQUE FRANCAISE),Société pharmaceutique de Melun dirigée à l’époque par A. Salmon, docteur en pharmacie. |
|||
|
|
||
Cachets Kalmine (Laboratoires Métadier) | Cachets Kalmine (Laboratoires Métadier) | ||
|
|
||
Grains laxatifs MIRATON (eaux naturelles de Chatel-Guyon) | Gargarisme LUCHON (Laboratoires SAUBA) | ||
|
|
||
Tablettes de Vermifuge BERGER | Comprimés d’Uroformine GOBEY | ||
|
|
||
Grains du Dr BLONDIN (laxatifs, dépuratifs, toniques) |
Tablettes digestives MARGA | ||
On peut trouver toutes sortes de noms de fantaisies, plus attirants les uns que les autres : « La Pastille du Roi Soleil », « Rhinette, la poudre merveilleuse », etc. | |||
|
|
||
Pastilles du Roi Soleil contre la toux(Pharmacien M. FOURMY) | Poudre merveilleuse Rhinette (Pharmacien G. Lecouvey) | ||
La plupart de ces boites métalliques sont très colorées mais ce n’est pas une règle générale comme on peut le voir sur ces deux exemples
|
|||
|
|
||
Endocrisines FOURNIER (Glandes fraiches, Laboratoires Fournier Frères) | Savon dentifrice GIBBS (Paris) | ||
Enfin, certaines marques sont plus connues que d’autres. Ainsi les pastilles issues de Vichy sont assez populaires. Les quelques exemples montrés ici reflètent le fait que plusieurs laboratoires pharmaceutiques ont émis domicile autour de Vichy. Parmi ceux-ci, on trouve les Laboratoires Médico-Pharmacologiques , fondés en 1908 par Pointet (dont le nom apparaît sur la boite) et Edmond Lauriat, tous deux pharmaciens. Les Fructines furent produites jusqu’au début des années 200 par le Laboratoire DB Pharma.1 Parmi les autres marques célèbres, on trouve bien sûr les pastilles Pulmoll, Valda, Lajaunie et ses cachous, ou encore Belloc et son charbon. pour ce qui concerne Valda, on sait que ce nom n’est pas celui de l’inventeur de ces célèbres pastilles qui furent créées par Henri-Edmond Cannone né en 1867 à Saint-Amand-les-Eaux. Dans une période où la mode est à l’eucalyptus, il invente ces pastilles qui permettent un dégagement des bronches et dépose la marque (dont l’origine reste controversée) en 1900. Lajaunie, quant à lui, pharmacien, invente ses cachous dans les années 1880. |
|||
|
|
||
Bonbons laxatifs (Laboratoire Médico-pharmacologique de VICHY) | |||
Cachou Lajaunie (Pharmacien à Toulouse) | |||
|
|||
Pastilles du Dr Belloc (Laboratoire VAILLANT -DERESNE-TORCHON) | Pastilles PULMOLL (Laboratoires J. LAFARGE) | ||
Certaines boites métalliques sont, plus rarement, sous forme de tubes plus ou moins larges. L’Uraseptine Rogier était produite par les Laboratoires Millot à Amiens et était censée assurer une « antisepsie vésico-rénale ». Le Sulfoïdol Robin était vendu par les Laboratoires Robin dont le pharmacien était H. Burth. Ces granulés à base de soufre était destinés à combattre les troubles de la nutrition mais aussi les rhumatismes. Quant aux cachets de Curatine Brunet, ils étaient « contre toutes les douleurs » !
|
|||
|
|
||
Uraseptine ROGIER et Sulfoïdol ROBIN | Nivaquine (SPECIA) et Curatine (Laboratoire de la Curatine BRUNET) | ||
Conclusion : Les boites métalliques de médicaments dont nous voyons ici quelques exemples nous permettent de découvrir une autre facette de l’histoire de la pharmacie et du médicament. Si cette façon de présenter les produits étaient parfois justifiée par le besoin de les protéger de l’humidité et des chocs, les boites étaient souvent l’occasion de présenter le médicament dans un écrin coloré, et de le mettre en valeur. Quasiment toutes les formes galéniques, y compris les injectables, ont bénéficiées de cette présentation et les collectionneurs sont ravis de trouver quelques boites rares qui ont entre temps servies de boites à clous ou de boites à trombones ! ou encore de réceptacles pour recueillir les timbres.
|
|||
Références:
1. Cécile Raynal & Thierry Lefebvre. Vichy et ses alentours : pôle pharmaceutique historique. Revue d’Histoire de la Pharmacie, 2008, n°359, 56 : 360-362. |