Les vins médicinaux*(Extrait de la conférence duDocteur C. Charlot**)
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Voir aussi l’exposition sur les vins médicinaux et le vin Mariani | ||
Dans une étude synoptique de l’histoire des pharmacopées et de l’origine des vins utilisés en pharmacie, on peut suivre l’évolution du Commerce de cette boisson. En 23 avant J.C., Pline nous apprend que trois vins sont célèbres dont celui de Palerme. Et comme la notoriété des vins passe par les médecins, on comprend mieux pourquoi l’on se réfère à celui de Salerme, ville réputée par son Ecole de Médecine, antérieure à celle de Montpellier mais qui disparue au début du 19° siècle. Montpellier qui draina les courants judéo-arabes et gréco-romains permis, grâce à des érudits comme Arnaud de Villeneuve, de faire connaître les enseignements d’Hippocrate, Dioscoride, Avicenne, Galien. Laurent Joubert, dans sa Pharmacopea Seu Monspelliensis (1579) parle des vins salerniens des anciens : « qu’il soit de couleur rouge et doux au commencement comme le ferait la vieille Malvoisie ou vieux Muscat ». Dans l’Antiquité, on trouve des vins aromatiques à visée thérapeutique comme vinum salvatium préparés par macération ou fermentation de plantes fraîches. Jusqu’au XIIIe siècle, les seuls vins liquoreux sont ceux de l’Orient grec : Malvoisie, Crète, Chypre. La médecine médiévale considérait les vins comme l’un des principaux breuvages curatifs, préférant les vins blancs. La première définition des vins médicinaux apparaît dans la Pharmacopée Universelle de Nicolas Lemery (1716) où l’on utilise des drogues médicinales. Le mot drogue étant pris dans le sens général que lui donnait les Anciens, et appartenant aux trois règnes. On trouvait des vins aussi curieux que le vin de cloportes pour jeter la pierre et la gravelle, le vin de poule contre les coups de tête, le vinum chalybeatum, martiatum ou stibiatum, vins qui disparaissent du Codex de 1937. Les plus nombreux sont ceux obtenus avec des drogues végétales dont le vinum Enulatum que l’on retrouve dans la Pharmacopée Seu Parisiensis (1732) : « On affirme qu’une telle boisson est utile aux malades hernieux. Elle pousse à l’oubli de toute colère et douleur, elle réjouit le cœur ». *** Des drogues, on est passé aux substances médicamenteuses à partir de plante ou partie de plante à l’état desséché. Le choix des vins se fait en fonction du degré d’alcool, de la nature de la substance à dissoudre, par dissolution ou macération à froid. Le vin de quinquina officinal (tonique, amer, fébrifuge) figure parmi les derniers vins cités dans le Codex de 1965. Quant au vin d’opium ou Laudanum liquide de Sydenham il deviendra la teinture d’opium safranée. Le terme « vin » a donc disparu pour cette formulation à base de stupéfiant. Au XIXeme siècle, en application des directives du Codex 1818, les vins seront choisis parmi les produits locaux (Bordeaux, Chablis, Lunel, Frontignan, Banyuls…). Après un essor considérable de formulations spécifiques réalisées par les pharmaciens (Vin Mariani par exemple), ces vins médicinaux ne sont plus cités dans la 10ème édition de la Pharmacopée française. Il ne reste plus en vente que les vins de le Cooper du Laboratoire Bourdou installé à Frontignan. Que des vins on soit passé aux oenolés puis à l’utilisation des teintures peuvent faire regretter ces anciennes formulations à base de vin dont les propriétés s’ajoutent à celles des substances qui y sont dissoutes. Mais comme c’est la dose qui fait le poison, nous citerons le sage Androcyde s’adressant à Alexandre le Grand qui était intempérant : « Prince, toutes les fois que vous aurez envie de boire du vin, souvenez vous que vous allez boire le sang de la terre et que si la ciguë est un poison pour l’homme, le vin est un poison qui tue la ciguë » (Pline, 5-14) * On peut citer parmi les vins médicinaux : le Vin Désiles, l’Elixir Houdé, le Vin de Moride, le Vin ferrugineux Aroud, le Vin de peptone de Chapoteaut, le Vin Bravais, le Vin Mariani, le Vin Toni-nutritif de Bugeaud, le Vin de Kola Monavon, le Vin Robin, le Vin Ecalle, etc. ** Extrait de la conférence donnée à Bordeaux pour le SFDP (8-9 mai 1992) par le Docteur C. Charlot *** Medicina Salernitana. Nova Editio Jacobus Stoer M. D. XCIX |
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