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Rodolphe Engel

Rodolphe Engel (1850-1916)

Le professeur Rodolphe Engel, fils d’un botaniste strasbourgeois réputé, avait été reçu successivement docteur en médecine, docteur ès sciences physiques, agrégés des Facultés de Médecine, pharmacien, puis pharmacien supérieur.

En 1889, il était nommé professeur de chimie analytique à l’Ecole centrale et fit paraître de nombreux mémoires de chimie pure ou appliquée, ainsi que plusieurs ouvrages de chimie médicale. En 1887, il avait été élu correspondant de l’Académie de Médecine et en 1901, président de la Société Chimique. 

Source : René Weitz. Les grands pharmaciens du XIXe siècle, Paris, 1931

Voir biographie plus complète par P. Labrude ci-dessous

Bibliographie (BNF)

Traité élémentaire de chimie,… par R. Engel,… à l’usage des candidats au baccalauréat ès sciences et au baccalauréat moderne, au certificat d’études physiques, chimiques et naturelles, à l’École centrale des arts et manufactures et aux écoles du gouvernement… (1895)
Nouveaux éléments de chimie médicale et de chimie biologique, avec les applications à l’hygiène, à la médecine légale et à la pharmacie, par R. Engel,… (1892)
Traité d’analyse chimique de R. D. Silva,… publié par M. R. Engel,… [Préface, par M. Ch. Friedel,…] (1891) avec Rodolphe Engel (1850-1916) comme Éditeur scientifique
Mort du professeur Moitessier (1889)
Notice sur les titres et travaux de M. R. Engel,… (1889)
Nouveaux éléments de chimie médicale et de chimie biologique (1888)
Etude sur les carbonates neutres de magnésie. R. Engel (1885)
Rapport sur la création de centres universitaires, présenté à la Faculté de médecine de Montpellier, par une commission composée de MM. Cavalier,… Grasset et Engel, rapporteur (1884)
Nouveaux éléments de chimie médicale et de chimie biologique, avec les applications à l’hygiène, à la médecine légale et à la pharmacie, par R. Engel,… (1883)
Nouveaux éléments de chimie médicale et de chimie biologique, avec les applications à l’hygiène, à la médecine légale et à la pharmacie, par R. Engel,… (1878)
Grades et titres scientifiques du Dr R. Engel (1877)
La série grasse et la série aromatique (1876)
La Série grasse et la série aromatique. Comparaison des deux séries. R. Engel (1876)
Contributions à l’étude des glycocolles et de leurs dérivés, par M. R. Engel (1875)
Des métaux dans le corps humain et spécialement de leur extraction par l’électricité. (Cand. Rodolphe Engel) (1873)

Biographie plus complète publiée par Pierre Labrude sur le site http://www.professeurs-medecine-nancy.fr/Menu.htm

Rodolphe Engel (1850-1916)

un éphémère agrégé de chimie médicale promis à une carrière professorale éminente

PIERRE LABRUDE

Le professeur Rodolphe Charles Engel est aujourd’hui à peu près complètement oublié à la Faculté de médecine de Nancy où, en quelques années, de 1871 à 1877, il a effectué un parcours brillant qui l’a conduit à quitter rapidement la Lorraine pour le Languedoc et Montpellier. Il est le fils du professeur Louis-Charles Engel, qui avait été agrégé de la Faculté de médecine de Strasbourg, et qui était devenu en 1872 le titulaire de la chaire de botanique et histoire naturelle médicale de la faculté transférée à Nancy. Louis-Charles Engel est lui-même mal connu en raison de son décès intervenu le 16 février 1880, donc quelques années seulement après son arrivée dans notre ville. Il était certainement très fier de l’exceptionnelle réussite de son fils. Ces quelques pages sont l’occasion de corriger diverses erreurs et imprécisions qui se sont propagées depuis le décès du professeur Rodolphe Engel, survenu en 1916 en région parisienne, au sujet des années qu’il a passées à Nancy entre 1871 et 1877. Il faut toutefois reconnaître que la guerre de 1870, qui a perturbé les scolarités, complique les recherches sur celles-ci.

La naissance, les premières années et les études supérieures

Rodolphe Engel naît à Fegersheim, près de Strasbourg, le 20 avril 1850. Son père y exerce alors la médecine. Avant d’être étudiant à Nancy, il effectue à Strasbourg un parcours remarquable. Bachelier ès-lettres le 12 août 1867 et bachelier ès-sciences le 26 juillet 1868, il devient étudiant à la Faculté de médecine de Strasbourg qui lui décerne une médaille d’argent dès l’année universitaire 1868-1869. Il y est en même temps aide de chimie et de physique. Il a également pris quatre inscriptions à la Faculté des sciences en vue de la licence.

Au cours de la guerre de 1870 où il s’est engagé dans l’armée, il se trouve prisonnier après la reddition de Strasbourg. Mais il s’évade d’Allemagne. Il est très vraisemblable qu’il rentre à Strasbourg à la faveur de l’armistice de janvier 1871 et qu’il y reprend ses études de médecine, voire de sciences. Des enseignements médicaux ont recommencé en novembre 1870 et l’Ecole libre de médecine ouvre ses portes le 1 er novembre 1871. Sa fermeture intervient le 30 septembre 1872, donc après seulement une année scolaire, en raison de la création de l’université impériale dans le Reichsland . Cependant, les enseignements qu’elle a dispensés, les examens qu’elle a fait subir et les thèses qu’elle a fait soutenir sont validés par la France à titre individuel pour ses élèves. Rodolphe Engel reprend ses études supérieures à Nancy dès 1871 puisqu’il est reçu aux examens de la licence ès-sciences physiques avec la mention « assez bien » le 22 novembre 1871. Il est le seul candidat. Le certificat d’aptitude délivré par la Faculté ne mentionne que ses inscriptions à Strasbourg et le résultat des examens, ce qui me semble indiquer qu’il n’a pas suivi d’enseignements à Nancy.

Il est cependant légitime de penser qu’il n’est arrivé définitivement, vraisemblablement avec ses parents et sa soeur, que peu de temps avant l’inauguration de la Faculté de médecine transférée de Strasbourg par le décret du 1 er octobre 1872. L’installation de celle-ci a lieu le 15 novembre, la cérémonie de rentrée des facultés au cours de laquelle se déroule l’inauguration de la Faculté de médecine se tient le 19, et le début des enseignements intervient le lendemain 20.

Tout ceci permet à Rodolphe de mener rapidement à leur terme ses études de médecine tout en exerçant des fonctions d’enseignement à la Faculté, le doyen le proposant le 6 novembre pour l’emploi de préparateur de chimie. Il est vraisemblable qu’il a terminé, ou presque terminé, ses études de médecine et qu’il n’a plus que sa thèse à soutenir. En effet, compte tenu de la date de celle-ci, en février 1873, il n’a pu être inscrit à la Faculté de Nancy que pendant deux trimestres. Il soutient la première thèse de la nouvelle faculté, ayant choisi un sujet issu d’un cas auquel il avait été confronté à la clinique du professeur Schützenberger à Strasbourg en février 1872 : un homme de 43 ans complètement enduit de céruse (carbonate basique de plomb, appelé aussi « blanc de céruse » et « blanc d’argent », alors employé en peinture) et de minium (oxyde de plomb de couleur rouge qui, délayé dans de l’huile, fournit une peinture qui est utilisée pour préserver le fer de l’oxydation communément appelée rouille) en raison de son activité professionnelle, et dont la couche cutanée de ces sels toxiques est si épaisse qu’elle ne s’enlève pas au couteau ! Il est suggéré à Engel d’essayer de la dissoudre par électrolyse dans une baignoire… L’homme meurt avant qu’Engel ait pu réaliser des essais, mais il fait de ce cas le sujet de sa thèse de doctorat en médecine soutenue à Nancy le 8 février 1873 : « Des métaux dans le corps humain et spécialement de leur extraction par l’électricité » (Berger-Levrault, Nancy, 1873, 52 pages en comptant celle des douze questions proposées par le jury). Le jury est composé des professeurs Rameaux (physique et hygiène), président, Beaunis (physiologie), Ritter (professeur adjoint, chimie médicale et toxicologie) et Schlagdenhauffen (agrégé de physique, chimie et toxicologie, en exercice, et, en même temps, professeur de physique et de toxicologie à l’Ecole supérieure de pharmacie). Cette composition apparaît judicieuse compte tenu du sujet, mais aussi des titres et de la fonction du candidat : ancien aide de chimie et de physique à la Faculté de Strasbourg, préparateur de chimie médicale et de toxicologie à la Faculté, licencié ès-sciences physiques. Reçu docteur avec la mention « bien satisfait », il n’a que vingt-trois ans, et un tel résultat est remarquable en raison des perturbations liées à la guerre, même si les études sont plus courtes et plus simples qu’actuellement. En dehors d’être la première thèse de médecine soutenue à Nancy dans la nouvelle faculté, c’est aussi la seule de l’année 1873.

Deux ans plus tard, le 13 novembre 1875, Rodolphe Engel soutient à Paris sa thèse de doctorat ès-sciences physiques intitulée « Contribution à l’étude des glycocolles et de leurs dérivés » (Berger-Levrault, Nancy, 1875, 47 pages d’une part, et J.-B. Baillière et fils, Paris, 1875, d’autre part). Le jury est constitué des professeurs Janin, Troost et Wurtz (respectivement professeurs de chimie à la Sorbonne pour les deux premiers, et à la Faculté de médecine pour le troisième). Rodolphe Engel est donc un chimiste et il va le rester.

Dans ce cursus, il manque le diplôme de pharmacien qui fait classiquement partie, à l’époque, d’une sorte de triptyque chez beaucoup de professeurs de médecine et de pharmacie. Rodolphe Engel ne manque pas de l’obtenir, mais, contrairement à ce qu’on lit habituellement, ce n’est pas au cours de ses années nancéiennes mais bien plus tard, et pas de la manière habituelle ! Il avait entrepris à Nancy des études de pharmacie et il s’était inscrit à l’Ecole supérieure pendant le dernier trimestre en 1872 et le premier de 1873 mais il avait alors abandonné, étant sans doute trop occupé par ailleurs… Comment et où avait-il effectué le stage officinal préalable dont la durée est normalement de trois années. L’avait-il effectué à Strasbourg en même temps que d’autres études ? Je n’ai pas pu le savoir car je n’en ai pas trouvé de trace dans les archives de l’Ecole jusqu’à présent.

Etant maintenant titulaire de la chaire de « chimie médicale et pharmacie » à la Faculté de médecine de Montpellier, il ressent le besoin de compléter sa formation, plutôt ses titres me semble-t-il, par le diplôme de pharmacien et donc de terminer ses études. Il sollicite des dispenses puisqu’une décision ministérielle du 4 novembre 1885 adressée au recteur de Nancy, dont le courrier est conservé aux Archives départementales, le dispense du stage et de la scolarité, mais sans rien préciser des examens nécessaires, ce qui signifie qu’il doit se soumettre à ce que décidera l’établissement où il va se présenter. Dans sa requête, Rodolphe Engel a certainement indiqué au ministre qu’il désirait subir à Nancy, où il avait commencé ses études, les examens que l’Ecole supérieure de pharmacie jugerait appropriés, et ses thèses comme nous allons le voir. Les professeurs décident de ne le soumettre qu’aux trois examens de fins d’études auxquels il est brillamment reçu les 16, 17 et 21 novembre 1885. Il a décidé de remplacer la seconde partie du troisième examen par une thèse, comme cela est prévu par les règlements, et il soutient celle-ci ce même 21 novembre. Le jury est composé des trois professeurs compétents en chimie de l’Ecole supérieure, Jacquemin (chimie inorganique, organique et des corps organisés), Schlagdenhauffen (physique et toxicologie) et Held (agrégé, chargé du cours, pharmacie chimique), et le travail, expérimental, s’intitule « Sur la combinaison du carbonate de magnésie avec le bicarbonate de potasse » (Gauthier-Villars, Paris, 1885, 31 pages).

Rodolphe Engel ne se contente pas du « simple » diplôme de pharmacien de 1 e classe. Trois jours plus tard, le 24, il soutient la thèse donnant accès au grade de pharmacien supérieur de première classe, qui est un doctorat d’Etat qui n’en porte pas le nom parce que le ministère n’a pas voulu créer un doctorat d’Etat en pharmacie ! Le jury est le même et le sujet assez voisin du précédent : « Etude sur les carbonates neutres de magnésie » (Berger-Levrault, Nancy, 1885, 32 pages). Les certificats correspondants sont transmis par le directeur de l’Ecole au recteur en vue de l’établissement des diplômes le 16 décembre. Dans la notice qu’Haller a consacré à son compatriote Engel – dont la carrière est voisine de la sienne et qui partage avec lui son origine alsacienne, son intérêt pour la chimie et ses diplômes de pharmacien et de docteur ès sciences -, il note le grand intérêt des travaux ayant donné lieu à ces deux thèses, qui n’étaient donc pas rédigées simplement pour la circonstance.

Le préparateur et l’agrégé de chimie médicale

Engel est nommé préparateur – on dirait assistant aujourd’hui – de chimie (et de toxicologie) le 15 novembre 1872, jour de l’installation de la Faculté de médecine à Nancy. Le registre des nominations indique qu’il le reste jusqu’au 24 janvier 1877, bien qu’il soit alors agrégé. En effet, le 16 novembre 1875, lors de la séance solennelle de rentrée des facultés, le doyen de la Faculté indique dans son rapport qu’à ce moment deux Nancéiens prennent part aux épreuves du concours d’agrégation. Engel se présente dans la section de physique et chimie médicales. C’est le premier concours organisé depuis la guerre de 1870 et les épreuves ont lieu à la Faculté de médecine de Paris. Sa thèse d’agrégation porte sur la comparaison entre la série grasse et la série aromatique (« La série grasse et la série aromatique : comparaison de deux séries », Parent, Paris, 1876, 112 pages in quarto ) et il en tire un ouvrage qui paraît chez Baillière avec le même titre et le même nombre de pages.

Il est reçu premier dans la section et il est nommé agrégé stagiaire pour la chimie médicale et la pharmacologie, dans la chaire du professeur Blondlot et du professeur adjoint Ritter, à compter du 13 mars 1876. Un arrêté ministériel fixe sa prise d’activité au 1 er avril. Quelques semaines plus tard, un autre arrêté, celui-ci daté du 16 mai, le nomme suppléant du professeur Blondlot à compter du 1 er jour de ce mois de mai. Il est ensuite chargé de cette suppléance pour le premier trimestre de l’année 1876-1877. Blondlot meurt le 7 janvier 1877. A ce moment, Engel s’apprête à quitter Nancy. Le registre des nominations indique que ses fonctions d’agrégé y prennent fin le 24 janvier. C’est Ritter qui succède à Blondlot, ce qui apparaît normal, mais la chaire change d’intitulé et devient « Chimie biologique et pathologique ». Elle est donc moins chimique, plus biologique et surtout plus médicale.

Engel quitte Nancy parce qu’il est nommé professeur à Montpellier. En effet, par un décret en date du 11 janvier 1877, il succède à Antoine Béchamp (1) dans la chaire de chimie médicale et pharmacie de la Faculté de médecine. Au moment de son accession à une chaire dans cette prestigieuse faculté, Engel n’a pas encore vingt-sept ans… Le Congrès des sociétés savantes lui décerne une médaille en récompense de ses travaux de chimie. Engel restera douze années à Montpellier avant de rejoindre en 1889 l’Ecole centrale des arts et manufactures à Paris où il occupera la charge de cours puis la chaire de chimie analytique jusqu’à sa mort survenue en 1916. Il est inhumé au cimetière de Préville à Nancy où la tombe est encore dans un état très correct en 2019.

Les recherches et les publications effectuées à Nancy

 Pendant ses années nancéiennes, Rodolphe Engel présente nombre de communications dans les deux sociétés savantes locales, la Société de médecine et surtout la Société des sciences dans laquelle il est très actif. Celle-ci est en effet chère au coeur des ex- Strasbourgeois puisque c’est l’ancienne Société des sciences de Strasbourg et qu’elle est « arrivée » en même temps qu’eux à Nancy. Il y est admis en qualité de membre titulaire avec le 29 e rang le 5 mai 1873 et il en est élu secrétaire annuel pour 1875 le 28 décembre 1874. Il présente surtout des communications aux séances de 1874 et 1875, étant ensuite absorbé par autre chose : la préparation du concours d’agrégation puis sans doute celle de ses cours et la rédaction d’un ouvrage de chimie médicale. En effet, il est chargé des premiers enseignements de pharmacologie à la Faculté et il est sûr que l’absence de précédent rend la tâche à la fois plus facile puisqu’il est libre de ses choix, mais aussi plus difficile car il ne peut pas s’appuyer sur ceux de son prédécesseur.

Le bulletin de la société fait état de ses travaux et en présente un résumé, voire un texte assez court. J’ai ainsi noté : « L’hydrure d’arsenic » le 1 er décembre 1873, « Sur un nouveau caractère chimique de la créatine » le 4 mai 1874, « Nouveau ferment de la gomme » le 30 novembre 1874, « Remarques sur l’acide cyanhydrique médicinal et sur le meilleur mode de préparation de ce médicament » où il est associé à Gault (2) et Ritter, le 28 décembre 1874, et où il met à profit la communication pour présenter l’acide cyanhydrique anhydre préparé par Blondlot selon le procédé Gay-Lussac, « Sur la cristallisation du phosphore » avec Blondlot le 18 janvier 1875, « Histoire des produits d’addition du cyanamide » le 15 février 1875, « Sur les caractéristiques du glycocolle » le 26 avril 1875, et « Substitution du mercure et de l’argent à l’hydrogène de la cyanamide » (3) le 7 juin 1875. Le texte de sa thèse de doctorat ès-sciences « Contribution à l’étude des glycocolles et de leurs dérivés » paraît dans le bulletin de la société en 1875 (p. 55-96). De plus, le 6 juillet 1874, il a présenté un chalumeau imaginé par Dupré (4) , puis l’analyse de l’air d’une mine de fer de Maxéville réalisée par Poincaré (5) . Les comptes rendus de l’université indiquent la publication de dix notes et revues au cours de l’année 1873-1874, et de douze, en comptant sa thèse de doctorat ès sciences et sa thèse d’agrégation, pour 1875-1876. Après son départ de Nancy, Engel est nommé correspondant national de la société en 1878.

C’est en 1876 que paraît chez Baillière à Paris son premier ouvrage, consacré à la chimie organique, issu comme déjà indiqué de sa thèse d’agrégation. On peut sans prendre un grand risque écrire que son second ouvrage : « Nouveaux éléments de chimie médicale et de chimie biologique, avec les applications à l’hygiène, à la médecine légale et à la pharmacie », paru chez le même éditeur Baillière en 1878 et en 768 pages, a certainement été partiellement rédigé à Nancy. Une seconde édition paraît en 1883 et une troisième en 1888.

Rodolphe Engel est moins présent à la Société de médecine dont les activités sont plus éloignées des siennes que celles de la Société des sciences . J’ai cependant trouvé plusieurs notes présentées en 1874 : « Sur un mode de production de l’iodure d’éthyle » dans les Mémoires de la Société de médecine de Nancy, puis : « Le croton chloral » ( Revue médicale de l’Est, 1 er juillet), « Revue des travaux de chimie médicale » ( id., 1 er juin et 15 septembre) et « Sur des réactions de quelques substances azotées de l’organisme » ( id., 1 er septembre). Il fait aussi lire plusieurs notes à l’ Académie des sciences et leur texte paraît dans ses Comptes rendus : « Note sur la purification de l’acide chlorhydrique » (5 mai 1873), « Sur l’hydrure d’arsenic solide » (29 décembre 1873), « Sur des combinaisons nouvelles de la créatine avec les oxydes métalliques, et sur deux réactions caractéristiques de cette substance » (15 juin 1874), « Sur la production d’acide oxamique par l’oxydation du glycocolle » (octobre 1874) et « Sur les caractères du glycocolle » (avril 1875).

Sa dernière année de présence à Nancy, est « consacrée » à la Société chimique (de Paris) dont le Bulletin publie les comptes rendus des séances et un court texte des communications présentées. Il s’y trouve des notes d’Engel dont les titres varient selon les sources et qui sont donc assez délicates à classer. Je cite celles du Bulletin de la Société : « Sur la substitution du mercure à l’hydrogène de la créatine », « Sur la taurine », « Dérivés métalliques de la cyanamide et de la dicyanamide » (deux notes), « Sur la densité de la leucine » et « Cristallisation du phosphore ». Enfin, plusieurs notes paraissent dans le Journal de pharmacie et de chimie. En 1873, « Seconde note sur le même sujet » (la purification de l’acide chlorhydrique) paraît être un travail original. Par contre, en 1874 et 1875, il s’agit essentiellement de la reprise d’études publiées dans les journaux cités précédemment comme : « Recherche sur l’hydrure d’arsenic, Sur la créatine, Sur le croton chloral » ou « Revue des travaux de chimie publiés à l’étranger », ensuite « Substitution du mercure…, Caractéristiques du glycocolle, Recherche sur la taurine ». Je n’ai plus rien trouvé dans les années qui suivent. Les mêmes sujets se retrouvent donc à plusieurs reprises comme cela se fait à l’époque en raison des aléas de la transmission de la bibliographie, mais cette pratique conduit à la multiplication des publications.

Conclusion

  Au terme de ce bref parcours, il apparaît que Rodolphe Engel a été un chimiste beaucoup plus qu’un médecin dès le début de sa carrière, et même dès le commencement de ses études supérieures. En effet, son oeuvre scientifique est essentiellement consacrée à la chimie, et il a présidé la Société chimique de Paris – future Société chimique de France – en 1901. Il ne semble pas avoir exercé d’activité de clinique ni de laboratoire. S’il a été médecin, c’est sans doute surtout parce que son père l’était. Il ne faut cependant pas ignorer ses travaux de chimie médicale, voire de pharmacie. Au cours de sa carrière à Montpellier puis à Paris, il a fait honneur aux deux villes et aux deux universités où il a été formé, Strasbourg et Nancy.

Notes

1. Né à Bassing en Moselle en 1816 et décédé en 1908, Pierre Jacques Antoine Béchamp est pharmacien diplômé de Bucarest et de Strasbourg, docteur en médecine et docteur ès sciences. Après avoir été agrégé puis professeur adjoint de toxicologie et de physique à l’Ecole de pharmacie de Strasbourg, il a été professeur à Montpellier, ville qu’il a quittée pour devenir professeur et doyen de la Faculté libre de médecine et de pharmacie de Lille. Il est connu pour ses travaux de chimie pharmaceutique et de biologie, et pour ses démêlés avec Pasteur.

2. Achille Gault est pharmacien à Nancy, à l’angle de la rue Stanislas et de la rue des Michottes, en face de l’actuelle bibliothèque publique. Venu de Munster en Alsace après l’Annexion, il a été l’un des premiers maîtres de l’illustre chimiste Albin Haller. A Nancy, celui-ci a travaillé dans sa pharmacie tout en suivant les enseignements de pharmacie et de sciences à l’université. Achille Gault est le père du professeur de chimie Henri Gault qui a commencé sa carrière à Nancy avant de devenir professeur à l’université de Strasbourg en 1919.

3. Cyanamide est un mot masculin, mais Engel l’emploie aussi au féminin.

4. C’est peut-être Louis Victoire Athanase Dupré (1808-1869), mathématicien et physicien, spécialiste de thermodynamique.

5. Il s’agit d’Emile Poincaré (1828-1892), professeur adjoint de physiologie, qui vient d’être chargé du cours d’hygiène dont il obtiendra la chaire en 1879.

  Sources documentaires

– Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, dossier W 1018-94/1 (dispense de scolarité pharmaceutique).

– Bulletin de la Société des sciences de Nancy, bibliothèque universitaire du campus scientifique de l’université de Lorraine, boulevard des Aiguillettes, Vandoeuvre-les-Nancy, consulté de 1874 à 1877 (il n’y a pas de publications en dehors des années indiquées).

– Bulletin de la Société chimique de Paris, bibliothèque universitaire du campus scientifique de l’université de Lorraine, boulevard des Aiguillettes, Vandoeuvre-les-Nancy, consulté de 1874 à 1877 ( idem ).

– Comptes rendus de l’Académie des sciences, bibliothèque universitaire du campus scientifique de l’université de Lorraine, boulevard des Aiguillettes, Vandoeuvre-les-Nancy, consulté de 1873 à 1877.

– Comptes rendus des travaux de la Société de médecine de Nancy et Mémoires de la Société de médecine de Nancy, bibliothèque universitaire du campus santé de l’université de Lorraine, Brabois, Vandoeuvre-les-Nancy, consulté de 1872 à 1877.

– Documents relatifs à Rodolphe Engel disponibles aux Archives départementales du Bas-Rhin, Strasbourg.

– « Engel Rodolphe », Nouveau dictionnaire de biographie alsacienne, vol. 2, s.d., p. 802.

– « Engel Louis », ibidem.

– Engel R., Grades et titres scientifiques du Dr R. Engel, Nancy, Berger-Levrault, 1877, 7 p., in octavo , consultables sur le site de la BNF.

– Fiche d’élève de Rodolphe Engel à l’Ecole supérieure de pharmacie de Nancy, archives de la Faculté de pharmacie, campus santé de Brabois, Vandoeuvre-les-Nancy.

– Haller A., « Notice sur M. Rodolphe Engel », Bulletin de la Société chimique de France, 1916, vol. 19, n°1, p. I-VIII.

– Héran J., « L’Ecole de médecine autonome de Strasbourg (1870-1872) : du réalisme à l’utopie », Histoire des sciences médicales, 2000, n°2, p. 127-132.

– Labrude P., « Le Professeur Nicolas Blondlot, un illustre Carpinien oublié dans sa ville natale », dans Charmes et la Moyenne Moselle , actes des 16 e Journées d’études vosgiennes, Charmes, 24-26 octobre 2014, textes réunis par J.-P. Rothiot et J.-P. Husson, Fédération des sociétés savantes des Vosges, 2015, p. 215-223.

– Legras B., Les professeurs de la Faculté de médecine de Nancy 1872-2010 Ceux qui nous ont quittés, Euryuniverse Editions, sans lieu, 2010, 549 p., passim .

– Lestel L., « R. Engel, 1850-1916 », dans Itinéraires de chimistes 1857-2007 150 ans de chimie en France avec les présidents de la Société française de chimie, sous la direction de L. Lestel, EDP Sciences, Les Ulis/Société française de chimie, Paris, 2007, 582 p., ici p. 187-191.

– Le Tourneur S., « Engel Rodolphe », Dictionnaire de biographie française, 1968, vol. 12, col. 1291, n°10.

– Marchal M., Catalogue des thèses soutenues devant la Faculté de pharmacie de Nancy de 1873 à 1943 , Imprimerie G. Thomas, Nancy, 1944, 43 p., ici p. 8.

– Monod C., « Décès de M. Engel, correspondant national », Bulletin de l’Académie de Médecine, 1916, vol. 75, n°3, p. 51-53.

– Registres de l’Ecole préparatoire de médecine et de pharmacie et de la Faculté de médecine de Nancy, qui étaient conservés par le musée de la Faculté de médecine de Nancy et qui ont été versés aux Archives départementales de Meurthe-et-Moselle en 2017 : registre du personnel, coté 7835, avec des éléments sur Louis-Charles et Rodolphe Engel.

– Université de Nancy, rapport annuel du conseil de l’université et compte rendu des facultés et école, édition annuelle paraissant l’année qui suit, exploitée entre 1872 (année de création de la Faculté de médecine de Nancy) et 1877.

L’auteur exprime ses respectueux remerciements à M. le Doyen Mantz, doyen honoraire de la Faculté de médecine de Strasbourg, et à M. le Professeur Cussenot, directeur honoraire d’UFR et membre de l’Institut Jean Lamour de la Faculté des sciences et des techniques de Nancy, pour leur aide amicale et la fourniture de documents sur la carrière du Professeur Rodolphe Engel.

 

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