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Les spécialités pharmaceutiques : une existence fragile au début du XXe siècle (2)

Remèdes secrets et spécialités :

Copies et médicaments similaires dans les formulaires (1904-1933)

Nous avons vu dans une première exposition une série de spécialités copiées par deux formulaires au début du XXe siècle, dans le but de permettre aux pharmaciens d’officine de proposer à leurs patients des produits équivalents : le formulaire de Cerbelaud en 1920 et celui des Pharmaciens Français (FPF) en 1933 (et parfois celui de 1904). Cette liste n’est pas exhaustive mais ne mentionne que les produits suffisamment importants à cette époque pour être présents dans les deux formulaires. Cet encouragement à préparer des « génériques » avant l’heure montre la difficulté que l’on avait à proposer des équivalents dès lors qu’on ne connaissait pas la formule officielle des spécialités concernées. Voici la suite des produits que nous avons identifiés dans les deux formulaires :

15°) La Migrainine Paquignon

 

 

Elle apparait en 1904 comme en 1933 dans le formulaire des pharmaciens français sous le terme « Migrainine », commercialisée par Bélières. La formule est la suivante : Antipyrine pulvérisée, 9 g., Caféine, 0.9 g., Acide citrique pulvérisé, 0.45 g., le tout sous forme de cachet. On trouve quasiment la même formule chez Cerbelaud sous la dénomination « poudre d’antipyrine et de caféine », mais le produit est présenté en « paquets ». Aucune indication n’est précisée. Le Laboratoire Bélières est bien mentionné dans le Vial de 1932, mais pas le produit. Son indication se trouve par ailleurs sur les publicités de l’époque : « remède souverain et unique pour la guérison instantanée des migraines. »

 

16°) La Minéraline Baud

Buvard publicitaire Mauchant. Années 1960

C’est Mauchant qui commercialise ce produit, selon le FPF et le Vidal. Il est composé de Talc, 80 g., Acide borique, 10 g., et Oxyde de zinc, 10g. dans le FPF (« poudre antiseptique minérale »). La formule est un peu différente dans le formulaire Cerbelaud : Acide borique porphyrisé, 200 g., Talc de Venise extra-blanc, 1800 g., Extrait d’héliotrope, 20 g. Seul ce dernier donne les indications :   » Contre les rougeurs, l’érythème, l’urticaire, le feu du visage, le prurigo, l’eczéma, l’impétigo, les démangeaisons, l’intertrigo des enfants gras, l’acné, la gourme, etc. »

 

Mauchant poursuivra la commercialisation encore longtemps comme en témoigne la publicité sous forme de buvard qu’on trouve encore dans les années 1960. La formule du Vidal 1960 est très vague : « Minéraline du Dr Baud au Bithionol ». les indications sont alors : « Traitement des affections cutanées et des irritations de la peau : Eczema, intertrigo, impétigo, prurits, dermatoses tropicales. 

 

 

Publicité vers 1887

17°) Les Pastilles Géraudel.

 

On disait de Géraudel qu’il était le roi de la réclame ! Géraudel et ses pastilles sont  devenues célèbres grâce aux efforts de publicité considérables réalisés dès 1887. Car la concurrence ne manquait pas : les produits à base de goudron végétal et de façon plus générale les produits pour traiter les affections broncho-pulmonaires étaient légions. De nombreux supports publicitaires seront utilisés par Géraudel pour recommander ses fameuses pastilles : les affiches, la presse bien sûr sera un des support important, comme le Journal Illustré qui publie en novembre 1887 (n°47) un feuillet pleine page pour une publicité ayant pour slogan « Si vous toussez, ne prenez que les Pastilles Géraudel », slogan sans doute peu original mais qui sera repris à de multiples occasions (sous la forme aussi de « Si vous toussez, prenez les Pastilles Géraudel »).

Publicité vers 1887

Le Courrier Français Illustré, hebdomadaire plus spécialement orienté vers la littérature, les beaux arts, le théâtre, fondé par Jules Roques, donne à Géraudel une large audience. Ses dessinateurs Cheret et Willette apporteront leur talent à la gloire du produit. Enfin, il faut citer l’Illustration qui sera également sollicité comme support de la publicité Géraudel.

Les équivalents de ces pastilles apparaissent sous le titre de « pastilles de goudron composées » dans le FPF et dans le formulaire Cerbelaud. la composition y est  différente dans les deux formulaires, l’une d’elle contenant de l’opium et de la codéine, l’autre pas ! (tableau ci-dessous) :

 

FPF 1933

Pastilles de Goudron composées

Formulaire Cerbelaud 1920

Pastilles de Goudron composées

  • Digesté de Tolu , 40 gr.
  • Eau de Laurier-cerise, 20 gr.
  • Goudron pulvérulent, 20 gr.
  • Codéine, 1 gr.
  • Extrait d’opium, un gramme
  • Suc de réglisse pur, 15 gr.
  • Gomme adragante pulvérisée, 5 gr.
  • Sucre pulvérisé, 480 gr.
  • Digesté de tolu… 50 gr.
  • Suc de réglisse pur 5 gr.
  • Gomme adragante 5 gr.
  • Sucre glace (ou sucre en poudre très fine), 25 gr.
  • Goudron de Norvège 10 gr.
  • Racine d’iris finement pulvérisée, 5 gr.
  • Sucre glace 475 gr


Affiche Pétrole Hahn, 1899

La formule du FPF est en fait très proche de celle que donne Cerbelaud pour les Pastilles Poncelet, également très célèbres. Aucune des deux pastilles ne sont au Dictionnaire Vidal. D’après le Dorvault 1945, l’entreprise Géraudel vend, en plus de ses célèbres pastilles, quelques spécialités supplémentaires : Allepha-quina, Jécol et le Sirop pectoral Géraudel à l’Ephédrine.

 

18°) Le Pétrole Hahn.

C’est en 1885 que le pharmacien genevois, Charles Hahn, ajoute cette spécialité à ses autres inventions.

Publicité Pétrole Hahn, Dessin de Benjamin Rabier

En 1893, François Vibert obtient l’exclusivité de l’exploitation du Pétrole Hahn pour la France et ses colonies. La formule, qui reste secrète, contient alcool éthylique à 35°, pétrole et huiles d’Hespéridées.

Là encore les formules de remplacement du Pétrole Hahn diffèrent sensiblement entre les deux formulaires. Le produit du FPF est l’essence dite de pétrole pour la chevelure, sous la marque Vibert, avec la composition suivante : Essence de bergamote, 6 g., Benzine rectifiée, 6 g., Teinture de jaborandi, 15 g., Alcool à 90°, 15 g., Eau distillée, Q.S pour 150 ml. La formule de Cerbelaud a pour nom « Pétrole inflammable » avec  : essence de bergamote, 20 ml, alcool à 90°, 80 ml, Eau distillée, 110 ml. On voit bien dans ce deuxième cas que cette formule ne contient pas de pétrole ou de ses dérivés. Le produit n’apparait pas dans le Vidal de l’époque. 

 

 

19°) Le Phosphate Vital Jacquemaire.

 

Bon point Jacquemaire. Publicité pour le Phosphate vital

En 1881, Jacquemaire fonde le laboratoire qui porta son nom et découvre un procédé simple pour conserver les solutions phosphatées à l’abri des altérations et met en œuvre à partir de 1886 une conservation des solutions de phosphates de chaux en utilisant le gaz carbonique sous pression. Mais Jacquemaire va franchir une nouvelle étape industrielle avec les glycérophosphates. A partir de 1893, et plus encore de 1894 où les glycérophosphates de sa production ont été testé avec succès par le Dr Robin à l’hôpital de la Charité (Lyon), Jacquemaire va décliner ce principe actif dans plusieurs spécialités et différentes formes galéniques :

  • Phosphate Vital de Chaux, solutions gazeuses, injectable ou granulés, contre les maladies des enfants, la tuberculose, et pour les convalescents.
  • Phosphate Vital pour la Neurasthénie.
  • Phosphate Vital de fer pour l’anémie et la chlorose. 
  • Phosphate Vital composé pour la convalescence.
  • Bon point Jacquemaire. Publicité pour le Phosphate vital

    Phosphate Vital de quinine pour les fièvres.      

  • Solutions de Cacodylo-Phosphate Vital contre toutes les formes graves de l’épuisement, etc.

La publicité pour le Phosphate Vital est particulièrement abondante et insiste sur les avantages du produit chez l’adulte et chez l’enfant. Ceci donnera l’idée à la Société Jacquemaire dans son journal de réécrire l’histoire d’enfants célèbres : Marguerite de Valois (la Reine Margot) à 5 ans6, ou encore Louis XVII : « ce n’est pas seulement l’air, le mouvement, le jeu qui lui ont manqué dans sa prison : ce sont surtout les phosphates, car le Phosphate Vital l’eut sauvé. Et il n’est pas douteux que M. L. Jacquemaire, s’il eut vécu en ce temps là, n’eut largement approvisionné le petit martyr du Temple

« House-organ » de Jacquemaire en 1907, avec mention du Phosphate vital

 

Bon point Jacquemaire. Publicité pour le Phosphate Vital

Les deux formulaires, le FPF et celui de Cerbelaud, donne la formule sous le nom de Solution de glycérophosphate de calcium. Dans les deux cas, il s’agit de glycérophosphate de calcium et d’eau gazeuse (eau de Seltz artificielle). Cerbelaud ajoute des détails sur la préparation: « Faire dissoudre à froid le glycérophosphate de chaux dans la moitié de l’eau gazeuse. Filtrer au papier et compléter le volume avec Q. S. d’eau gazeuse, diviser rapidement en flacons ronds, en verre épais, munis de fermetures à pression (dits flacons canettes)… Il sera bon de préparer l’eau de seltz destinée à la solution avec de l’eau distillée : on pourra employer le petit appareil de Briet ou les appareils dits « Sparklets » ».

Bon point Jacquemaire. Publicité pour le Phosphate Vital

Le Vidal de 1932 ne donne pas la formule précise du produit mais donne ses indications : « Double action reconstituante : 1°) action reminéralisatrice par l’apport du phosphate uni aux bases qui lui sont normalement associées dans l’organisme, sous la forme même, directement assimilable, adoptée par celui-ci ; 2°) puissante action stimulante sur la nutrition, par l’intermédiaire du système nerveux et de tout le système glandulaire. » 

 

20) La Phosphatine Falières.

 

Bon point Phosphatine Falières

 

Phosphatine Falières. Menu

Le laboratoire Chassaing est surtout connu pour la Phosphatine Falières. Le pharmacien Emile Falières montre aux XIXe siècle l’importance des phosphates dans l’alimentation. C’est lui qui sera à l’origine de la Phosphatine Falières dont l’histoire ne retiendra sans doute que les magnifiques publicités qui furent publiées. Au début du XXe siècle, c’est la Maison Chassaing qui récupère le produit et en fait la promotion. C’est à Asnières que, dès 1866, M. Eugène Chassaing établit la maison dont il resta le directeur jusqu’en 1912. Les deux formulaires donne une formule équivalent sous le nom de « farine nutritive » pour le FPF, et de « Farine à la Fécule de Pomme de terre » pour Cerbelaud. Mais les formules sont très différentes (tableau ci-dessous). Le produit n’est pas dans le Vidal.

 

FPF

Farine nutritive

Formulaire Cerbelaud

Farine à la Fécule de Pomme de terre

  • Sucre pulvérisé, 456 gr.
  • Cacao, 126 gr.
  • Phosphate bicalcique, 20 gr.
  • Farine de maïs, 125 gr.
  • Farine d’orge, 125 gr.
  • Farine d’avoine, 125 gr.
  • Vanilline, 3 gr.
  • Vanille extra-fine 5 gr.
  • Sucre glace (ou sucre en poudre impalpable).. 500 gr.
  • Cacao terré Caraque, torréfié et pulvérisé…. 100 gr.
  • Fécule de manioc 20 gr.
  • Fécule de pomme de terre 300 gr.
  • Farine de froment 75 gr.
  • Phosphate tricalcique 3 gr.

 

Publicité Phosphatine Falières. Carte postale

 

21) La Poudre Clery (Laboratoires Dumesny)

Buvard. Publicité pour la Poudre Clery

Cette poudre anti-asthmatique fait partie des nombreux produits proposés à l’époque pour traiter l’asthme : poudre Estouffaire, Poudre Espic, poudre Exibard, Asthmylose (Laboratoire Taetz), Antiasthme Bengalais (Laboratoires Fagard), Antiasthmatique Domergue, Anti-Asthmine Dehaussy, Antasthme Cibrand, Poudre et Cigarettes Zani (G. de Saint-Steban), etc. Ce produit n’est pas au Vidal de 1932, mais l’équivalent de sa formule est donnée dans nos deux formulaires.

Publicité pour la poudre Clery, 1898

Cerbelaud donne une explication sur l’ensemble des poudres asthmatiques :  »  Les poudres antiasthmatiques et toutes les poudres fumigènes contiennent de 4 à 25 p. 100 d’azotate de potasse, et doivent être conservées dans un endroit sec. On obtient encore de très bons résultats, en faisant une solution concentrée de nitrate de potasse qu’on verse sur les plantes, et on les dessèche ensuite à l’étuve. On évitera l’emploi du chlorate qui peut donner des explosions ; en outre, si les poudres anti-asthmatiques à base de chlorate brûlent bien, elles ont l’inconvénient de répandre des vapeurs irritantes qui, loin de calmer les crises des asthmatiques, semblent les aggraver. La base de ces poudres est généralement la belladone et le datura additionnés parfois de phellandrie, de digitale, de lobélie, d’eucalyptus, de benjoin, d’opium, de chanvre indien, de camphre, etc. Toutes ces poudres ayant à peu près les mêmes composants, nous donnerons simplement deux formules de préparations différentes et pouvant répondre à tous les desiderata cherchés. Quelques rares formules spécialisées renferment du menthol qui semble favoriser la respiration chez les asthmatiques ; à la condition d’employer de très faibles doses, bien entendu, sans quoi ce composé irrite les bronches. »

 

FPF

Poudre antiasthmatique

Formulaire Cerbelaud

Poudre antiasthmatique par fumigation

Formulaire Cerbelaud

Poudre antiasthmatique au menthol

  • Feuilles de belladone
  • Feuilles de dature
  • Feuilles de digitale
  • Feuilles de jusquiame
  • Feuille d’hysope

ââ cent cinquante grammes

  • Teinture de benjoin, 100 g.
  • Nitrate de potassium, 100 g.
  • Extrait d’opium, trois g.
  • Eau distillée de laurier-cerise, 120 g.
  • Feuilles de belladone grossièrement pulvér., 600 gr.
  • Feuilles de datura grossièrement pulvér.,  300 gr.
  • Feuilles de digitale grossièrement pulvér. 55 gr.
  • Poudre d’opium de Smyrne, 5 gr.
  • Teinture de benjoin de Sumatra à 1 /5, 100 gr.
  • Nitrate de potasse pulvérisé, 40 gr.
  • Eau distillée de laurier-cerise, 75 gr.
  • Eau distillée., 75 gr
  • Menthol cristallisé,  1 gr.
  • Poudre de cascarille, 10 gr.
  • Poudre de benjoin, 20 gr.
  • Poudre d’opium, 20 gr.
  • Nitrate de potasse finement pulvér. 200 gr.
  • Poudre de belladone, 380 gr.
  • Poudre de datura, 350 gr.
  • Poudre de lobélie, 20 gr.

 

Cerbelaud ajoute : « Ces deux poudres donnent d’excellents résultats et pourront remplacer la plupart des poudres antiasthmatiques spécialisées.

Publicité dans le Journal de Cette, 1890

Doses et mode d’emploi : Prendre environ la valeur d’une cuillerée à café de poudre, verser sur une pelle à feu ou sur un cendrier, mais jamais sur des objets en porcelaine qui peuvent se briser et faire brûler le malade.

Publicité, Le Nouveau Cettois, 1878

Disposer cette poudre en forme de petit cône et mettre le feu au sommet ; le malade n’aura qu’à respirer la fumée qui s’en dégage. Dans le cas de crises aiguës et dangereuses, on pourra recouvrir la poudre enflammée avec un cornet de papier ouvert aux deux extrémités, pour faire pénétrer rapidement une grande quantité de vapeurs dans les bronches. Nota. Ces poudres antiasthmatiques doivent leurs propriétés à leurs principes aromatiques, à l’acide benzoïque, qui sont volatilisés par la combustion, et à la pyridine qui se forme ». A noter que l’ouvrage de Gardette (1908) décrit la poudre Clery comme étant « à base de suc de pin maritime, du fruit de la Kasmych d’Egypte et de sels minéraux », ce qui semble assez éloigné des autres formules !

 

22) La Poudre Exibard

 

Publicité pour la poudre d’Abyssinie Exibard (Carte postale)

Une autre poudre anti-asthmatique mérite d’être mentionnée dans les deux formulaires, c’est la poudre Exibard. Les auteurs donnent comme formule de remplacement les mêmes formules que pour la poudre Clery ci-dessus. Elle apparait déjà dans le Dictionnaire médical et thérapeutique des spécialités pharmaceutiques et médicale du Dr Carmouche en 1885. On peut y lire, sous le terme poudre d’Abyssinie d’Exibard  :

Publicité pour la poudre d’Abyssinie Exibard (Carte postale)

« Cette préparation est une modification du carton antiasthmatique du Codex. Un grand nombre de médecins ont remarqué que le papier dégage en brûlant une huile empyreumatique âcre qui a le grand inconvénient d’irriter les muqueuses du nez et des yeux. C’est dans le but d’éviter ce désagrément que l’auteur de cette préparation a supprimé la pâte de carton , en y laissant subsister les sédatifs, les narcotiques, les balsamiques et les sels devant fournir de l’oxygène à la respiration, il en résulte que la poudre brûle lentement ; que sa fumée très douce à respirer ne fatigue pas le malade, et qu’elle soulage immédiatement dans les accès d’asthme, et dans toutes les autres formes de dyspnée. »

 

Publicité pour la poudre du Dr Dubois

23) La Poudre Dubois (Poudre alcalino-phosphatée, laboratoires Poumailloux)

On trouve cette poudre dans les deux formulaires avec des formules proches à base de Phosphate tricalcique, Carbonate de magnésium et de bi-carbonate de sodium. Aucune indication n’est précisée, mais elle existe sur les publicités : « pour éteindre les brûlures d’estomacs ». Mais on sait très peu de chose sur ce produit et sur le laboratoire !

Publicité pour la poudre du Dr Dubois

 

 

 

 

 

 

24) La Poudre de Pistoia (Planche).

Cette poudre anti-goutteuse n’est pas dans le Vidal 1932 mais apparait bien dans les deux formulaires (FPF et Cerbelaud). Il s’agissait d’une poudre contenant de la colchique dont la formule est assez proche pour les deux ouvrages :

 

Publicité pour la poudre de Pistoia Planche

Selon Cerbelaud :  « Poudre de bulbes de colchique 20 gr., Poudre de racine de bryone 10 gr., Poudre de bétoine (sommités) 50 gr., Poudre de gentiane (racine) 10 gr., Poudre de camomille romaine 10 gr., Carbonate de lithine 2 gr. » La formule du FPF ne contient pas de carbonate de lithine. C’est d’ailleurs ce qu’explique Cerbelaud : « Ce remède secret est employé contre la goutte à la dose de 2 grammes par jour, à prendre soit dans un peu d’eau, soit dans du pain azyme. Lorsqu’on le transforme en comprimés de 0 gr. 25, on donnera donc 4 comprimés le matin à jeun et 4 le soir. Certaines formules ne renferment pas de carbonate de lithine.

 

 

D’après Chastaing, la formule de la véritable Poudre de Pistoïa correspondait à : Bulbes de colchique 20 gr., Racine de bryone 10 gr., Bétoine pulvérisée 50 gr., Gentiane pulvérisée 10 gr., Camomille romaine, 10 gr. »

 

Carte postale publicitaire pour le Sirop Famel.

25) Le Sirop Famel.

Ce sirop est décrit dans le Vidal de 1932 mais sans une formule précise. On comprend qu’il contient du lactocréosote soluble, de la codéine, de l’aconit et qu’il est indiqué pour la toux. Nos deux formulaires en donne des formules légèrement différentes (tableau ci-dessous) :

FPF

Sirop de lacto-créosote phosphaté composé

Formulaire Cerbelaud

Créosoté phosphaté

  • Créosote de hêtre, 2 gr.
  • Acide lactique officinal, 20 gr.
  • Eau distillée, 50 gr.
  • Phosphate monocalcique crist., 15 gr.
  • Chlorhydrate de cocaïne, vingt cg.
  • Codéine, vingt-cinq cg.
  • Alcool à 90°, 15 gr.
  • Teinture de racine d’aconit, cinq gr.
  • Teinture d’essence de citron, 10 gr.
  • Sirop de Tolu
  • Sirop simple, ââ P.S. p. 1000 cmc
  • Lactophosphate de chaux mielleux 25 gr.
  • Chlorhydrate de cocaïne 0 gr. 07
  • Codéine (base).. 0 gr. 35
  • Créosote de hêtre, redistillée 5 gr.
  • Alcoolature de racine d’aconit 2 gr.
  • Alcoolature de citron 20 gr.
  • Alcool à 60° 10 gr.
  • Sirop simple………… Q. S. pour Un litre

 

Sur Famel, on peut lire l’article de Louis Patard publié dans la RHP en 2010 et dont voici quelques extraits : Né en 1855, Pierre Famel s’installe comme pharmacien d’officine au 86 rue de la Réunion (XXe arrondissement), le 1er septembre 1886. Pierre Famel crée ensuite, en 1912, les laboratoires Famel sous le nom «Famel – Sirop Famel » au 20-22, puis 16-22 rue des Orteaux, à Paris XXe arrondissement, sur le trottoir face à la pharmacie. Ce n’est que plus tard qu’ils prendront le nom «Laboratoires P. Famel » . Il créa des laboratoires et des représentations à Barcelone, Milan, Genève, Prague, Lisbonne, Buenos Aires, Rio de Janeiro, Cuba, Montréal, Vienne, etc. Pierre Famel assurait lui-même la direction scientifique, technique et commerciale de son laboratoire. Il était aidé en cela par trois chimistes et trente employés ou ouvrières. La Maison faisait plus de la moitié de son chiffre d’affaires avec l’Étranger. La production par les laboratoires des produits spécialisés suivants : Sirop Famel, Vin glycophosphaté Langlebert, Sulfogène Famel, s’élevait, en 1915-1916, à 1 220 000 unités fabriquées. Le sirop Famel représenta la spécialité pharmaceutique française la plus répandue à l’Étranger où elle était connue sous le nom de Béatin. Il fut adopté par le corps médical du monde entier. Il fut commercialisé jusqu’en 1977 par les laboratoires Famel, et de 1978 à 1997 par Etris SA RL. Il est ensuite retiré du marché en 1997.

 

 

 

26) Le Sirop Roche (Laboratoire Hoffmann-La Roche)

Buvard publicitaire Roche

Bien que le sirop Roche soit inscrit au Vidal de 1932, sa formule n’y est pas décrite précisément. on sait seulement qu’il contient du Thiocol (Une cuillère à soupe = 1 gramme de Thiocol « Roche », peut-on lire). Les formulaires (FPF et Cerbelaud) en donne une formule beaucoup plus précise. Le FPF attribue ce produit à Weiss sous la dénomination de Sirop de sulfogaïacolate de potassium : « Sulfo-gaïacolate de potassium, 50 gr., Eau distillée, 50 gr., Sirop d’écorce d’orange amère, 860 gr. ». C’est à peu près la même formule chez Cerbelaud, avec en plus du caramel. Vanté dans le Vidal comme « antiseptique pulmonaire, phagocytogène, eupeptique et orexique », ses indications sont les suivantes : »Toutes les affections broncho-pulmonaires : tuberculose, bronchites aiguës et chroniques. Grippe. Pneumonie. Coqueluche. Scrofule. Anémie. Rachitisme. Dyspepsies. Entérites. Diarrhées, etc. »

 

Publicité pour le sirop VIAL

27) Le Sirop Vial (Laboratoire Chapelle).

Le sirop Vial fait également parti des médicaments qui méritaient d’être copiés, et les deux formulaires ont proposé des formules équivalentes : Le FPF, sous le nom de sirop phéniqué, et le formulaire Cerbelaud, sous le nom de « Sirop d’Acide phénique pur » en donne des formules différentes (Tableau joint)

FPF

Sirop phéniqué

Formulaire Cerbelaud

Sirop d’acide phénique pur

  • Acide phénique synthétique, 5 gr.
  • Glycérine pure, 5 gr.
  • Chlorhydrate de morphine, vingt-cing centigr.
  • Sirop simple, 990 gr.

On peut colorer en rose avec quelques gouttes de solution alcoolique de carmin (Sirop de Vial)

  • Acide phénique redistillé à + 180° 2 gr.
  • Alcool à 90°, 40 gr.
  • Teinture de cochenille au dixième, 10 gr.
  • Solution de sulfo fuchsine, sans arsenic, à 1%, 2 gr.
  • Sirop simple . Q. S. pour un litre

Les indications ne sont indiquées que sur les publicités.

 

28) La solution des Frères Maristes.(Arsac)

Les Frères maristes ont lancé, en 1867 à Saint-Paul-Trois-Châteaux, la production du Biphosphate de Chaux (produit sans alcool créé par Frère Amable, Michel Casimir Girard), connu plus tard en Allemagne sous le nom de « Boisson Mariste ». A partir de 1873, c’est le pharmacien Louis Arsac de Montélimar se charge de la vente et plus tard de la production de ce produit qui serait encore disponible dans certaines pharmacies. Il est fabriqué à partir d‘os calcinés d‘animaux. Les résidus sont moulus, mélangés à d‘autres ingrédients puis filtrés. Les formulaires de Cerbelaud et des Pharmaciens français ont cherché à copier ce médicament qui a eu un tel succès qu’il fallait en proposer un « générique ». Le FPF donne comme formule, sous la dénomination de « Solution de phosphate monocalcique » ; Phosphate bicalcique pur, 20 g., Acide Phosphorique officinal, 22.80 g., Eau distillée, Q?S? pour 1 litre. La formule de Cerbelaud donne la même formule mais propose une alternative :   Biphosphate de chaux ou phosphate monocalcique pur 67 gr., Glycérine neutre à 30%, 100 gr., Eau distillée Q. S. pour Un litre. Pour ce dernier, cette formule pouvait remplacer non seulement la solution des Frères Maristes, mais aussi la Solution Odet au biphosphate de chaux et la Solution de Henri Mûre au biphosphate de chaux. La concurrence était rude !

 

29) La Solution Pautauberge (Solution de chlorhydrophosphate de calcium créosoté DUCROUX, selon le FPF).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cette solution, du Laboratoire Pautauberge dont on connait peu de choses, a eu droit de beaucoup de publicité, surtout sous forme de carte postale. Créé à Paris en 1887, le Laboratoire Pautauberge portait le nom de son créateur et de l’inventeur de la solution Pautauberge. Le Laboratoire s’installe en 1905 à Courbevoie. Selon le Vidal de 1932, ce produit est composé de créosote pure de hêtre, 0.10 g. et de chlorhydro-phosphate de chaux, 0.5 g., par cuillerée à potage. Ses indications étaient « toutes les affections broncho-pulmonaires : bronchite chronique,. Toux, Grippe, Prétuberculose, Tuberculose, Coqueluche. » Les formules de nos deux ouvrages qui visent à copier le produit original sont un peu différentes (tableau ci-dessous)

 

FPF

Solution de phosphate de calcium créosotée

Formulaire Cerbelaud

Solution de Chlorhydrophosphate de Chaux
créosotée

  • Créosoté de hêtre pure, 5 gr.
  • Glycérine pure à 30°, 75 gr.
  • Phosphate bicalcique, 20 gr.
  • Acide phosphorique officinal Q.S environ 22.8 gr.
  • Eau distillée Q.S. pour 1000 cmc
  • Créosote de hêtre pure, à 20 p. 100 gaïacol, 7 gr.
  • Teinture de Panama (ou mieux de salsepareille), 2 gr.
  • Alcool rectifié à 90°, 100 gr.
  • Chlorhydrophosphate de chaux pur., 34 gr.
  • Eau distillée. Q. S.
  • pour Un litre.

 

 

 

 

30) Le Vin Aroud (Ferré).

Le Formulaire de Cerbelaud précise à propos des vins médicinaux : « Sans exiger des Vins toutes les qualités énumérées par l’Ecole de Salerne, ces derniers doivent avant tout offrir une odeur agréable, une saveur franche et être toujours identiques. Leur conservation et leur limpidité seront également recherchées. »

L’Illustration, 27 février 1900

Le vin Aroud était le « vin de quinquina et cacao phosphaté à la viande » dans le FPF. Dans son édition de 1904, on y trouve effectivement, on trouve ce vin sous le nom de vin Cribier toni-nutritif une composition contenant de l’extrait de viande. Voici la formule complète de l’édition de 1933 : « Phosphate monocalcique, 20 gr., Eau distillée, 20 gr., Extrait de viande, 15 gr., Vin de quinquina et cacao Q.S. p 1000 cmc », avec, pour indications : « convalescence tuberculose, épuisement, inappétence, anémie, grossesse, allaitement. » Quant à l’ouvrage de Cerbelaud, le vin Aroud simple ne contient que du vin de Quinquina. Comme nous allons le voir, beaucoup d’autres vins fortifiant existait à cette époque sur le marché. 

 

31) le Vin Bugeaud.

Contrairement au FPF qui attribut ce vin à Besins, le Vidal de 1932 associe ce produit au Laboratoires Lebeault, de Paris. On trouve dans ce dernier ouvrage la composition, assez vague, du vin de Bugeaud : « Malaga vieux, quinquina, cacao » avec pour indications : « Faiblesse générale, Anémie, Surmenage, Etats consomptifs, Diabète, Convalescence des maladies aiguës, anémie palustre, etc. Dans le FPF de 1933, la formule du vin de quinquina et cacao est la suivante : Quinquina gris concassé, 10 g., Cacao caraque pulvérisé, 20 g., Vin de Malaga Q.S. pour 1 litre. Cette formule est légèrement différente chez Cerbelaud : « Quinquina rouge en poudre grossière, 25 gr., Acide chlorhydrique dilué au dixième.. (Deux gr.) 2 gr., Vin de Malaga noir Q. S. pour Un litre. »

 

32) le Vin de Chassaing :

 

On peut lire dans notre Revue en 1929 : « C’est à Asnières que, dès 1866, M. Eugène Chassaing établit la maison dont il resta le directeur jusqu’en 1912. A cette date, sous la raison sociale G. Prunier et Cie, M.G. Prunier en devint le gérant. MM. Chassaing de Borredon, docteur en médecine, chevalier de Légion d’honneur, et Le Coq, pharmacien de 1° classe, docteur en droit, lui succédèrent. Spécialisée dans la fabrication des produits physiologiques, la maison Chassaing est connue encore pour la Phosphatines Falières, la Poudre laxative du Dr Souligoux, les Produits phéniqués du Dr Déclat, le Sirop Coclyse et le Vin de Chassaing« .

On trouve ce vin de Chassaing dans le FPF sous le nom de Vin de pepsine et diastase, avec la formule suivante : Pepsine (Codex), 20 g., Diastase (Codex), 10 g., Vin de Malaga blanc Q.S. pour 1 litre. La formule de l’ouvarge de Cerbelaud est plus complète : « Pepsine extractive. en paillettes 10 gr., Diastase extractive liquide à 50 p. 100 5 gr., Vin de Malaga noir 200 cmc., Vin de Samos ou Muscat, 700 cmc., Alcool à 90°. 100 cmc. » Ce médicament n’apparait pas au Vidal de 1932.

 

Publicité pour le vin Girard, 1925.

33) Le vin Girard.

Le formulaire des pharmaciens français le présente comme le vin iodotannique phosphaté. Il y avait de nombreux vins iodotanniques comme le montre le Formulaire Cerbelaud : le vin Nourry, le vin Cerbelaud et surtout la formule du Codex. Mais les formules étaient assez variables comme le montre le tableau ci-dessous.Dans le Vidal de 1932, le laboratoire A. Girard déclare : « le Vin Girard est la meilleure formule des préparations iodo-tanniques phosphatées consacrées par l’usage. Un verre à madère de Vin Girard contient : iode, 0.075 mgr., Tannin, 0.50 cg., Lactophosphate de chaux, 0.75 gr. » Les indications proposées étaient « Lymphatisme, scrofule, tuberculose au 1er degré, engorgements ganglionnaires, convalescences. » Quant au Vin Nourry, il apparait au Vidal 1932 « dosé à 5 centigr. d’iode et 10 centigr. de tanin par cuillerée à soupe de 15 gr. » Ses indications thérapeutiques sont nettement plus nombreuses ! : 1°) lymphatisme dans toutes ses manifestations osseuses et ganglionnaires, 2°) voies respiratoires : asthme, emphysème, bronchites chroniques, 3°) gynécologie : Formation des jeunes filles, Ménopause, Aménorrhée, Dysménorrhée, 4°) Convalescences, intoxications chroniques, Anorexie, 5°) Artériosclérose : Athéromes, Anévrisme de l’aorte, Angine de poitrine, 6°) Affections thyroïdiennes, 7°) Syphilis tertiaire. »

 

FPF Vin iodotannique phosphaté Formulaire Cerbelaud

Formule du Codex

Formulaire Cerbelaud

Formule de Cerbelaud

Formulaire Cerbelaud

Analogue au Vin  Girard

Formulaire Cerbelaud

Analogue au Vin Nourry

  • Phosphate monocalcique 20 gr.
  • Teinture d’iode, 30 gr.
  • Tanin pur, 2 gr.
  • Sirop simple, 100 gr.
  • Vin de Banyuls Q.S. pour 1 litre
  • Iode. (Deux grammes) 2 gr.
  • Tanin :…………. 2 gr.
  • Alcool à90° 20 gr.
  • Sirop simple 100 gr.
  • Phosphaté monocalcique officinal 20 gr.
  • Vin de Malaga, 856 gr
  • Iode pulvérisé : .(Deux grammes) 2 gr.
  • Extrait mou de châtaignier, 10 gr.
  • Eau distillée 20 gr.
  • Samos vieux 100 gr.
  • Vin de Banyuls 950 gr.
  • Teinture d’écorce d’orange amère 20 gr
  • Tanin à l’éther, 5 gr.
  • Eau distillée… 10.gr.
  • Sirop simple . 50 gr.
  • Teinture d’iode du Codex (Dix grammes) 10 gr.
  • Vin de Grenache doré Q. S. pour Un litre
  • Tanin à l’éther, 5 gr.
  • Eau distillée… 10.gr.
  • Sirop simple . 50 gr.
  • Teinture d’iode du Codex (Dix grammes) 10 gr.
  • Vin de Banyuls rouge Q. S. pour Un litre

 

 

 35) le Vin Séguin.

Publicité 1867. Gazette médicale de l’Algérie

Ce dernier produit de notre série n’est pas décrit dans le Vidal de 1932. Il apparait bien, en revanche dans nos deux formulaires sous le nom de Vin fébrifuge pour le FPF et de Vin tonique et fébrifuge pour le formulaire Cerbelaud. Il eut la vie dure puisque ses ventes par Gilbert Seguin, pharmacien, ont débuté au début du XIXe siècle (en 1812 exactement). On trouve en 1814 une brochure de l’auteur intitulé « Instruction sur l’usage du Vin de Seguin et la manière de s’en servir ».

Publicité 1869. La France Médicale

Ce vin fébrifuge était composé, d’après le FPF, de Quinquina calisaya sauvage, 100 g., Ecorce d’angusture vraie, 10 g., Alcool à 60°, 100 g., Acide tartrique, 2 g., Vin de Madère Q.S. pour 1 litre. Ce n’est pas tout à fait la formule de Cerbelaud :  »  Teinture de quinquina Calisaya sauvage 150 cmc., Teinture d’angusture vraie (Galipea cusparia), 25 cmc., Alcool à 90° 25 cmc., Vin blanc sec 300 cmc., Vin de Xérès 500 cmc. »

Ce ne sont bien sûr que quelques uns des médicaments « génériques » contenus dans ces deux formulaires mais se sont les seuls qui se trouvent dans les deux, marquant l’importance de ces produits pour l’époque. Dans le volumineux ouvrage de Cerbelaud de 1588 pages, on trouve par exemple l’Essence Algérienne, le Goménol, le Fer Bravais Robin, les Granulés Kola Astier, etc.

 

 

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