Histoire de l’usage des plantes médicinales (4)
Les Plantes indigènes
(Voir à la fin de l’exposition la définition des termes médicaux au XVIIIe siècle)
Nous poursuivons notre exploration de l’histoire des plantes médicinales !
Ail : Comme le rapporte Guitard dans la RHP en 1937, l’histoire de l’ail est beaucoup plus riche de traditions qu’on ne le soupçonne en général. Cette plante a été longtemps considérée comme un des éléments principaux de la matière médicale; les Egyptiens, les Hindous la préconisaient comme remède. Les Grecs et les Romains en faisaient un usage abondant.
On pourrait tirer de l’œuvre d’Hippocrate tout un petit traité de l’ail, en mettant bout à bout les recettes où il l’utilise. Il le recommande particulièrement dans les affections des yeux, dans celles de la poitrine et contre les maladies utérines et lui reconnaît, entre autres, une action diurétique. Galien s’étend longuement sur les applications thérapeutiques de l’ail. C’est à lui que l’ail doit son surnom de thériaque du paysan, expression à double signification, le consacrant à la fois comme aliment principal, reconstituant et fortifiant du laboureur et comme antidote puissant contre les morsures de serpent.
En effet, l’antiquité attribuait à l’ail mâché ou appliqué en frictions, la faculté de neutraliser l’action des venins. Pline étend la vertu thériacale de l’ail aux morsures de toutes les bêtes venimeuses ou enragées, et même aux mauvais effets des plantes toxiques. La médecine du Moyen Age et de la Renaissance s’en tient à la tradition classique; c’est ainsi qu’Ambroise Paré faisait de l’ail le bezahar des champignons vénéneux. L’ail a été estimé de tous temps pour un remède qui, selon la pudique expression d’A. du Pinet, traduisant Pline, rend l’homme plus gentil compagnon envers les dames. Pourtant si, à ce point de vue, les médecins recommandent l’usage de la plante, les poètes le déconseillent, et l’on devine que cette opposition tient à la mauvaise odeur que l’ail communique à l’haleine. Au XVIe siècle, Ambroise Paré et Paracelse faisaient de l’ail le spécifique de la peste. Les médecins de Salerne préconisaient l’ail comme antidotes aux venins. Au XVIIIe siècle, Geoffroy considère l’ail comme alexipharmaque, stomacal, apéritif, et extérieurement, résolutif. Quant à Lémery à la même époque, il écrit que « l’ail excite l’urine, pousse la pierre du rein et de la vessie après l’avoir brisée. A l’extérieur, il est bon aussi pour consumer les cors des pieds étant écrasé et appliqué dessus ». Voici une des recettes de Fournier (1755) contenant de l’ail : « Potion contre la rage : Recette : Feuilles de rhue, marguerite, sauge, une pincée de chaque; racine d’Eglantier, de Scorzomère, une once de chaque, coupée par ruelle, cinq ou six gousses d’ail.Piler le tout ensemble avec une poignée de gros sel. Prenez la moitié de ce marc et l’appliquer sur les plaies qui auront été bien nettoyées avec un morceau de fer ou un couteau que l’on jettera après, ensuite étuvez la plaie avec du vin et de l’eau tiède dans lequel on aura fait fondre une pincée de gros sel. Si la plaie est profonde, il est à propos de faire couler le suc du marc dedans et bien bander la plaie. Sur le restant du marc, on y mêlera une once de vin blanc. Le bien mêler, en exprimer le suc, et le faire boire au malade et lui rincer la bouche. Il faut ne rien prendre six heures avant et trois heures après. Le continuer pendant neuf jours. Pour les enfants, on en donne demi verre, et il est quelque fois nécessaire de faire une incision cruciale à la plaie quand elle est profonde pour la mieux nettoyer. «
Amandier doux : L’amandier a été mentionné par les écrivains de l’antiquité et est mentionné dans le Bible comme venant de Palestine. Théophraste et Dioscoride le mentionnent mais Caton le connaissait peu et donne aux amandes le nom de noix grecques. En France, les amandes sont citées, avec d’autres épices, dès l’année 716, dans une charte délivrée par le roi Chilpéric II, au monastère de Corbie, en Normandie. En 812, Charlemagne ordonna d’introduire les amandiers dans les fermes impériales ; la consommation des amandes dans la cuisine étant énorme au Moyen-Age. Elles étaient alors importées de Grèce. En dehors de cette culture de l’arbre, qui s’est propagée ensuite en Italie, les amandes constituaient un important objet de commerce, au commencement du 14° siècle, entre Venise et Alexandrie (L. Girre, 1981). Geoffroy (1765) précise qu’on tire par expression l’huile d’amandes douces. « Cette huile est très adoucissante, pectorale, laxative. On peut trouver l’huile d’amandes douces dans de nombreuses recettes de Maître Fournier en 1755 comme celle-ci : « Potion pour la toux : Recette : Sirop d’althéa, huile d’amande douce, un demi-posson de chaque; blanc de baleine dissous, 1 dragme ; on en prend une ou deux cuillerées toutes les deux heures. »
Anis : Son histoire semble commencer avec celle de l’homme. Il est, en tout cas, fort employé par les Egyptiens dans un but exclusivement thérapeutique, notamment pour soigner des cardiopathies. Les Sémites l’auraient utilisé en outre dans des rites sacrés — double usage médical et religieux que l’on trouve en Chine et aux Indes avec la badiane.
Chez les Grecs — et à leur suite chez les Romains — l’anis occupe une place de choix dans la matière médicale. Pythagore ne tarit pas d’éloges sur ses vertus. Théophraste, Dioscoride, Pline, etc., en parlent aussi. D’autre part, Oribase cite parmi les boissons usuelles de son temps un vin à l’anis.
Comme les autres « épices », l’anis donne lieu des siècles durant à un commerce d’autant plus actif qu’on l’emploie autant et même plus comme assaisonnement, en boisson et en parfumerie que comme médicament. Quant à la badiane, elle n’apparaît en Europe que dans la seconde moitié du XVIe siècle.
Un arrêt du Parlement du 13 décembre 1689 reconnaît aux limonadiers l’exclusivité de la composition et de la vente des eaux d’anis et de cannelle, mais autorise les apothicaires à en fabriquer et à en débiter en remède seulement.,Consacré sous diverses formes par la pharmacopée, l’anis entre aussi dans la composition de remèdes tels l’eau anti-apoplectique des Jacobins de Rouen et, sans doute l’élixir stomachique Azot du sieur Roussel. Au XIXe siècle, la vogue des boissons anisées, prenant l’ampleur que l’on sait — et qu’elle n’a pas perdue ! — relégua dans l’ombre l’usage thérapeutique de la plante et nécessita toute une réglementation minutieuse. Associée à l’anis tout au long de son histoire, la réglisse faisait déjà partie du droguier des Assyriens et, toujours en faveur chez les confiseurs, elle a vu son intérêt thérapeutique bien établi par les médecins(P. Julien, RHP, 1967).
Au XVIIIe siècle, Geoffroy précise que l’anis fait partie des quatre grandes semences chaudes : « elle est carminative, stomacale, béchique, diurétique, hystérique ». Par ailleurs, elle entre dans la composition du Sirop d’Armoise, Antiasthmatique, la Poudre de Roses, de Joie, la Thériaque, le Mithridate, le Catholicon double, le Lénitif, la Confection Hamech, l’Electuaire de Psyllium, les Trochisques de Rhubarbe, Les Pilules dorées, Polycrestes. On trouve enfin des recettes de Fournier contenant de l’anis comme par exemple sa « Tisane Royale pour les gens bilieux. Recette : Séné, 2 dragmes ; Sel d’Epsom, 1 dragme; Anis, une pincée; un citron coupé par tranches. Faites bouillir le tout dans cinq demi-septier d’eau réduit à pinte. On peut ajouter 2 onces de Manne. On en prend une chopine par jour que l’on partage en deux verres que l’on prend à une heure de distance. On prend l’autre chopine le lendemain. » Beauvillard (1922) cite ses autres noms : anis vert, pimpinelle, anis cultivé, etc. Il attribut aux semences d’anis, bouillies dans de l’eau, qu’elles « fortifient l’estomac, guérissent les coliques ventreuses, augmentent le lait des nourrices. » Il propose aussi d’utiliser les semences dans du lait pour « guérir les tranchées des enfants et faciliter les selles. Quand l’enfant est à la mamelle, c’est la nourrice qui doit boire l’infusion d’anis ».
Belladone : Le nom latin genre, Atropa, donné par Linné, est celui d’Atropos l’inexorable, fille de la nuit et d’Erèbe, l’une des trois Parques, maîtresse de la vie des mortels, celle qui tranchait le fil. Quant à son nom d’espèce, Belladone, il y a plusieurs explications (J. Aillaud et al., 1986) : Pour Michelet, ce nom vient des sorcières : « L’unique médecin du peuple, pendant mille ans, fut la sorcière. Les empereurs, les rois, les papes, les plus riches barons avaient quelques Docteurs de Salerne, des Maures, des Juifs, mais la masse de tout état, et l’on peut dire le monde, ne consultait que la Saga ou Sage-Felle. Si elle ne guérissait, on l’injuriait, on l’appelait sorcière. Mais généralement, par un respect mêlé de crainte, on la nommait Bonne Dame, ou Belle Dame, du nom même qu’on donnait aux fées. » Mais l’origine la plus communément admise viendrait de l’utilisation de cette plante par les belles italiennes du XVe et du XVIe siècle comme cosmétique : soit en onguent, soit sous forme de l’eau distillée de la plante comme le cite Matthiole en 1548 qui donnait les doses à employer suivant les effets désirés : « Pour toute personne un peu folâtre et qui pense être la plus belle du monde, il faut lui faire boire une dragme de (l’extrait de) cette racine. Que si on la veux faire plus folle, il lui faudra bailler deux dragmes. Mais qui la voudra faire demeurer folle toute sa vie, il lui convient bailler à boire trois dragmes de cette racine et non plus : car si on baillait quatre, on la ferait mourir » (in « Commentaires sur Dioscoride »).
Inconnue ou peu connue des Anciens – il est difficile de reconnaitre la plante dans les écrits des auteurs classiques de l’Antiquité, quoique c’est probablement elle que décrit Théophraste sous le nom de Mandragore à fruit noir, de saveur vineuses – mentionnée au Moyen-Age par saint Hildegarde qui la recommande (sous le nom de dolo, dollkraut en Allemand) pour soigner les rages de dents, la Belladone est nommée et figurée par différents auteurs du XVIe siècle sous le nom de Solatrum furiale (Saladinus d’Ascoli), solatrum mortale ou Dolwurtz (Brunschwyg), Solanum Somniferum ou Dollkraut (Léonard Fuchs), elle est alors cultivée dans les jardins des apothicaires et sa carrière de grande plante médicinale se développe au détriment des utilisations magiques et de la sorcellerie.
Le sabbat des sorcières ne serait autre chose qu’un délire atropinique et Delaveau cite l’hypothèse de l’action intense des pommades utilisées par le fait qu’on enduisait la « verguette ou ramon, appelée par simplification balai » et que « lorsque la sorcière le chevauchait pour se rendre au sabbat, la résorption au niveau de la vulve, beaucoup plus rapide et intense, faisait apparaitre les effets recherchés ».Au XVIIIe siècle Geoffroy indique que la Belladone entre dans la composition du Baume Tranquille. Ses baies, selon lui seraient « somnifères et mortelles ; ainsi, on ne doit l’employer qu’à l’extérieur. Les feuilles sont calmantes et résolutives extérieurement ». On ne trouve qu’une seule recette chez Fournier (1755) : « Infusion dans l’apoplexie : Recette : On mettra dans un pot de terre imprégné de sel 3 poignées de cétoine et de belladone blanc et noire que l’on fera infuser pendant une demi-heure à feu lent jusqu’à la réduction d’une chopine si l’on met en pot. et la mettre dans une bouteille bien bouchée. On en prend tous les matins dans le fond de la main que l’on respire par le nez. »
Chanvre : Comme le dit Auguste Chevalier (J. Agriculture traditionnelle et de botanique appliquée, 1944), « l’habitude de fumer le Chanvre remonte à la plus haute antiquité et nous avons émis ailleurs l’hypothèse que c’était peut-être le Nepenthes dont parle Homère. L’usage a dû prendre naissance en Asie, dans la patrie même du Cannabis et on a dû commencer à fumer les feuilles de Chanvre ordinaire assez pauvres en cannabinol. Les propriétés narcotiques du Chanvre commun étaient bien connues du peuple il y a peu de temps encore en Europe Occidentale. C’est ainsi que E. A. Duchesne rapporte « que dans les pays du Nord on prépare avec les feuilles une boisson enivrante qui produit un état de somnolence. La graine brûlée ou torréfiée chez les Anciens se présentait aux convives entre les différents services pour rappeler la gaieté, faire naître l’appétit et exciter à boire ». Serait-ce donc là l’origine de l’usage de la tasse de café, venue comme l’on sait d’Orient où l’usage du Chanvre (à fumer) est encore très en vogue? De son pays d’origine, l’Asie, le haschisch gagna les Pays méditerranéens et l’Arabie. On y importa non seulement la drogue, mais les graines de la plante productrice. La culture du Chanvre gagna ainsi la côte orientale d’Afrique. Le comte de Ficalho nous apprend que cette culture s’implanta d’abord dans la région de Zanzibar.
Au XVIe siècle, le Chanvre indien était déjà répandu chez les Cafres dans l’Afrique du Sud, puis il gagna tout le bassin du Zambèze s’étendant ensuite jusqu’à l’Atlantique et aussi à l’intérieur du bassin du Congo par la région des Lacs. A l’arrivée des Européens dans la zone équatoriale, la culture du Chanvre destiné à être fumé existait depuis longtemps dans tous les villages de race Bantou. » Selon L. Girre (1981) qui cite Hérodote, le chanvre a dû être transporté par les Scythes dans la région méditerranéenne, au moment de leurs invasions (vers 1500 avant JC), c’est à dire avant la guerre de Troie. On sait, dit-il, d’après les récits de Marco Polo que certains princes du Liban se servaient du haschich pour fanatiser leurs sujets et obtenir d’eux un dévouement à toute épreuve. C’est ainsi que la fameuse secte musulmane, dirigée par le « Vieux de la Montagne » dont les habitudes meurtrières inspiraient la terreur aux Croisés, pendant les XIe et XIIe siècles, tirait son nom, Hashishin, de Hashich, nom arabe du chanvre. Fanatisés, sous l’empire de cette drogue, par leur chef, ces guerriers étaient capables de se battre avec fureur. Au XVIIIe siècle, Geoffroy parle peu des propriétés thérapeutiques du cannabis sauf pour dire que les feuilles et les fruits nommés Chenevi sont extérieurement très résolutifs. Fournier utilise les graines de chanvre pour une « Emulsion spécifique pour la Gonorrhée. Recette: Graine de Melon, d’Agnus Castus, de Chanvre et de Pavot blanc, une dragme de chaque; Broyez les dans un mortier versant par dessus une livre de décoction de Racines et fleurs de Nénuphar et dans la colature, on y delayera une once et demi de sirop violat ou de Nénuphar cristal minéral 15 grains pour deux doses que l’on donnera une le matin à jeun et l’autre à 8 heures du soir. »
Colchique : « C’est Dioscoride qui a dénommé la plante « colchicon » en raison de son origine géographique présumée, le pays des Colches, la Colchide, un ancien royaume de l’Asie mineure où, selon la mythologie, Jason et ses Argonautes vinrent conquérir la Toison d’or. Selon la mythologie grecque, Apollon aurait transformé l’une de ses conquêtes galantes en colchique. Le parcours du colchique dans le domaine de la médecine traditionnelle est complexe et est dominé par la crainte de sa toxicité. Le « Papyrus Ebers » (1500 av. JC) décrit l’usage d’une drogue qui pourrait bien être le colchique. Dès le Ve siècle, les médecins byzantins l’utilisent sous le nom d’hermodactyle (« doigt d’Hermès »). Au cours du XVIe siècle, son usage est rejeté par plusieurs auteurs comme Jacques Grévin, médecin de Paris, qui en dit : « Ce poison est enemy de la nature de l’homme en tout et partout ». Rembert Dodoens le nomme « perniciosum colchicum » et en dit : « Le safran sauvage est corrupteur et vénéneux et par suite n’est pas employé en médecine ». Son usage, sous forme de teintures et de vin, réapparait à la fin du XVIIIe siècle, mais sa toxicité en rendait toujours l’administration hasardeuse. »(Vanhaelen,Université Libre de Bruxelles).
Dans sa Pharmacopée, Moyse Charas l’évoque, de même que Lémery dans son traité des Drogues Simples. Dans ce dernier, il ajoute que « la racine est regardée comme mortelle prise intérieurement, car elle gonfle comme une éponge dans la gorge et dans l’estomac et sorte qu’elle fait suffoquer.
Elle est propre aux maux de gorge, pour les rhumatismes, et pour la goutte appliquée extérieurement ». Pour Geoffroy, c’est un poison, pris intérieurement. Il précise par ailleurs que « extérieurement pendue en forme d’amulette, on dit qu’elle résiste au venin de toute maladie épidémique, même à la peste, autant qu’une amulette en est capable ». « C’est en 1763 que le médecin de l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche, le baron von Storch, mit en lumière les propriétés antigoutteuses du colchique et son intérêt dans le traitement de la goutte. Benjamin Franklin; qui souffrait lui-même de la goutte, contribua à l’introduction du remède aux Etats-Unis.
Après une timide apparition en 1618, le colchique est mentionné dans la Pharmacopée de Londres de 1788″. (Vanhaelen,Université Libre de Bruxelles). Le colchique n’apparait ni dans les Éléments de Pharmacie de Baumé, ni chez Barbier (Traité élémentaire de matière médicale) en 1824. Il faudra attendre le pharmacien français Alfred Houdé pour que soit isolée la colchicine, le principal constituant actif du colchique, isolée en 1884 grâce à deux solvants nouveaux: le chloroforme et l’éther de pétrole.
Digitale : L’histoire de l’usage médical de la digitale est relativement récente. C’est en effet Léonhard Fuchs, en 1542, qui décrivit et illustra la plante qu’il donna Digitalis. Elle était, à cette époque, considérée comme un médicament violent et fut inscrite à la Pharmacopée de Londres en 1650. Les premières recherches sur l’action thérapeutique de la digitale sont dues au médecin et botaniste anglais Withering, vers 1778. Il en signala les propriétés diurétiques en 1785, ainsi que son influence sur les contractions cardiaques dans certaines conditions pathologiques. Les essais chimiques commencèrent en 1809 (L. Girre, 1981)
Fougère mâle : Le rhizome a toujours occupé une place importante dans la thérapeutique antiparasitaire. Dioscoride, Galien et Avicenne parlent de cette drogue comme d’un anthelminthique puissant. Abandonné en France pendant plusieurs siècles par la médecine officielle, elle est cependant citée par Goeffroy en 1763 qui distingue trois sorte de fougères (mâle, femelle et fleurie) mais qui considère que les trois ont les mêmes propriétés : « elles sont vermifuges ». Lémery dans son traité des drogues simples évoque également la fougère pour dire qu’elle est « fort apéritive, elle excite l’urine, elle est propre pour les maladies de la rate, pour lever les obstructions, pour l’hydropisie ». Il ajoute : « quelques uns en ont fait du pain de famine ». On trouve chez Fournier (1755) plusieurs recettes contenant de la fougère mâle comme celle-ci : » Tisane apéritive. Recette : Racines de fougère mâles, et souchet, une demi-once de chaque; sassafra, 6 dragmes. Faites bouillir le tout pendant (une) demi-heure dans 6 livres d’eau commune, ensuite passer le tout pour l’usage. »
La fougère fut tirée de l’oubli vers la fin du XVIIIe siècle, grâce à l’efficacité souvent constatée de certains remèdes secrets. En 1785, Louis XVI acheta 1800 livres un remède secret ténifuge au chirurgien suisse Nuffler et confia à Turgot le soin de le divulguer. Ce remède comportait d’abord un régime la veille du traitement ; ensuite, après un lavement, le malade absorbait de la poudre de rhizome de fougère mâle, suivi d’un mélange purgatif où entraient notamment le calomel, la gomme-gutte et la scammonée. En 1825, Peschier, pharmacien à Genève, prescrira un extrait éthéré de fougère mâle qui remplacera définitivement la poudre.
Jusquiame : Les Romains dès le Ier siècle savaient que les Jusquiames étaient des plantes dangereuses, mais bien avant eux, les Grecs les utilisaient comme poisons ou comme plantes divinatoires ou encore pour simuler la folie ; ils les utilisaient aussi comme médicinales puisqu’une jusquiame était prescrite par Hippocrate comme narcotique au même titre que la Mandragore ou l’opium. Ce devait être plus vraisemblablement l’hyoscyamus alba qui était aussi particulièrement recommandée par Dioscoride. Elle est décrite vers 681 par Benedictus crispus, Archevêque de Milan sous les noms de Hyoscyamus et de Symphoniaca. C’est Störk qui, en 1762, attira de nouveau l’attention des médecins sur son utilisation en thérapeutique (J. Aillaud et al., 1986). Lémery dans son traité des drogues simples évoque les propriétés de la Jusquiame, la jusquiame noire et la jusquiame blanche : « elles sont narcotiques, stupéfiantes assouplissantes, et souvent mortelles aux animaux qui en mangent ; on s’en sert extérieurement dans les emplâtres, dans les onguents, dans les huiles, dans les fomentations ; elles apaisent le trop grand mouvement des humeurs. On doit préférer la jusquiame blanche à la jusquiame noire vulgaire pour l’usage intérieur, à cause qu’elle ne produit aucun délire. La semence de jusquiame est employée pour le mal de dents et pour les engelures ». On trouve chez Fournier cette recette parmi d’autres : « Cataplasme résolutif. Recette : Farine de fèves cuites dans une décoction Emol. , quatre onces, feuilles de Jusquiame blanc, de Mauve, cuites séparément dans la décoction émolliente et mêlées avec la farine de fève, une poignée de chaque pour un cataplasme. »
Termes médicaux au XVIIIe siècle (Geoffroy)
Acerbe : c’est un goût qui tient de l’aigre et de l’amer.
Adoucissants : remèdes qui corrigent l’âcreté des humeurs. Agglutinatifs : Remèdes qui réunissent et recollent les plaies. Alexipharmaques ou alexitères : remèdes qui résistent aux venins, fièvres malignes, peste, etc. Il y a en a pour l’intérieur et pour l’extérieur. Anodins : remèdes qui calment les douleurs. Antiépileptiques : remèdes contre l’épilepsie ou mal caduc. Antihystériques : remèdes contre les vapeurs de matrice. Antiscorbutiques : remèdes contre le scorbut. Antispasmodiques : remèdes contre les convulsions ; Apéritifs : remèdes qui rendent les humeurs moins épaisses et plus coulantes. Astringents : remèdes qui resserrent les pores et s’opposent au cours immodéré des humeurs. Béchiques : remèdes qui conviennent aux maladies de poitrine. Calmants : c’est la même chose qu’anodins : voyez ce mot. Carminatifs : remèdes qui dissipent les vents. Caustiques : remèdes qui brûlent les chairs Céphaliques : remèdes bons pour les maladies de la tête. Cicatrisants : remèdes qui affermissent et dessèchent les nouvelles chairs des plaies. Consolidants : remèdes qui servent à la réunion des plaies. Cordials : remèdes qui rétablissent les forces abattues Décoction : préparation de drogues médicinales qu’on fait bouillir dans quelque liqueur pour en tirer les vertus. Dentifrices : drogues pour nettoyer les dents. Dépilatoires : drogues qui font tomber le poil. Désobstruants : remèdes qui enlèvent les obstructions ou embarras, causés par l’épaississement des humeurs. Dessicatifs : remèdes qui consomment les humidités superflues, intérieurement et extérieurement. Détersifs : remèdes qui nettoient les plaies, en dissolvant les humeurs visqueuses qui s’y attachent. Diaphorétiques : remèdes qui font dissiper les humeurs, par la transpiration. Digestifs : remèdes qui disposent à la suppuration. Discussifs : remèdes qui dissolvent et dissipent les humeurs. Diurétiques : Remèdes qui adoucissent l’acrimonie des humeurs et les poussent par les urines. Emétiques : remèdes qui excitent le vomissement Emollients : remèdes qui ramollissent les tumeurs, en relâchant les fibres. Errhines : c’est la même chose que sternutatoires : voyez ce mot. Hépatiques : remèdes capables d’enlever les obstructions. |
Hydragogues : remèdes purgatifs qui évacuent les eaux et les sérosités.
Hystériques : remèdes qui excitent les règles. Incisifs : remèdes qui divisent les humeurs grossières Incrassants : remèdes qui épaississent les liquides, et leur donnent de la consistance. Infusion : médicaments qu’on fait seulement tremper dans quelque liqueur chaude et non bouillante, pour en tirer les vertus. Laxatifs : remèdes qui lâchent le ventre, et purgent doucement par bas. Masticatoires : drogues qui se mâchent, et attirent par la bouche les eaux et les sérosités. Maturatifs : remèdes qui disposent les plaies à suppuration. Narcotiques : remèdes qui calment les douleurs et procurent l’assoupissement. Nervins : remèdes qui fortifient les nerfs. Ophtalmiques : remèdes propres aux maladies des yeux. Otalgiques : remèdes bons pour les maux d’oreilles. Pectoraux : c’est la même chose que béchique. Voyez ce mot. Pénétrants : remèdes actifs qui divisent les humeurs. Purgatifs : remèdes qui purgent par bas seulement. Rafraichissants : remèdes qui tempèrent la trop grande agitation des humeurs. Répercutifs : remèdes extérieurs qui repoussent les humeurs en dedans. Résolutifs : remèdes extérieurs qui sont dissiper par la transpiration les humeurs arrêtées dans quelque partie du corps. Spléniques : remèdes propres aux maladies de la rate Sternutatoires : drogues qui excitent l’éternuement Stiptiques : c’est la même chose qu’astringents : voyez ce mot. Stomachiques, stomacales : remèdes propres à faciliter la digestion. Sudorifiques : remèdes qui excitent la sueur Suppuratifs : Remèdes extérieurs qui facilitent la suppuration Tempérants : remèdes qui apaisent la trop grande fermentation. Vomitifs : c’est la même chose qu’émétiques : voyez ce mot à la lettre. Utérins : c’est la même chose qu’antihystériques. Vulnéraires : remèdes propres à la guérison des plaies. Vermifuges : remèdes qui font mourir les vers ou les chassent du corps. Vésicatoires : remèdes caustiques, qui attirent les sérosités vers la superficie de la peau |