François-Laurent-Marie Dorvault (1815-1879)

   

François-Laurent-Marie
Dorvault (1815-1879)2

 

 
   

Exposition à l’occasion du bi-centenaire de sa naissance
 

 
   

François Dorvault est né le 20 janvier 1815 à Saint-Etienne-de-Montluc (Loire-Atlantique). D’origine très modeste (son père était sabotier), Dorvault part pour la ville de Nantes à 11 ans pour travailler chez divers commerçants pour finalement aboutir chez l’un des vingt-neuf pharmaciens de la ville, Davoust.

En 1830, le patron de Dorvault envoya son fils poursuivre ses études à Paris. Ce dernier engagea Dorvault à le rejoindre dans la capitale, ce qu’il fit à pied ! .

Après avoir travaillé dans plusieurs pharmacies puis fait son stage en pharmacie, il devint Interne des hôpitaux en 1840, pharmacien en 1841, et s’installa dans une officine au 7 rue de la Feuillade à Paris.

Dès le début de sa carrière, François Dorvault se fait remarquer par ses pairs. Tout d’abord il publie la première édition de son ouvrage majeur, l’Officine, dès 1844, 3 ans après le début de sa carrière officinale, un ouvrage de 652 pages dont le succès fut immédiat.

                                

 

Première édition de l’Officine en 1844

 
   

Publicité pour Le Perdriel dans l’Officine de 1866

 

   

Publicité pour Le Perdriel dans l’Officine de 1866
 
   

C’est sans doute ce qui lui valu d’être présenté à la Société de Pharmacie de Paris (devenu par la suite Académie nationale de Pharmacie), dès 1845. il a alors 30 ans ! Mais il y resta très peu de temps : Un rapport favorable de présentation de sa candidature à une place de membre avait été fait par Durozier à la date du 4 octobre 1844, à la condition qu’il supprime de la devanture de son officine le titre de « Pharmacie Centrale». Par lettre du 7 janvier 1845, Dorvault, qui avait été élu, signalait qu’il avait rempli son engagement d’opérer cette suppression. Mais Cadet de Gassicourt, dans une lettre du 6 juin 1845 adressée aux membres du Bureau de la Société, rappelait cette promesse en signalant qu’en réalité le titre de « Pharmacie Centrale » avait reparu avec l’adjonction du mot « anciennement ».

Devant cette nouvelle attaque, Dorvault adressa le 2 juillet suivant au président de la Société une lettre dont nous extrayons ce passage : « Un membre de la Société a cru devoir critiquer une inscription que j’ai fait mettre sur 1′ impost de ma pharmacie dans le but d’établir pendant un temps plus ou moins long son identité. Bien convaincu grammaticalement et moralement que le reproche n’est pas fondé, mais voulant éviter toute discussion de ce genre, je vous prie, Monsieur le Président, de bien vouloir faire agréer ma démission. » C’est ainsi que Dorvault ne fit qu’un passage très éphémère à la Société de Pharmacie de Paris1
 
     
 
 
  L’Officine :

un monument maintes fois réédité et diffusé à l’étranger.

 

 
   

L’Officine diffère profondément des ouvrages classiques de l’époque, comme le dit lui même Dorvault dans la première édition de 1844 :

 

« L’Officine est un travail neuf par l’idée qui lui a donné naissance, neuf par son ensemble ; car si quelques-unes des parties ont été traitées, elles l’ont été séparément et elles ne forment point un seul tout ».

Dénuée de tout caractère professoral ou didactique, l’Officine se veut « un livre qui résumerait tous les ouvrages nécessaires à l’exercice de la pharmacie, un volume qui, à lui seul, pourrait être considéré comme une petite bibliothèque pharmaceutique, où le pharmacien trouverait rassemblés tous les renseignements nécessaires aux besoins journaliers de sa profession ».  

   

Publicité pour les appareils GAIFFE dans l’Officine de 1875
 
         
   


Publicité pour les produits PENANT dans l’Officine de 1866

Emporte-pièce pour la fabrication des pastilles
utilisé par la Pharmacie Centrale  (L’Officine, 1866)
   

Il faut replacer l’Officine de Dorvault dans le contexte de son époque, tant sur le plan politique que pharmaceutique. Comme l’explique Yves Cottereau dans sa conférence de 1979 aux Journées Pharmaceutiques Internationales de Paris, la première édition du Dorvault apparait sous le règne de Louis-Philippe. L’industrie et le commerce sont ouverts librement et délibérément aux plus entreprenants.

La pharmacie, pour sa part, se cherche. Elle est sortie depuis peu du cadre corporatif. Elle se doit de suivre l’évolution scientifique récente : développement de la chimie minérale, début de la chimie extractive, débuts de la connaissance des principes actifs des plantes, développement industriel qui va permettre de centraliser certaines opérations pharmaceutiques…

Le pharmacien devient naturellement le propagateur des connaissances scientifiques nouvelles.

 

 
         
   

Dorvault réalise donc son ouvrage de compilation des connaissances à partir de nombreuses sources qu’il cite dans son ouvrage  : le Codex de 1837, bien sûr, mais qui ne compte que 463 drogues simples, c’est à dire une faible partie de l’éventail thérapeutique de l’époque, les pharmacopées de Jourdan et de Guibourt, mais surtout de très nombreux traités de pharmacie :

Le Manuel du pharmacien (Chevallier, 1825) ; le Traité élémentaire de pharmacologie (Cottereau, 1836) ; le Manuel de pharmacie théorique et pratique (Soubeiran, 1840) ; le Traité complet de pharmacie théorique et pratique (Virey, 1840) ; le Cours complet de pharmacie (Lecanu, 1842). S’ajoutent à cette liste plusieurs formulaires de poche qui mettaient à la disposition des praticiens les formulations magistrales les plus courantes. Dorvault cite le Formulaire magistral et mémorial pharmaceutique (Cadet de Gassicourt, 7e édition, 1838) ; le Formulaire de poche à l’usage des praticiens (Richard, 7e édition, 1840) ; et les formulaires de Bouchardat, Foy, Ratier, et Milnes-Edwards.

S’ajoutent à cet ensemble les traités de matière médicale de Guibourt, Mérat, Richard, Fée, Lindley et Trousseau. L’Histoire abrégée des drogues simples de Guibourt (1836) a dû largement inspirer Dorvault, de même que le dernier traité paru avant l’Officine, publié par Foy en 1843, le Traité de matière médicale et thérapeutique.

 

   


Four utilisé par la Pharmacie Centrale
pour la fabrication du Calomel (L’Officine, 1866)

 


Publicité pour les distillateurs EGROT (L’Officine, 1866)
 
         
   
Tarif général de pharmacie.
Première page consacré à ce sujet dans l’Officine de 1844. 


Tarif des opérations (Officine, 1844)

 

   

La première édition de l’Officine se divise en quatre grandes parties : Il place en tête de l’ouvrage un « tarif général » Estimant éminemment souhaitable, tant « pour la dignité des pharmaciens, que pour la qualité de leurs services », que la « concurrence se fasse par la qualité et non par les prix », il propose à ses confrères un tarif commun à toute la France, qu’il a établi à partir de tarifs locaux (de Paris, de Strasbourg et de la Marne), et y joint un tarif des manipulations (opérations faites par le pharmacien à l’officine).

Sa proposition s’inspire directement du tarif obligatoire déjà en vigueur dans les pays nordiques, et il fait remarquer qu’elle a pour corollaire la limitation du nombre des officines, qu’il préconise. De ce point de vue, la pensée de Dorvault est au coeur de notre actualité !!

Son tarif comporte également le prix des « médicaments spéciaux » déjà existants (on connaît la polémique qui aura lieu pendant plus d’un siècle sur les spécialités pharmaceutiques !).  
 
   


Tarif des médicaments spéciaux (L’Officine, 1844)

 

   


Tarif des instruments et appareils divers
(L’Officine, 1844)
 
   

La seconde partie de l’Officine de 1844 est un « Dispensaire Général » où Dorvault a compilé toutes les drogues existantes, sans examen critique, avec le souci de donner sur chaque drogue les renseignements essentiels qu’un pharmacien pouvait rechercher.

Dorvault explique le détail de cette partie dans son introduction : « En tête du Dispensaire, nous avons placé, en manière de prolégomènes, des pièces qui ne sont pas sans intérêt ; ce sont : 1° une instruction sur la posologie nouvelle, accompagnée de notions suffisantes et de tableaux faisant connaître les rapports des poids anciens aux nouveaux, et de ceux-ci aux poids des principaux Etats de l’Europe ; 2° une courte instruction sur les aéromètres et les thermomètres ; 3° un Calendrier pharmaceutique, ou tableau des substances à se procurer ou des préparations à faire mois pas mois ; 4° la classification et la nomenclature pharmaceutiques dont nous avons déjà dit un mot ; 5° des observations relatives à l’exécution des formules magistrales et du livre-copie ; 6° enfin, une proposition de signes nouveaux de pondération médicinale en harmonie avec le système décimal actuel. »

   


Calendrier pharmaceutique. Mois de mai (L’Officine, 1844)
 
   


L’Officine, 1844. Dispensaire Général.
Les cigares médicinaux.
   


L’Officine, 1844. Dispensaire Général.
Les dragées antisyphilitiques.

 

 
   


Appareil de lixiviation (Opération pharmaceutique)
L’Officine 1844
   

La troisième partie, intitulée « pharmacie légale » comporte des chapitres de législation pharmaceutique, de toxicologie et d’essais des médicaments. Enfin, un « Appendice pharmaceutique » comprend une liste de produits vétérinaires qui à l’époque, ont été injustement enlevés aux pharmaciens, dit Dorvault, un chapitre sur les produits homéopathiques puis des miscellanées.

Sur l’homéopathie, Dorvault indique : « Les médecins homéopathes pouvant se croire autorisés à vendre les médicaments dans les localités où les pharmaciens ne seraient pas à même de les préparer suivant les preceptes de la doctrine, nous avons voulu leur enlever ce prétexte, en faisant connaître les notions nécessaires à cette manipulation. Nous avons tiré de l’ouvrage de Bigel et de celui de Jahr ce que nous disons sur les médicaments homéopathiques ».  

 
   


Elixirs antivénérien (L’Officine, 1844)
   


Thériaque d’Andromaque (L’Officine, 1844)
 
   
Traduction espagnole de l’Officine (1853)
   

Le succès considérable de l’Officine conduisit à une seconde édition trois ans plus tard, en 1847, qui passe de 652 pages à 892. L’auteur ajoute à l’édition initiale un « Art de formuler » destiné aux jeunes médecins « toujours embarssés en matière de pharmacologie ». Cette remarque soulignée par Yves Cottereau comme toujours valable en 1979 est sans doute malheureusement très actuelle en 2015 !! Dorvault ajoute également à l’ouvrage une « table polyglotte », bien caractéristique de la préoccupation de sa préoccupation de réaliser une « pharmacopée universelle ».

Au delà de la zone francophone où le « Dorvault » fut très largement diffusé, l’ouvrage fit l’objet d’une édition espagnole en 1853, sous le titre « La Botica », avec un sous-titre La Officina de Farmacia, traduite de la troisième édition française. Des suppléments seront édités jusqu’en 1935. Grâce à ces éditions espagnoles,  c’est l’Amérique du Sud et l’Amérique Centrale qui vont largement utiliser le Dorvault.   

 
   


L’Officine, 1855
   


Presse à teinture (L’Officine, 1855)
 
         
   


Couverture de l’ouvrage de Dorvault « Iodognosie »
paru en 1850 mais écrit en 1847
   

Un autre ouvrage de Dorvault, moins connu, est intitulé : L’Iodognosie. Ecrit en 1847 mais publié seulement en 1850, il fut couronné par les Sociétés de médecine de Lyon et du Hainaut. L’Iodognosie compte 31 pages de préface et d’introduction et 274 pages de texte ordonné en trois parties classées dans l’ordre suivant : Chimie, Pharmacie et Médecine. Une abondante bibliographie termine l’ouvrage.

Dorvault fait les trois propositions suivantes :

« Chimiquement, l’iode, par l’énergie et le caractère de ses affinités, occupe une place élevée dans la philosophie chimique. Les réactions caractéristiques auxquelles il donne lieu dans son contact avec les autres corps, en font un des réactifs les plus usités dans les laboratoires d’analyse.
 
Pharmaceutiquement, l’iode et ses composés chimiques constituent aujourd’hui la base de plus du dixième des préparations magistrales. 

Thérapeutiquement, il y a, entre l’iode et l’iodure de potassium, la même différence qu’entre le mercure et le sublimé corrosif, ou encore entre le soufre et les sulfures alcalins.

En thérapeutique médicale, l’importance de l’iodure de potassium égale aujourd’hui celle du sulfate de quinine. En thérapeutique chirurgicale, l’iode, mieux connu, mieux apprécié, rendra un jour plus de services que n’en rend aujourd’hui le nitrate d’argent. »    

 
 

Dans la partie sur la chimie, Dorvault pose beaucoup de questions sur la famille des halogènes qu’on ne connaît pas encore précisément. « Au point de vue de la physique et de la chimie, l’iode, sans prétendre cependant engager l’avenir, doit, selon nous, être considéré comme un corps essentiellement simple que les méthodes d’investigations présentes et futures de parviendront pas à dédoubler.

 

Certes « l’iode possède avec le chlore les plus nombreux et les plus intimes points de contact » ; la similitude de l’iode avec le brôme est encore plus étroite… Si nous poussons plus loin la recherche de corps ayant des analogies saillantes avec ces trois dynamides, nous trouvons aussitôt le fluor dont les propriétés sont connues avant qu’il ne soit lui-même. Faut-il donc comprendre encore le fluor au nombre des dérivés du chlore ? »*

* Rappelons que le fluor ne sera isolé par Moissan qu’en 1886, soit près de 40 ans plus tard.

   


Appareil extracteur pour la production de l’iode
Iodognosie, 1850
 
   


Table des matières de la partie Pharmacie
Iodognosie, 1850

 

     

L’iode est-il un médicament ? Dorvault a réuni un grand nombre de résultats apportant la preuve de son efficacité dans la scrofule, le goitre*, la syphilis, mais ajoute-t-il, « où nous trouvons surtout le preuve de la vertu médicale de l’iode, c’est dans l’intuition ».

Pour lui, la puissance curative de l’iode ne peut pas être mise en doute : « Un fait considérable s’est produit depuis quelques années, c’est l’introduction de l’iodure de potassium dans la thérapeutique de l’iode. Aujourd’hui ce sel, que nous prenons pour type des iodiques, a, nous n’hésitons pas à le proclamer, une importance thérapeutique égale à celle du sulfate de quinine, par le nombre et la gravité des affections qu’il est appelé à guérir comme par la sûreté de son action… Les considérations qui précèdent nous permettent maintenant d’établir le principe fondamental de la médication iodique ; nous le formulons dans la proposition suivante : L’iode est un fluidisant spécial. Toute affection morbide reconnaissant pour cause ou effet, une coagulation humorale, réclame plus ou moins manifestement la médication iodique. »

Dorvault, dans la partie pharmaceutique de son ouvrage, donne de très nombreuses formules de médicaments iodés, y compris bien sûr la teinture d’iode du Codex, mais aussi les formules du docteur Lugol. On voit bien dans ces formules l’usage qui sera fait de l’iode tout au long du XIXe siècle : scrofule, goitre syphilis et beaucoup de pathologies incurables à l’époque : cancer par exemple. 

 

* La carence en iode comme origine du goître et du crétinisme ne sera confirmée sur le plan scientifique qu’au milieu du XXe siècle !

 
   
     
       
   

Médicament décrit par Dorvault dans l’Iodognosie, 1860
Cataplasme du docteur Lugol
   
   

Médicament décrit par Dorvault dans l’Iodognosie, 1860
Sirop de Bochet
   
         
   La Pharmacie Centrale, l’oeuvre de Dorvault      
   

Nous avons déjà consacré plusieurs expositions temporaires à la Pharmacie Centrale de France créée par Dorvault. Vous pouvez y accéder par ces liens :

Le catalogue de la Pharmacie centrale de France en 1905

Histoire de la Pharmacie Centrale de France

Par ailleurs, vous pouvez lire avec intérêt le document de Nicolas Sueur sur la Pharmacie Centrale en images

Mais nous allons cependant donner ici quelques informations complémentaire sous l’angle de l’action de Dorvault.

      

La création de la Pharmacie Centrale :

Celle-ci prend corps en 1852. Comme l’écrira plus tard Lefranc dans la notice consacrée à Dorvault : « Cette création est un de ses plus beaux titres professionnels. Notons à sa louange et à celle des premiers actionnaires qu’elle constituait dans le mouvement coopératif un type particulier. Jusqu’alors, en effet, les sociétés coopératives ne s’étaient entendues que des associations entre ouvriers, donnant entre eux leur travail, ou se concertant pour acheter en commun des objets de consommation de première nécessité. Or notre institution à nous, disait-il, est une association coopérative, capitaliste et de consommation à la fois entre patrons. »

 
         
         
 

La marque de fabrique de la Pharmacie Centrale de France :

La société, pour se faire reconnaître facilement, adopta un emblême, une marque de fabrique. L’écu représente au centre la pharmacie sous la forme d’une femme assise tenant de la main droite un livre, emblème de la science, et de l’autre le caducée à deux serpents. A ses pieds, divers appareils de pharmacie et de chimie dont un mortier avec son pilon, et un alambic. Elle s’appuie sur une sorte de bouclier aux armes de la ville de Paris. Devant elle, une colonne autour de laquelle s’enroule un serpent, et qu’un coq surmonte, le serpent et le coq d’Esculape. Derrière, le palmier.

Dorvault tint à préciser que le caducée de sa marque était le symbole du commerce. Il ajoutait : « La Pharmacie Centrale, en amenant autant que possible l’unité dynamique dans les médicaments, fera beaucoup pour les progrès de la thérapeutique. Il était donc bon de sacrifier au dieu de la médecine. »
 

   


Marque de fabrique de la Pharmacie Centrale de France
 
         
   

Le 25 septembre 1867, la Pharmacie Centrale de France accomplit, au dire de Dorvault, l’acte le plus considérable qu’elle ai fait depuis sa fondation. Elle acquit l’établissement de droguerie Menier et son usine de Saint Denis (qui sera effectivement payée en 1869). Cette acquisition de l’usine était devenue indispensable pour la Pharmacie Centrale, car sa fabrique de Coubevoie ne suffisait plus. 

Située à la Plaine-Saint-Denis, l’usine, conçue par l’architecte Jules Saulnier,  occupait 30 000 mètres carrés couverts en grande partie par des bâtiments, laboratoires et entrepôts. Plusieurs pavillons composaient cet ensemble : le Pavillon Guibourt comportait dix ateliers destinés à la Pilerie : réduction en poudre de produits alimentaires, de produits chimiques, de minerais, préparation de farine de lin, rabotage du bois de Quassia, de Santal, de Sassafras…, pulvérisation des fleurs de Pyrèthre, pulvérisation de la noix vomique… Le Pavillon Soubeyran était consacré aux préparations pharmaceutiques, le Pavillon Pelletier aux glucosides et alcaloides, etc.  

   


Fourgon de commerce de la Pharmacie Centrale de France


Publicité pour les pots de porcelaine de la Maison Gosse et Vignier (Détail)
L’Officine, 1850

 
   

 

Page du Catalogue de la Pharmacie Centrale de France de 1877

   

La Pharmacie Centrale et la guerre de 1870 : les années difficiles.
 
Au moment de la guerre de 1870, la Pharmacie Centrale de France était devenue l’entreprise pharmaceutique la plus importante en France, avec un chiffre d’affaires de 7 millions de francs et un capital de 5 millions. Mais la guerre de 1870, puis le long siège de Paris, les luttes sanglantes de la Commune font frapper durement la prospérité de l’entreprise. L’Union pharmaceutique va d’ailleurs cesser de paraitre une bonne partie de l’année 1971. En août 1871, Dorvault explique à propos de cette période que « la moitié des jeunes gens tombant sous le coup de la loi militaire ou de la garde mobile, et la moitié de l’autre moitié faisant partie de la garde sédentaire, il en est résulté que le peu de travail à faire était encore difficile. Ajoutez à cela tous nos chevaux requis, sauf deux, pour être abattus et fournir de la subsistance… ».

L’établissement proche du siège insurrectionnel, l’Hotel de Ville,  est menacé, désigné comme devant être incendié. « Oui, parait-il, nous étions à l’index, et pourquoi ? Est-ce parce que nous avons fait tout le bien que nous avons pu faire autour de nous pendant le siège ? Les parisiens ne raisonnent pas. » 

Mais les affaires vont reprendre rapidement en France comme à l’étranger.    

 

 
  L’Union pharmaceutique      
   

Plusieurs années après la création de la Pharmacie Centrale, Dorvault décide de lancer l’Union Pharmaceutique, en janvier 1860. Dans l’introduction du premier numéro, il écrit qu’il ne suffit pas d’avoir créé la Maison commune des pharmaciens. il faut aussi continuer à créer d’autres outils utiles aux pharmaciens. Dans cette logique de créations, il faut, dit-il, « placer au premier rang celle d’un organe de publicité. La maison centrale, en relation avec presque tous les pharmaciens de France, a bien des choses à leur dire, et cependant, jusqu’ici obligée de correspondre péniblement et incomplètement avec eux, elle a bien souffert de ne pouvoir parler de tout à son aise et à tout le monde.

 
 

Si elle a ressenti cette privation, les confrères la sentent aussi tous les jours. Placée en effet dans une position exceptionnellement heureuse pour être au courant de tout ce qui intéresse la profession, la Pharmacie Centrale est nécessairement désignée pour trasmettre au corps pharmaceutique tous les renseignements utiles. L’absence d’une publication sérieuse et suivie est donc une véritable lacune…. ».

Le but de cette publication nouvelle « peut s’indiquer en deux mots. Réunir dans une publication mensuelle tous les renseignements de quelque nature qu’ils soient, pourvu qu’ils puissent présenter directement ou indirectement quelque intérêt ou quelque utilité au pharmacien…. Sans prendre parti dans les questions susceptibles de troubler l’harmonie de notre grande famille, il doit accueillir les réclamations et les observations de tout le monde et mériter son titre d’Union Pharmaceutique. »

   


Première page de L’Union Pharmaceutique en 1860
 
   


Médicament à base d’escargot de mer
(Union Pharmaceutique, 1860)
   

L’Union Pharmaceutique a plusieurs rubriques :

– La revue médicale : Dorvault demande à Bouchardat d’assurer la chronique générale. Après une période où il ne donne que quelques articles, Bouchardat se consacre entièrement à l’Union Pharmaceutique à partir de 1876, jusqu’à sa mort en 1886.

– Officine et Codex : Depuis 1863, l’Union Pharmaceutique publia des additions et corrections au texte de l’Officine à à son tarif général. La révision du Codex provoqua également plusieurs communications. De 1861 à 1864, le journal publié tous les rapports des commissions formées par les sociétés de pharmacie pour ce travail de révision.  

 
   

– Sciences. L’Union pharmaceutique publia plusieurs conférences comme celle faite en 1873 sur les projections microscopiques appliquées à l’enseignement de la matière médicale végétale. Beaucoup d’autres auteurs vont contribuer à enrichir cette rubrique.

– Politique : L’Union souhaitait éclairer les pouvoirs publics sur les désirs et besoins des pharmaciens. Mais s’agissant de sujet « traitant de matière politique ou d’économie sociale », la loi de 1852 obligeait les propriétaires de journaux à verser un cautionnement qui fut de 30 000 francs pour l’Union pharmaceutique. Ce cautionnement n’ayant pas été versé, Dorvault fut très prudent sur ces sujets 

   

Exemples de courrier des lecteurs
Union Pharmaceutique, 1860
 
   

Schéma d’inhalateur qu’on retrouvera plus tard
dans l’Officine de Dorvault
Union Pharmaceutique, 1860
   

Schéma d’inhalateur qu’on retrouvera plus tard
dans l’Officine de Dorvault
Union Pharmaceutique, 1860
 
     
   

Quelques années plus tard, Dorvault crée, en 1873,  en annexe de l’Union pharmaceutique, le Bulletin Commercial de la Pharmacie Centrale. Ce bulletin contient des articles d’intérêts professionnels, des nouvelles et des chroniques. Une revue commerciale des cours de la droguerie occupe la partie la plus importante.

Tiré à 8000 exemplaires, le Bulletin est servi aux abonnés de l’Union, et adressé gratuitement aux professeurs des Ecoles de Pharmacie et aux bibliothèques des salles de garde des internes en pharmacie des hôpitaux.

 

   


Bulletin Commercial de la Pharmacie Centrale
Premier numéro (1879)
 
   

   

 

Publicité pour les mortiers à pilon mécanique DULAC
Bulletin Commercial, 1879
 
         
   

Appareil à compter les pilules, granules et capsules
Bulletin Commercial, 1879
   

 

Appareil à vapeur pour évaporation dans le vide
Bulletin Commercial, 1879
 
         
   

Conclusion

En guise de conclusion, nous reproduisons une partie de la fin de l’ouvrage de Patrice Boussel consacré à Dorvault : « En quête d’un enseignement, d’un soulagement ou d’un réconfort, chacun, hier se rendait chez « son » pharmacien. Celui-ci jouait le rôle d’instituteur des adultes, de confesseur et de consolateur, sachant qu’en cas de défaillance personnelle, lui-même n’aurait jamais recours en vain à « son » Dorvault. Le pharmacien de la rue Feuillade avait consacré son existence à la profession, qu’il voulait grande et forte, toujours mieux armée pour aider les hommes, plus savante pour les instruire plus profondément. En retour, ceux de la profession – et d’abord les humbles, les isolés -virent en lui beaucoup plus que le directeur-fondateur de la Pharmacie Centrale de France, le directeur-fondateur de l’Union Pharmaceutique, l’auteur de l’Officine, ils en firent le « premier » pharmacien de France, l’incarnation même de la Pharmacie et de la science « vivante ». Cette transfiguration donne à François Dorvault une place unique dans l’histoire des sciences, des techniques et du commerce au XIXe siècle : chacun sait que l’iode est due à Courtois, la quinine à Pelletier et Caventou, la margarine à Mège-Mouriès… Pasteur représente pour le plus ignorant la découverte des microbes et la guérison de la rage ; la famille Schneider se confond avec le Creusot et Boucicaut reste le créateur des grands magasins du « Bon Marché », mais François Dorvault, c’est l’industrie bienfaisante du médicament, la science pratique, enseignante et agissante, c’est toute la PHARMACIE ».

On peut aussi citer l’hommage rendu à Dorvault en 1879 par le Conseil d’administration de la Pharmacie Centrale : « Lui, qui n’était ni droguiste, ni comptable, qui avait l’élocution hésitante, la plume parfois rebelle, lui, qui était, comme le plus grand nombre des pharmaciens, un apprenti en administration, dans l’art de discerner et de gouverner les hommes, a suppléé à tous ces éléments absents ou embryonnaires, par son énergie et son incessante activité. Il s’est improvisé chef de grande maison commerciale, n’ayant pour boussole que sa foi robuste, pour conseiller que son amour ardent de la Pharmacie, pour stimulant que le désir légitime d’honorer son nom… »

 
   

 

Publicité pour les pots de porcelaine de la Maison Gosse et Vignier
L’Officine, 1850
 
     
     
     
   Chronologie sommaire      
   1815 : 26 janvier Naissance de François Dorvault à Saint Etienne-de-Montluc (Loire Inférieure)    1850 : 3° édition de l’Officine. Publication de l’Iodognosie.  
   1826 : Dorvault travaille à Nantes, notamment chez le pharmacien Davoust    1851 : Voyage à Londres (Exposition Universelle). Publication de l’Organisation de la Pharmacie en France considérée dans ses rapports avec la propagation des sciences d’application.  
   1830 : F. Dorvault travaille à Paris dahns deux pharmacies successives    1852 : 15 mars, Manifeste pour la Pharmacie des Pharmaciens. Note : Formules pour l’emploi du matico.  
   1836 : F. Dorvault, premier élève dans une troisième pharmacie parisienne.    1852 : La Pharmacie Centrale s’installe au n°23, rue des Marais-St-Germain.  
   1838. F. Dorvault prend un service de suppléant dans les hôpitaux de Paris. Il adresse au Journal de Pharmacie une note sur l’émulsion d’amandes amères sur le calomel.    1855 : 4° édition de l’Officine  
   1840 : F. Dorvault reçu 3° interne des hôpitaux civils. Il remporte une médaille d’or et deux d’argent à l’Ecole de Pharmacie de Paris.    1858 : 5° édition de l’Officine  
   1840 ?  : Mariage de F. Dorvault avec Mlle Garot    1859 : Achat de l’hôtel d’Aumont.  
   1841 : F. Dorvault est reçu pharmacien. Achat de l’officine du n°7, rue de la Feuillade. Décembre, note à la Société de Pharmacie de Paris sur la préparation du sirop antiscorbutique.    1860 : 12 janvier, parution du n°1 de l’Union Pharmaceutique.  
   1842 Observations adressées à la Société de Pharmacie de Paris sur la distillation de la salsepareille.    1863 : Dorvault est fait Chevalier de la Légion d’Honneur  
   1844 : Publication de l’Officine. 4 décembre, F. Dorvault est admis à la Société de Pharmacie de Paris.    1866 : 6° édition de l’officine  
   1845 : 21 juillet, démission de la Société de Pharmacie de Paris. Note sur le cachou de Boulogne.    1867 : 7° édition de l’Officine  
   1846 : Note sur l’enrobage des pilules (Journal de Pharmacie)    1872 : 8° édition de l’Officine  
   1847 : F. Dorvault écrit l’Iodognosie, publie le premier supplément de l’Officine et la deuxième édition de l’Officine, collabore à l’Union médicale.    1873 : Parution du Bulletin Commercial, annexe de l’union Pharmaceutique  
   1848 : F. Dorvault publie la Revue pharmaceutique de 1848, supplément à l’Officine de 1849    1875 : 9° édition de l’Officine  
   1849 : Note sur la cannabine. Note sur l’état chimique de l’iode dans les plantes marines.    1879 : 16 février, mort de F. Dorvault.  
   

 

     
   1. Barbaud Jean, Guyotjeannin Charles. De quelques remous au sein de la Société de Pharmacie de Paris au cours de la première moitié du XIXe siècle. In: Revue d’histoire de la pharmacie, 80e année, N. 293, 1992. pp. 212-216.

 2. La plupart des informations sont tirés des ouvrages de Dorvault ou des articles publiés par la Revue d’Histoire de la pharmacie, mais aussi de l’ouvrage de Patrice Boussel : Dorvault, sa vie, son oeuvre, paru en 1979aux Editions de la Porte Verte. Les images sont issues des ouvrages de Dorvault qui sont disposnibles sur Gallica (BNF)  

 
Tags: No tags

Comments are closed.