Extrait de l’ouvrage du docteur Dehaut (1863) sur ce sujet1 :
L’iode se met facilement en vapeur, et cette vapeur se fixe avec une égale facilité sur certains corps, qui se teignent, pour ainsi dire, en prenant la couleur de l’iode. C’est le cas du coton, qui devient presque noir, lorsque ces fibres se sont recouvertes d’une couche mince d’iode. Ce qui est remarquable, c’est que ce coton iodé abandonne lentement l’iode qu’il retient à sa surface et finit par redevenir blanc. On a pensé, avec raison, que le coton ainsi chargé d’iode offrirait un bon moyen d’employer cette substance pour les usages extérieurs, et on a cherché des procédés permettant de préparer le coton iodé de la manière la plus parfaite possible, pour l’usage médical. M. Thomas, pharmacien distingué de Paris, a été le mieux inspiré dans cette recherche, et le coton auquel il a donné son nom est le mieux approprié à cet usage; c’est pour que nous recommandons son produit….
Dans les engorgements du cou, des aisselles et ces aînes; dans plusieurs sortes de tumeurs à marche lente; dans les engorgements chroniques des seins, des jointures, la pommade à l’iodure de potassium est le topique le plus employé. Or, le coton iodé, qui est le même remède sous une autre forme, est d’un emploi à la fois plus efficace et plus commode que la pommade. Tout récemment, nous avons fait disparaître un volumineux engorgement de la glande mammaire dans l’espace de quelques semaines, en enveloppant tout simplement le sein d’une couche très mince de coton iodé, maintenu à l’aide d’une feuille de taffetas gommé bien souple. Comme on le voit, rien n’est plus facile ni plus propre que le pansement au coton iodé.
La seule précaution à prendre consiste à mettre suffisamment de coton pour que l’odeur de l’iode se sente bien, mais à n’en pas mettre assez pour produire l’effet révulsif. En un mot, il faut que le malade ressente une très légère chaleur produite par le pansement, mais il faut que cette chaleur n’aille pas jusqu’à la cuisson, à la rougeur de la peau. Dans le cas où l’épiderme serait trop sensible, on n’aurait qu’à placer une couche de ouate blanche sur la peau avant de poser le coton iodé et le taffetas gommé.
On ne renouvelle le coton iodé que lorsqu’il a presque perdu sa couleur et son odeur, ce qui prend plusieurs jours, et il faut tâcher que le pansement demeure
en place constamment, le jour comme la nuit.
Nous terminerons cette notice en faisant remarquer que le coton iodé, employé comme révulsif, présente un avantage tout spécial dans la médecine des enfants très jeunes, chez lesquels on n’ose pas se servir de sinapismes, d’huile de croton ou d’autres révulsifs trop énergiques pour cet âge. Avec le coton iodé, on peut faire rougir la peau au degré désiré et maintenir l’irritation pendant le temps nécessaire ; il suffit, pour cela, de retirer la petite compresse sèche, lorsque l’effet paraît suffisamment marqué, et de l’appliquer de nouveau, dès qu’on voit que la rougeur tend à disparaître.
- Manuel de médecine, d’hygiène, de chirurgie et de pharmacie domestiques par Dehaut…10ème édition, Paris, chez l’auteur, 1863