Henry CHIBRET (1876-1943)
|
||
Henry CHIBRET, pharmacien Henry Chibret est le neveu de Paul Chibret (1844-1911), père de la Société Française d’Ophtalmologie (1883). Jeune médecin militaire en Kabylie orientale sous le Seconde empire, ce dernier avait contracté une grave maladie des yeux et promis de se consacrer à l’ophtalmologie s’il recouvrait la vue. 30 ans, plus tard, son neveu Henry, fils de pharmacien et lui-même Pharmacien d’officine à Clermont-Ferrand, crée en 1902 un laboratoire derrière son officine pour préparer des médicaments préconisés par son oncle : quelques collyres à base d’atropine, de nitrate d’argent, d’adrénaline et de pilocarpine mais surtout des pommades ophtalmologiques. Depuis 1875, en effet son oncle défend l’utilisation des pommades à base d’un tout nouvel excipient américain : la « pétroline », bientôt désignée sous l’appellation « vaseline ». Application facile, action plus durable, moindre risque de contamination, une nette « amélioration du service rendu », dirait-on aujourd’hui. Les Laboratoires CHIBRET connaîtront d’abord un développement modeste à l’image de ses concurrents français et étrangers, car la pharmacopée ne compte que peu de médicaments actifs.. L’industrie pharmaceutique ne se développera en ophtalmologie qu’après la seconde guerre mondiale. Jean CHIBRET, pharmacien (1915-1989) Après des études de pharmacie à Clermont-Ferrand et Toulouse, il donne, au lendemain de la seconde guerre mondiale, une dimension nationale puis internationale aux Laboratoires CHIBRET qui se hissent au premier rang en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique. Visionnaire, entrepreneur inlassable, Jean s’impose en industriel novateur qui développe, en deux décennies, toute une gamme de collyres et pommades ophtalmiques. Les dossiers d’AMM sont très documentés et les Laboratoires CHIBRET passent au premier rang dans la plupart des classes thérapeutiques de l’ophtalmologie, notamment les antibiotiques et les corticoïdes. Les laboratoires de recherche sont alors les plus importants au niveau international et travaillent en très étroite collaboration avec le monde de l’université. En 1946, il visite les Laboratoires MERCK aux États-Unis avec qui il entretient des rapports de plus en plus étroits. Il obtient leur licence de la streptomycine mais aussi celle des corticoïdes avec, dès 1950, le lancement du premier collyre à la cortisone, qui sera suivi par celui de l’hydrocortisone, puis de la dexaméthasone. Ils vont bouleverser la thérapeutique de l’inflammation oculaire. Lors de sa visite aux États-Unis en 1946, Jean est impressionné par l’avance américaine dans les domaines de la standardisation, de la production de masse comme du contrôle “qualité” De retour en France, il se consacre entièrement à la modernisation des Laboratoires familiaux. Leur dimension industrielle est pleinement atteinte au début des années 1960 avec l’inauguration d’un nouveau site à Clermont-Ferrand. Des installations ultramodernes voient le jour dotées d’appareillages dernier cri qui devancent les standards de qualité exigés par les pouvoirs publics. L’unité de production des Laboratoires Chibret devient l’une des plus modernes et des plus imposantes en Europe Jean CHIBRET est convaincu que la recherche et le développement doivent être les fers de lance de l’expansion des Laboratoires CHIBRET. Il créé une structure interne de R & D pour créer un “pipeline” de nouveaux produits. Il recrute une équipe pluridisciplinaire capable d’étudier toutes les possibilités nouvelles des technologies physiques, chimiques et biologiques pour développer la pharmacopée. Il s’appuie parallèlement sur tous les réseaux institutionnels de recherche. Enfin, Il ouvre dès la fin des années 1940, le plus grand centre mondial de documentation sur l’ophtamologie – l’Institut CHIBRET – fréquenté par des promotions entières de jeunes spécialistes. Cet “Institut” édite la Revue CHIBRET, envoyée à 15 000 ophtalmologistes. C’est aussi cette structure qui organise chaque année à Clermont-Ferrand les symposiums d’ophtalmologie réunissant internes et CES. La réputation du nom CHIBRET devient rapidement synonyme de rigueur, d’éthique et de qualité. À côté des recherches menées sur les molécules, Jean CHIBRET s’intéresse aux conditionnements. Après la deuxième guerre mondiale, grâce au Plan Marshall, la qualité du verre et donc des flacons est améliorée par l’addition d’adjuvants en fonction de son usage. La fabrication devient complètement automatisée et permet une forte augmentation des volumes et une baisse des coûts de production. L’étude de la stabilité des produits conditionnés dans des récipients conduit d’ailleurs à définir plusieurs types de verre. Ultérieurement, ces verres pharmaceutiques vont progressivement être concurrencés par le plastique. À toutes ces étapes, les Laboratoires CHIBRET restent à la pointe de l’innovation : flacon-collyres en verre soufflé, puis en verre traité avec un embout verseur en plastique stérile, flacon en plastique, flacon lyophilisés, les conditionnements CHIBRET évoluent au diapason des dernières découvertes scientifiques et techniques pour toujours mieux satisfaire professionnels et patients. Toujours préoccupé par le grave problème de la contamination, Jean est également le premier à introduire un conservateur dans les solutions et à imposer une date limite d’utilisation après ouverture des flacons. Ces deux idées, apparemment simples, sont reprises par toutes les autorités administratives de santé publique. Jean CHIBRET est le premier à mettre à disposition des praticiens des produits ophtalmologiques à base de pénicilline puis de cortisone. Il faut dire que les trois décennies d’après-guerre marquent une véritable révolution thérapeutique. Antibiotiques, corticoïdes, mydriatiques, anesthésiques, anti-glaucomateux, etc, la gamme CHIBRET s’étoffe au gré des nouvelles découvertes qui surgissent constamment et changent radicalement la pratique quotidienne de l’ophtalmologiste. L’entreprise devient le laboratoire “généraliste” de l’œil. Les patients se familiarisent avec les produits CHIBRET, bientôt reconnaissables entre tous grâce à leur sigle rose à gouttes Jacques CHIBRET (1941-1989) Jean CHIBRET transmet à ses deux fils, Henri (Pharmacien) et Jacques (MBA), sa passion d’entreprendre, d’innover et d’exporter. BIOPHYSIC MEDICAL naît en 1974. Il commercialise un appareil automatique d’électrophysiologie (le Pantops), les études ayant été menées en collaboration avec le Service d’Ophtalmologie du CHU de Clermont-Ferrand. Le Pr. Jean HAUT, du CHNO des Quinze-Vingts à Paris, et le Dr. POUJOL vont permettre à BIOPHYSIC MEDICAL de développer la technique naissante de l’échographie. Jean HAUT et Florence PINON ont un rôle déterminant dans l’élaboration du 1er laser à Argon ophtalmique européen pour le traitement des rétinopathies. Le premier laser Vag pour le traitement de la cataracte secondaire est développé avec le Pr. Aron ROSA en 1983. Biophysic Médical devient rapidement le n°1 mondial dans le domaine de l’échographie ophtalmique et n°2 mondial dans le domaine du laser. Ce succès est obtenu grâce à une analyse poussée des attentes des praticiens. Il s’explique aussi par la constitution par Jacques CHIBRET d’une équipe pluridisciplinaire qui lui permet de mêler les expertises et savoir-faire. Des chercheurs de pointe dans les domaines les plus variés (tubes, fibres optiques, micro-mécanique, micro-électrique, etc.) acceptent de travailler ensemble. Résultat de ce travail collégial : des machines révolutionnaires d’imagerie médicale fabriquées à Clermont-Ferrand sont vendues à travers le monde. Comme pour les Laboratoires CHIBRET, BIOPHYSIC MEDICAL atteint, dans les années 80, le seuil critique d’une “grande entreprise trop petite”. Pour devenir un acteur majeur sur le marché américain, qui représente près de 70 % du marché mondial, BIOPHYSIC MEDICAL s’allie au groupe français Synthélabo Biomedical à travers son actionnaire principal l’Oréal. Ainsi, BIOPHYSIC MEDICAL USA peut être créé en 1984 et connaît un rapide succès. Jacques croit fermement au laser Excimer, pour la chirurgie réfractive de la cornée et développe le premier prototype. Hélas, ce projet est interrompu par sa tragique disparition en Afrique. Il est mortellement blessé, en février 1989, au cours d’une chasse au Cameroun. Il y était parti pour ramener les effets personnels de Jean CHIBRET décédé quelques semaines auparavant. Henri CHIBRET (1940-) Après des études de pharmacie à Clermont-Ferrand et un an en Amérique du Nord, dans l’état de New-York et au Québec, Henri CHIBRET se voit confier, en 1965, la direction de l’ensemble des activités export des Laboratoires CHIBRET. L’une de ses priorités est d’implanter CHIBRET en Allemagne et dans les pays émergents du Golfe Persique : Iran, Irak et Arabie Saoudite. Après la cession des Laboratoires CHIBRET à Merck en 1969, Henri CHIBRET poursuit quelques années sa carrière chez Merck à Bruxelles, puis chez Ferlux à Clermont-Ferrand. Il crée, en 1978, les Laboratoires TRANSPHYTO et élabore de nouvelles molécules ophtalmiques. Une stratégie novatrice en fait une des premières “start-up” françaises, faisant produire et commercialiser ses innovations par des laboratoires français ou étrangers, ses revenus étant assurés par les redevances et la vente des matières premières brevetées. La deuxième originalité de TRANSPHYTO est d’externaliser la majorité des activités de recherche à des sous-traitants et de faire appel aux meilleurs instituts de recherche. Cette stratégie se traduit par une très bonne productivité en matière de R & D, mais ne permet pas à TRANSPHYTO d’être un laboratoire reconnu par les ophtalmologistes. La société est, d’autre part, trop dépendante de ses licenciés. Il crée alors en 1994, les Laboratoires Théa, qui vont commercialiser les nouveaux produits de TRANSPHYTO, d’abord en France puis à travers l’Europe. Le développement des Laboratoires Théa est basé (comme celui des Laboratoires CHIBRET et BIOPHYSIC MEDICAL) sur la priorité donnée à l’innovation, notamment dans les domaines de la sécheresse oculaire, de l’herpès, de l’allergie, du glaucome, de l’infection etc., Par ailleurs, Théa achète à MERCK en 2004, plusieurs collyres renommés des anciens laboratoires Chibret de son père, qui complètent la gamme Théa en France et à l’étranger. Trois ans plus tard, en 2007, Théa acquiert les Laboratoires Europhta à Monaco. Henri CHIBRET, poursuivant la tradition CHIBRET, développe de nouveaux conditionnements des collyres. Il lance en 1996 le 1er flacon multidose sans conservateur, qui, par une membrane filtrante, maintient stérile le contenu du flacon pendant une période allant jusqu’à 2 mois. Les effets délétères des conservateurs dont le chlorure de benzalkonium sont évités. Ironie du sort, Henri CHIBRET supprime l’utilisation des conservateurs que son père avait introduits. Dans les années 2000, Henri se fixe trois objectifs : accélérer les efforts de recherche, poursuivre l’européanisation de l’entreprise (Théa est le premier laboratoire indépendant européen en ophtalmologie) et mettre en selle son neveu Jean-Frédéric CHIBRET. Jean-Frédéric CHIBRET (1975-) Président depuis 2008 des Laboratoires Théa, Jean-Frédéric CHIBRET assure désormais la relève aux côtés d’Henri CHIBRET, lequel demeure à la tête de la Holding Théa et se concentre désormais sur la stratégie scientifique et financière du groupe. Après une formation commerciale et un apprentissage de 2 ans dans la filiale espagnole, Jean-Frédéric s’implique dans l’activité internationale qu’il va progressivement diriger et structurer en créant de nouvelles filiales. Jean-Frédéric CHIBRET assure donc une expansion rapide de la société. Avec 25 filiales à l’étranger – tout en diffusant leurs produits dans plus de 65 pays dans le monde – les Laboratoires Théa acquièrent une présence européenne plus importante encore que les anciens Laboratoires CHIBRET et deviennent un acteur clé de l’ophtalmologie sur le continent et entrent dans le cercle fermé des entreprises pharmaceutiques françaises qui disposent de filiales aux quatre points cardinaux du continent.
|
||
Sources : Lorraine Kaltenbach, Laboratoires ThéaPour plus d’information, regarder le site des Laboratoires THEA qui a pris la succession de Chibret : http://www.laboratoires-thea.com/indexdetails.php?thm=1&dvsn=44
|