Bouillon-Lagrange (1764-1844)
Professeur de chimie à l’Ecole de Pharmacie de Paris, puis directeur de cette école, chef de travaux à Polytechnique, pharmacien de Napoléon et médecin de l’Impératrice Joséphine, Bouillon-Lagrange eut une carrière bien remplie. Auteur, en outre, d’ouvrages scientifiques, il fut le premier à préconiser l’essai chimique des médicaments: « Un médicament, disait-il, est une machine que l’on ne peut bien connaître que lorsqu’on la défait pour examiner toutes les pièces qui la composent. Pour en rendre l’usage plus sûr, il faut démonter toutes les pièces et les examiner à leur tour ».
Né à Paris, le 12 juillet 1764, Edmé-Jean-Baptiste Bouillon-Lagrange avait, un moment, hésité entre la médecine et la pharmacie. Finalement, son goût pour la chimie l’emporta. Son diplôme brillamment obtenu, il acheta l’officine de son beau-frère, J.B. Sureau, officine sise rue Saint-Martin. Mais, deux ans plus tard, en 1789, il s’en défaisait pour se consacrer entièrement à la chimie, sous la direction de Fourcroy et de Berthollet. Discipline qu’il enseigna, la Révolution pasée, à l’Ecole de Pharmacie et à Polytechnique. c’est là que le futur empereur remarqua Bouillon-Lagrange.
Bonaparte, qui accordait au monde scientifique une attention toute particulière, voulut un jour assiter à une leçon magistrale de Berthollet. Bouillon-Lagrange fut son démonstrateur. Il assita son maître durant tout le cours. Devenu empereur, Napoléon se souvint de l’habile préparateur et l’appela auprès de lui, en qualité de pharmacien militaire. Dès lors, Bouillon-Lagrange participa aux campagnes napoléonniennes, tout en préparant un doctorat en médecine qu’il obtint, en 1806, à la faculté de Strasbourg. A partir de ce moment, en tant que médecin, il fut au service de l’impératrice.
Lorsque Napoléon répudia Joséphine, Bouillon-Lagrange fit preuve d’une fidélité et d’un dévouement exemplaire, envers sa patiente. Il refusa de l’abandonner et, de ce fait, il fut rejeté de la Maison Impériale. Il lui restait l’enseignement, la pratique de la médecine, et ses travaux personnels. il étudia plus spécialement les truffes, l’écorce de saule, l’ambre gris, l’ail, l’amidon, l’eau de mer, le lait, etc. Il s’intéressa également à l’hygiène publique, et fit partie du conseil de salubrité.
Il était depuis douze ans à la tête de l’Ecole de pharmacie quand la mort le prit, le 23 août 1844
Source : Texte de Nicole RICHET
Complément sur Edme Jean-Baptiste (1764-1844)
Edme Bouillon de la Grange qui, après la Révolution, se fit appeler Bouillon la Grange, puis Bouillon-Lagrange, fut admis à douze ans au collège Mazarin où il fit d’excellentes humanités. Il entrepris de bonne heure ses études de médecine, mais s’en détourna quelque peu au profit de la pharmacie vers quoi l’attirait son goût pour les sciences physico-chimiques. Reçu pharmacien, le 2 août 1787, par une faveur exceptionnelle puisqu’il n’avait que 22 ans, il reprit l’officine de son beau-frère Sureau, rue Saint-Martin, où il n’exerça que deux ans. Il se consacra alors à la chimie sous la direction d Fourcroy et de Berthollet, mais la Révolution vint bientôt changer le cours de son existence, après avoir même failli le conduire à l’échafaud.
En 1793, Bouillon-Lagrange est pharmacien de 3° classe dans le service des hôpitaux de l’armée de Vendée, puis est nommé à Paris essayeur chimique à l’agence des poudres et salpêtres. il devient ensuite pharmacien du Premier Consul et conserve ses fonctions à la Maison impériale. C’est à ce titre qu’il aurait fait les campagnes du début de l’Empire. Au cours de l’une d’elles, il se fait recevoir docteur en médecine devant la faculté de Strasbourg, le 2 frimaire an XIV (23 novembre 1805). Abandonnant ses fonctions de pharmacien de l’Empereur, il va dès lors remplir l’office de médecin l’Impératrice Joséphine qu’il conserva jusqu’à son divorce en 1809. Ayant ainsi perdu sa situation à la Cour, il se consacre désormais à l’enseignement et à l’exercice de la médecine.
Les inscriptions portées sur son portrait le désignent comme docteur ès-sciences ; il aurait obtenu ce grade en 1817, mais Dorveaux n’a jamais rien pu découvrir sur la thèse qu’il aurait dû soutenir, ni sur la faculté où cette soutenance aurait eu lieu.
Il commence sa carrière d’enseignant dès 1788 comme démonstrateur de chimie au Collège de Pharmacie, fonctions qu’il conserve en 1796 à la Société libre des pharmaciens de Paris, puis à l’Ecole gratuite de pharmacie. C’est ainsi tout naturellement que le décret du 15 vendémiaire an XII (8 octobre 1803) le désigne comme premier titulaire de la chaire de chimie à l’Ecole de pharmacie de Paris, qu’il n’abandonna qu’en 1829 à sa nomination comme directeur-adjoint. Fourcroy lui confia aussi une partie du cours dont il était chargé à l’Athénée de Paris ; il enseigne également à l’Ecole centrale du Panthéon, au lycée Napoléon et au collège Henri IV ; précédemment, il avait été nommé chef de travaux de chimie de l’Ecole polytechnique. C’est en effectuant les expériences illustrant un cours prononcé dans cette Ecole par Berthollet devant Bonaparte qu’il fit la connaissance du futur empereur.
Après avoir exercé les fonctions de secrétaire de l’École de Pharmacie de Paris de 1803 à 1830, il en devint successivement directeur-adjoint le 17 décembre 1829, puis directeur le 31 mai 1832, succédant dans ces deux postes à Laugier, nommé directeur puis décédé.
Travaux.
C’est comme élève de Fourcroy qu’il entreprit à partir de 1790 « l’examen chimique » des médicaments et de leurs diverses matières premières spécialement d’origine végétale (Rhus radicans, truffes, agaric, écorce de Saule, racine de Benoite, tanin, Séné, Semen contra, semence d’Iris pseudocorus, Ail, Aloès, Scammonée, Safran). Ses travaux ont été publiés dans les Annales de chimie, puis dans le Journal de la Société des pharmaciens de Paris qui en constituait en quelque sorte le supplément pharmaceutique, et qui prit le nom de Journal de Pharmacie an l’an VII.
Distinctions honorifiques.
D’après Bussy, il fut Prévôt du Collège de pharmacie, et sans doute ainsi, l’un des derniers.
Membre fondateur de la Société de Pharmacie de Paris, il en fut le secrétaire général de 1803 à 1807 inclus, et la présida en 1809, 1813 et 1819.
Membre honoraire de l’Académie royale de Médecine à la fondation en 1820.
Chevalier de la Légion d’honneur en 1825.
Bibliographie.
Bouillon-Lagrange est l’auteur d’un Manuel d’un cours de chimie qui eut cinq éditions.
Biographies.
Antoine Bussy : Discours prononcé à ses obsèques. J. Pharm. Chim. 3° série, 1844, t.6, p. 230-235.
Henri Buignet : Eloge à la séance de rentrée de l’Ecole. J. Pharm. Chim. 3° série, 1844, t.6, p. 448-463.
F. Dubois : Discours prononcé sur sa tombe au nom de l’Académie de médecine. Répertoire de pharmacie, t.1, 1845, p. 125-127.
G. Planchon : l’enseignement de la chimie au Collège des apothicaires. J. Pharm. Chim. 6° série, 1897, t.6, p. 378-380.
Dr Dorveaux : les pharmaciens de Napoléon, Bouillon-Lagrange. Bull. Soc. hist. pharm. 1921, p. 327-330.
Source : G. Dillemann. Historique des Facultés de Pharmacie… Produits et problèmes pharmaceutiques 1970+